III.1.1.1«L'essentiel, c'est que ce soit propre».

Nombre d'habitants affirment que la propreté de l'appartement dans lequel ils vivent est quelque chose de primordial. C'est une condition suffisante pour que les locataires soient globalement satisfaits de leur appartement, même s'ils peuvent parallèlement en regretter certains défauts. L'expression «l'essentiel, c'est que ce soit propre» est ainsi utilisée aussi bien à Garches qu'à Gennevilliers :

  • «Le tout est de très bas de gamme, je suis contente, je fais avec, l'essentiel, c'est que ce soit propre» (n°12, Gennevilliers, femme).
  • «Il faut se taper dessus [pour obtenir de l'organisme les travaux souhaités], et même si vous vous tapez dessus, ça ne sert à rien, alors avec ma femme, on a dit : «on est tranquille, l'essentiel, c'est que ce soit propre chez nous», et puis c'est tout.» (n°8, Garches, couple).

Le terme «essentiel» appliqué à la propreté est associé à trois idées connexes : la propreté est considérée comme absolument nécessaire, indispensable, d'une part, comme la chose la plus importante, principale, d'autre part, et enfin, les actes de nettoyage sont présentés comme des actes minimums à accomplir. En développant cette analyse, en cherchant systématiquement à quoi la propreté est nécessaire, sur quoi elle doit primer, quel acte complémentaire le nettoyage peut engendrer, on réalise deux constats.

D'une part, la propreté est essentielle pour se sentir chez soi : lorsque l'appartement est propre, on peut y vivre sans plus s'occuper des autres. La propreté est la condition principale, qui lorsqu'elle est remplie, permet l'usage personnel du logement en oubliant le monde extérieur, comme le laisse entendre cette habitante :

  • «Nous, on est chez nous, le restant, tu sais ! On s'occupe pas d'ailleurs. Nous, c'est propre, c'est entretenu, c'est le principal» (n°10, Gennevilliers, femme).
    D'autre part, la propreté est un préalable indispensable à la beauté ou au luxe et le nettoyage peut être complété par des actes plus conséquents d'amélioration de l'espace, par de plus gros travaux par exemple :
  • «Hormis l'entretien courant, les peintures, on n'a pas fait de gros travaux (…) on fait quand même le minimum, que ce soit propre (…) à part tenir au propre, ce qui est la moindre des choses, on ne va pas faire de gros travaux» (n°8, Gennevilliers, couple).

Le nettoyage est donc le premier acte d'appropriation de l'espace, qui peut se suffire à lui-même ou être le préalable à une adaptation plus personnelle : une fois que l'espace domestique est propre, on est chez soi, on s'y reconnaît, même si on peut regretter qu'il ne soit pas plus beau encore. A l'inverse, on ne peut juger beau quelque chose qui serait sale, la beauté devenant de la sorte artificielle, sans qu'on puisse y croire, comme le rappelle un habitant qui compare la propreté de l'espace à la propreté corporelle :

  • « C'est comme une belle femme, qui sent bon, qui a une belle robe, mais qui n'est pas lavée. » (n°8, Garches, couple).

Si les habitants rencontrés considèrent unanimement le nettoyage comme un acte primordial, ils possèdent chacun une opinion personnelle différente de la limite entre propre et sale. Ainsi, une habitante explique qu'elle supporte mal de ne pouvoir nettoyer son balcon elle-même de l'intérieur et qu'elle serait prête à payer une entreprise pour effectuer un nettoyage par nacelle par l'extérieur, mais qu'elle ne soumet pas l'idée à l'organisme HLM car elle est sûre que les autres habitants ne voudront pas supporter les coûts de cette tâche, ne partageant pas le même point de vue qu'elle.

Mais quelles que soient les limites entre propre et sale que fixe chaque ménage, les actions de nettoyage restent primordiales, car elles sont indispensables pour permettre un usage personnel du logement et forment un préalable nécessaire pour la réalisation d'autres travaux de personnalisation de l'appartement.