Une entrée dans l’organisation par le « bas » : l’étude d’un syndicat de la fédération Sud-PTT

Nous avons décidé d’entrer dans le syndicat Sud-PTT par le « bas », c’est-à-dire en étudiant un syndicat membre de la fédération Sud-PTT. Par rapport à ce qui est généralement fait dans les études syndicales, nous avons choisi une échelle d’observation différente en partant d’un syndicat local. Les études consacrées au syndicalisme se concentrent en effet plutôt sur ce qui se passe au niveau des directions nationales, dans les « sommets ». Nous avons donc pour notre part choisi d’orienter de manière privilégiée le regard vers le « bas », vers un syndicat local, tout en prenant en compte « les hauteurs », c’est-à-dire ici le niveau fédéral, mais en en faisant un niveau secondaire de l’analyse.

Le syndicat étudié recouvre trois départements. Toutefois, l’implantation (en termes d’adhésion) demeure très inégale d’un département à l’autre, avec une forte concentration des adhérents sur l’un des trois départements – et même plus précisément sur l’agglomération principale de ce département – et des adhérents le plus souvent isolés sur les deux autres. Il compte aujourd’hui environ 190 adhérents 13 . C’est un syndicat de taille moyenne par rapport aux autres syndicats de la fédération. Les premiers adhérents sur la zone géographique couverte par le syndicat apparaissent en 1990. Ils sont huit en 1990-1991. Mais c’est seulement en novembre 1993 qu’une équipe militante se met en place et qu’un processus de formalisation s’amorce avec la désignation d’un bureau départemental. Le syndicat tient son premier congrès en novembre 1994. Il compte alors une cinquantaine d’adhérents. La journée de grève organisée le 12 octobre 1993 contre le projet de privatisation de France Télécom lancé par Gérard Longuet est l’occasion pour le syndicat de faire sa première apparition publique 14 . Les élections professionnelles de 1994 sont les premières élections auxquelles le syndicat participe. Les sections syndicales fonctionnant régulièrement et assurant une prise en charge collective du travail syndical sur les établissements sont très peu nombreuses. A la fin de la période d’observation, il n’y a que trois sections, deux à France Télécom et une à La Poste. La plus grosse d’entre elles, implantée sur un site de France Télécom, réunit vingt-et-un adhérents, alors que le site compte 420 salariés. Les deux autres sections sont implantées dans le secteur commercial à France Télécom et au centre de chèques postaux (huit adhérents) 15 .

Au cours de l’étude, ce terrain, s’est révélé être un « bon » terrain pour travailler la question démocratique, du fait des difficultés internes que cette organisation rencontre, du faible poids des routines et des tensions qui la traversent, engageant de fréquents débats sur le thème du fonctionnement interne.

Notes
13.

190 adhérents sont répertoriés dans le fichier en mars 2003 mais seul 133 se sont acquittés de l’intégralité de leur cotisation et 46 n’ont payé aucun timbre en 2002.

14.

Au cours du mois d’août 1993, Gérard Longuet, ministre des PTT, annonce la préparation d’un projet de loi prévoyant l’ouverture du capital de France Télécom aux capitaux privés. Cette annonce provoque, au cours du mois d’octobre, un mouvement de grève très suivi à La Poste, et plus encore à France Télécom, qui entraînera le retrait du projet.

15.

Deux ans auparavant, il existait deux sections implantées dans deux grands bureaux de poste. Elles ont disparu suite à la démission des militants qui les animaient. La quasi absence de sections syndicales à La Poste, dans une zone sur laquelle il y a pourtant deux centres de tri, une plate-forme colis, des bureaux de poste importants, avec plus de 100 salariés, est étonnante au regard de l’implantation de Sud-PTT dans le secteur postal sur le reste de la France.