VI.1.3.Une réhabilitation appréhendée à travers des comportements d'appropriation.

Dès l'annonce de travaux par les organismes HLM, les habitants anticipent et interprètent les futures réhabilitations. Ces réactions dépendent du processus d'appropriation engagé avant les travaux : les habitants anticipent les opérations à partir de leur système de représentations, qui comprennent notamment des images valorisées du logement.

Ils tendent ainsi à rappeler le caractère nécessaire et indispensable des travaux de réhabilitation, manière de dénier la représentation d'une relation d'assistanat avec l'organisme HLM, afin de ne pas perturber la construction d'images valorisantes du logement. En effet, la perception des réhabilitations sous la forme de dons ou de faveurs des organismes HLM, en réponse à une attente ou une demande de la part de leurs locataires, empêcherait les habitants de considérer positivement les travaux (qui seraient associé à la notion d'assistanat fortement dévalorisée) et rendrait de la sorte difficile leur appropriation.

De même, c'est parce les habitants ont procédé à de multiples transformations de l'espace matériel, destinées à l'adapter ou à l'embellir, donc à le valoriser, qu'ils redoutent que la réalisation des travaux de réhabilitation ne viennent abîmer leurs propres aménagements et décorations. Plus ces comportements d'appropriation sont développés et plus la crainte de les voir contrariés par des salissures ou des dégradations peut être forte, au point de rendre négligeables pour ces ménages les améliorations que la réhabilitation est susceptible d'apporter.

Enfin, les habitants qui ont développé de multiples habitudes d'usage de leur logement redoutent le dérangement et la gêne occasionnés par le chantier. Plus l'appropriation par l'usage de l'appartement est développée, c'est-à-dire plus les gestes familiers qui y sont accomplis sont nombreux ou importants aux yeux des habitants (cas des assistantes maternelles à domicile, des personnes âgées qui restent toute la journée dans leur appartement, etc.), et plus les désagréments liés à la réalisation des travaux sont redoutés.

Alors que les organismes HLM jugent qu'ils réalisent les opérations de réhabilitation essentiellement pour répondre aux attentes de leurs locataires, les habitants tendent à considérer ces travaux comme des travaux nécessaires et dus par les organismes et sont amenés le plus souvent à les redouter plus qu'à les souhaiter, en raison de leur engagement dans le processus d'appropriation de l'espace domestique. La réhabilitation s'inscrit de la sorte dans le processus d'appropriation dans la phase d'élaboration du projet. Lors de la phase suivante de réalisation des travaux, les habitants développent de nouveaux comportements destinés à intervenir dans la transformation de l'espace matériel, qui sont autant de comportements d'appropriation de leur espace domestique au moment de la réhabilitation.