partie 3. vers une modelisation de l’usage de l’idee du vrai dans l’enseignement des mathematiques au college.

[...] Les ténèbres spirituelles ont une structure et, dans ces conditions toute expérience objective correcte doit toujours déterminer la correction d’une erreur subjective. Mais on ne détruit pas les erreurs une à une facilement. Elles sont coordonnées. L’esprit scientifique ne peut se constituer qu’en détruisant l’esprit non scientifique. [...] Tout réel progrès dans la pensée scientifique nécessite une conversion. Les progrès de la pensée scientifique ont déterminé des transformations dans les principes mêmes de la connaissance. G Bachelard. La philosophie du non - Edition PUF Quadrige - 4ième - 1994. p.8

La partie deux a montré que l’idée du vrai interpelle plusieurs façons de concevoir des objets mathématiques et leur mode de connaissance : une conception réaliste, idéaliste et constructiviste. La première prétend que l’idée du vrai préexiste à l’activité de preuve ; la seconde avance que l’idée du vrai existe en soi ; la dernière suppose que l’idée du vrai relève d’une construction.

D’après Brousseau la présentation axiomatique des mathématiques est une présentation classique des mathématiques et elle paraît merveilleusement adaptée à l’enseignement dans la mesure où elle permet de définir les objets que l’on étudie à l’aide des notions précédemment introduites. Mais elle gomme complètement l’histoire des sciences, c’est-à-dire la succession des difficultés et des questions qui ont provoqué l’apparition des concepts fondamentaux, leur usage pour poser de nouveaux problèmes, l’intrusion de techniques et de questions nées des progrès des autres secteurs, le rejet de certains points de vue trouvés faux ou maladroits et les innombrables querelles à leur sujet. Cela rappellerait plutôt les conceptions réaliste et idéaliste dans lesquelles la rationalité mathématique et les règles de la logique préexistent à toute activité, comme si elles s’imposaient d’elles-mêmes, comme si l’idée du vrai existait en soi. Or, la présentation axiomatique masque le vrai fonctionnement de la science, pour mettre à la place, une genèse fictive. Cette opération est qualifiée par les épistémologues de transposition didactique et doit être mise sous surveillance. Nous aurons donc le souci d’analyser les programmes pour étudier la manière dont ils s’emparent de la question du vrai.

En outre, selon M. Develay, l’émergence de la didactique est en réaction aux approches des questions d’éducation en termes de relation telles que les fécondaient les sciences de l’éducation. Il montre, que dans les années 1970 un mouvement issu de structures à découpages disciplinaires (IREM et INRP) mettent l’accent sur les questions d’appropriation de contenus par les élèves. A l’élève bio-psycho-social des travaux de pédagogie se substitue l’élève épistémique. La didactique s’affirme donc comme questionnement nouveau par rapport au questionnement pédagogique, dès lors qu’elle considère que la particularité des savoirs enseignés détermine des modes d’apprentissage et des modalités d’enseignement particuliers dans lesquels une autre conception (que la conception idéaliste ou réaliste) des objets mathématiques peut être véhiculée. C’est pourquoi nous déterminerons la conception générale de l’enseignement apprentissage que nous défendons en l’illustrant par des situations didactiques en regard du traitement de la question du vrai.

L’idée du vrai dans l’enseignement contribue sans doute à développer un certain regard mathématique d’autant plus que la logique déductive qui conservait valeur décisive de preuve et constituait un fondement irrécusable de vérité se révéla insuffisante. Depuis Gödel, l’indécidabilité au sein des systèmes formalisés complexes eut pour conséquence de montrer que seul un chemin relatif permet d’accéder à une vérité. Dès lors, il est une nécessité d’élaborer des principes généraux pour penser cette question au sein de l’enseignement des mathématiques en collège et c’est ce que nous proposerons.