Un syndicalisme de lutte

Le syndicalisme Sud se présente comme un syndicalisme de lutte, de contestation, fondé sur la construction d’un rapport de force par la mobilisation. La logique de confrontation est privilégiée par rapport à une logique de régulation et de négociation. La lutte est le moteur de la transformation sociale.

La vision du monde social et des rapports sociaux qui ressort des productions écrites de Sud-PTT, et notamment de la charte, est d’inspiration marxiste. La société capitaliste est une société divisée en deux classes entretenant entre elles un rapport de domination-exploitation et dont les intérêts sont fondamentalement antagonistes. Les contours de ces deux classes restent flous. D’un côté, on a les « travailleurs », « les peuples », « les exploités », les « opprimés » et de l’autre « les marchés financiers », « le néo-libéralisme », « le système capitaliste » (il y a une tendance à la désincarnation de la classe exploiteuse). Ces deux classes entretiennent un rapport de domination-exploitation : le système capitaliste « [soumet] les travailleurs et les peuples, quels qu’ils soient, à sa logique de profit » ; les travailleurs « créent les bases matérielles de toute société » et « se voient confisquer, partout dans le monde, l’essentiel du fruit de leur travail » (charte). Les intérêts de ces deux classes sont fondamentalement antagonistes : « le discours ambiant sur la fin de la lutte des classes, l’idéologie du chauvinisme d’entreprise exprimant une soi-disant communauté d’intérêts liant salariés et patrons de ‘notre maison’ face à ceux de la ‘concurrence’ ne sauraient le faire oublier : l’histoire des conflits sociaux, loin d’être une longue suite de malentendus, témoigne d’une lutte incessante et acharnée entre deux mondes dont les intérêts sont fondamentalement antagonistes » (charte). Par rapport à cet antagonisme de classe, Sud affirme le primat des luttes : « les directions d’entreprise ne se déterminent pas sur la qualité d’un dossier ou la pertinence d’un argument, elles le font sur la base de leurs seuls intérêts. C’est donc fondamentalement le rapport de force créé dans et par les luttes qui est déterminant pour gagner » (charte).

On peut faire le parallèle avec le modèle du « syndicat-mouvement » identifié par Guy Groux et René Mouriaux dans le cadre de leur étude de la CGT. Ils expliquent : « la logique qui l’anime relève du rapport de force »  ; « l’assise principale du syndicat, c’est la mobilisation plus que les positions dans l’institution »  ; dominent dans les discours les représentations relevant de la lutte de classes : « il y a le patron et nous », avec des thèmes qui débordent le domaine de l’exploitation économique (par exemple avec le sexisme) (GROUX & MOURIAUX 1992, p. 211).