IV.1.1.1.Caractéristiques architecturales.

L'ensemble de la résidence des Châtaigniers a été conçu comme un unique projet par deux architectes : elle possède donc une forte unité architecturale intérieure, les sept bâtiments qui la composent étant très ressemblants. Leur taille diffère, variant de 20 à 60 logements, mais leurs volumes restent comparables, ainsi que leurs formes : il s'agit de plots d'une entrée et de barres peu étendues de trois entrées, d'une hauteur comprise entre quatre et sept étages. Le rythme des percements, l'alternance de balcons et de simples fenêtres sont similaires d'un immeuble à l'autre. Le traitement des toitures-terrasses, des façades et des halls d'entrée est strictement identique pour tous les bâtiments.

L'unité architecturale est également perceptible dans le traitement des abords : les équipements tels que les éclairages au pied des immeubles sont tous les mêmes, tout en se distinguant du mobilier urbain utilisé par la ville de Garches, les allées piétonnes sont réalisées dans les mêmes matériaux, le terrain entre les immeubles, non utilisé pour les déplacements ou le stationnement des véhicules, est recouvert de végétaux (pelouses, arbustes, arbres), dont l'accès est réservé aux habitants de la résidence et à eux seuls.

La résidence des Châtaigniers possède non seulement une homogénéité interne, mais aussi une séparation franche du reste de la ville. Ses contours sont délimités matériellement, par un grillage, par un alignement d'arbres, par les murs de certains immeubles et même par des barrières séparant la voirie publique des allées intérieures privées (cf. figure 8). Sa délimitation est donc très précise, correspondant aux limites de propriété, et clairement indiquée matériellement. De plus, la résidence s'intègre dans un quartier pavillonnaire et l'opposition entre les volumes d'habitation participe au marquage symbolique de ses contours. La résidence des Châtaigniers ne peut donc être considérée comme un quartier, ou un morceau de ville, car la séparation entre espace public et espace privé est trop clairement affichée. Le fait d'être entourée de pavillons contribue tout autant que son homogénéité architecturale et la netteté de ses contours à l'individualiser aux yeux de tous.

A l'opposé, le quartier du Fossé de l'Aumône, à Gennevilliers, a été construit sur une courte période, mais non comme un unique programme : l'ensemble du quartier a été réalisé dans le même style architectural, mais sans uniformité. Les volumes sont très différents : il s'agit de tours de 124 logements, de barres de grande taille (95 logements) et de taille moyenne (65 logements), ainsi que d'un très grand immeuble de forme courbe. Le traitement des bâtiments de même volume est comparable, sans être rigoureusement identique.

Mais plus encore que l'hétérogénéité des bâtiments qui le compose, l'ouverture du quartier sur l'extérieur empêche de le percevoir comme une entité architecturale. Aucune limite n'est matérialisée entre le quartier du Fossé de l'Aumône et le reste de la ville. Il n'existe même aucun espace de transition, puisque chaque immeuble, qu'il soit orienté nord / sud ou est / ouest, est directement relié par une voie piétonne au boulevard Pierre de Coubertin, grosse artère traversant Gennevilliers du nord au sud, tandis que quatre rues traversent le quartier d'est en ouest (cf. figure 7). Le mobilier urbain mis en place est celui de la ville de Gennevilliers. Un espace vert entre plusieurs immeubles a été aménagé en square, dont l'accès n'a pas été réservé, même symboliquement, aux habitants du quartier, mais qui s'intègre au contraire dans la ville.

Les limites du quartier du Fossé de l'Aumône étant peu perceptibles, à la fois par l'absence d'une homogénéité interne et par manque de distinction par rapport au reste de la ville, l'échelle pertinente de cohérence architecturale est réduite à l'immeuble. Chaque bâtiment dispose de son propre parc de stationnement, situé à proximité immédiate, les places étant alignées face aux entrées. Les couleurs des immeubles s'harmonisent, sans être identiques dans les moindres détails. On retrouve certains éléments d'un bâtiment à l'autre, tel que la signalétique donnant le numéro d'entrée, mais le traitement global des halls est propre à chacun.

Ainsi, la matérialisation symbolique des frontières et la cohérence architecturale interne pour la résidence des Châtaigniers, le manque d'homogénéité du quartier du Fossé de l'Aumône et son ouverture sur l'extérieur parallèlement à la spécificité du bâtiment Paul Eluard, forment une unité interne et une distinction par rapport au reste de la ville pour ces deux espaces. Cette identification, perceptible dans sa matérialité, tend à faire voir ces espaces sous leur dimension collective, dimension d'autant plus marquée que l'usage de l'espace matériel est commun.