Une clarification nécessaire de l’idée démocratique

L’un des problèmes qui apparaît dans les travaux sur la question démocratique appliquée au fonctionnement de l’organisation militante, dans les plus anciens comme dans les plus récents, c’est l’absence de clarification des significations de la notion de démocratie.

Les travaux anglo-saxons, cités précédemment, posent la question de la démocratie. S. M. Lipset, M. Trow et J. Coleman ont choisi, avec la Fédération américaine des typographes, une organisation qui, selon les critères qu’ils identifient comme généralement admis en Occident, fonctionne démocratiquement, et ont à partir de là, essayé de comprendre les facteurs qui ont permis la réussite de cette expérience (LIPSET, TROW & COLEMAN 1956). P. C. Magrath, dans un travail d’évaluation du caractère démocratique des organisations syndicales, mobilise des critères qu’il identifie comme ceux généralement admis pour identifier un régime politique de type démocratique, c’est-à-dire : l’existence d’objectifs politiques généraux conformes aux aspirations de la majorité des membres du groupe, la responsabilité des dirigeants devant leurs mandants, l’existence d’une opposition continue et institutionnalisée, la garantie des droits individuels fondamentaux (comme le droit de voter, de critiquer et d’agir (MAGRATH 1959). Ces travaux ne font pas l’économie d’une clarification de la notion de démocratie mais leurs auteurs construisent une définition de celle-ci dont on peut discuter la pertinence. Sabine Erbès-Seguin souligne justement qu’ils « tendent à assimiler le gouvernement d’un syndicat à celui d’un État, donc à lui appliquer les critères de démocratie admis par la science politique » (ERBÈS-SEGUIN 1964, p. 419). L’analyse produite ici part de l’idée que les militants se font de la démocratie et de l’idée qu’ils se font de ce que sont des pratiques syndicales démocratiques.