III.2.3.Comparer avec d'autres lieux.

La construction d'une image valorisée des appartements par les ménages qui les occupent est lisible par une analyse systématique des comparaisons effectuées spontanément par les habitants au cours des entretiens. Ces comparaisons concernent exclusivement la situation du logement, son emplacement, et non l'intérieur domestique lui-même, la situation étant une composante essentielle dans la construction des images. Les habitants construisent en effet l'image de leur logement par comparaison avec des lieux connus par les représentations collectives dont ils font l'objet. Ces comparaisons utilisent ainsi les opinions, jugements et critères de valeurs qu'intègrent les représentations collectives. Afin d'exprimer leur conception de leur cadre de vie, les habitants recourent volontiers à un rapprochement ou au contraire à une mise à distance entre leur propre logement et un endroit symbolique, présenté comme un stéréotype des caractéristiques qu'ils souhaitent exprimer. Des lieux servent ainsi de référence, par rapport auxquels il devient possible de se positionner.

Certains endroits sont ainsi présentés comme des repoussoirs, pour montrer une distinction forte par rapport à un espace stigmatisé. D'autres sont au contraire présentés comme étant similaires à l'endroit habité car ils présentent les mêmes caractéristiques positives, tandis que d'autres encore apparaissent comme des lieux inaccessibles, symboles de luxe et de richesse.

C'est le recours à des lieux repoussoirs qui est le plus utilisé dans les entretiens, révélant le processus de construction d'une image valorisante par lequel chaque habitant a composé sa propre carte mentale indiquant sa situation par rapport à des lieux de référence. La différence entre les habitants de Gennevilliers et de Garches est à cet égard très nette : alors que les locataires de l'immeuble Paul Eluard utilisent majoritairement le quartier voisin du Luth, souffrant d'une mauvaise réputation collective pour exprimer leur distinction, les locataires de la résidence des Châtaigniers opposent la ville de Garches à des villes stigmatisées de départements limitrophes, beaucoup plus lointaines. Ainsi, même si la construction d'une image valorisante est plus aisée à Garches qu'à Gennevilliers, grâce à une réputation très favorable, ce processus se déroule de façon similaire entre les deux sites.