Mandatement et autonomie individuelle

Le principe de mandatement implique l’effacement de l’individu mandaté et de ses positions personnelles, de ses convictions, au profit de la parole collective contenue dans le mandat. Cet effacement n’est pas toujours évident à produire dans les cas de discordance entre la position individuelle du représentant et la position collective qu’il est chargé de défendre.

Ainsi par exemple, Christine, rendant compte dans une réunion de bureau d’un congrès fédéral auquel elle a participé en tant que délégué représentant le syndicat, indique que les votes ont été effectué « en fonction des résultats de l’AG » (répartition des mandats en fonction des résultats du vote de l’AG) et ajoute : « c’est difficile de défendre un truc quand t’as pas d’accord avec » (BS n°32). C’est l’investissement discursif dans la défense d’une position collective non conforme à une position individuelle qui est difficile à produire 327 .

Notes
327.

Cet impératif d’effacement de l’individu et les difficultés qu’il peut éventuellement poser sont évoqués par Jean-Michel Denis dans son analyse des coordinations et de leur fonctionnement selon une logique de démocratie directe et de mandatement strict de délégués habilités à parler au nom de la coordination : « un problème de conscience se pose à certains membres des coordinations cheminote et infirmière. Il se pose notamment à ceux qui se montrent favorables à l’ouverture de leur mouvement aux autres catégories professionnelles, mais qui ne peuvent l’entreprendre puisqu’ils sont prisonniers d’un mandat de représentation exclusive de leur profession. Forcer l’ouverture signifierait non seulement la transgression du mandat par rapport auquel ils ont été élus mais, de plus, ferait courir le risque d’une scission de leur mouvement. À l’inverse, l’exécution stricte de leur mandat va contre leurs idées et aspirations » (DENIS 1996, p. 117).