L’effet de l’arrivée de nouvelles générations d’adhérents

L’entrée à Sud-PTT de nouveaux adhérents, qui n’ont pas vécu les mêmes expériences que les fondateurs et que les premières générations d’adhérents, qui font le choix d’entrer dans un syndicat qui n’est plus ce qu’il était il y a dix ans, notamment sur le plan de son développement, de la place qu’il occupe dans le champ syndical, un syndicat dont le discours sur la rénovation démocratique du syndicalisme, finalement très lié au contexte de la création, est peut-être moins présent, moins audible, peut conduire à diminuer la place accordée à l’exigence de démocratie par rapport à l’exigence d’efficacité dans les conceptions du « bon » fonctionnement syndical 338 . La perception des règles de limitation comme marqueurs de l’identité syndicale est peut-être moins répandue chez les nouveaux adhérents.

Par ailleurs, les nouveaux adhérents ne portent pas nécessairement à la question du permanent syndical l’intérêt que lui portent les adhérents plus anciens. L’intérêt portée à la question est sans doute d’ailleurs moins lié à l’ancienneté dans l’organisation qu’à l’expérience syndicale passée. C’est en tout cas l’hypothèse qui peut être formulée à partir de l’examen du tour de table sur la question de la limitation des détachements syndicaux qui se déroule lors d’un congrès du syndicat étudié (congrès n°3). Au cours de ce tour de table, plusieurs nouveaux adhérents interviennent. Quatre, qui ont adhéré très récemment et qui ne disposent pas d’une expérience syndicale passée, refusent de prendre position en indiquant qu’ils n’ont pas le « recul suffisant » pour se prononcer ou qu’ils ne sont « pas assez informés » pour faire part de leur point de vue. Si ce refus de donner leur avis peut être lié au refus prendre position dans une configuration conflictuelle, ce qui est perçu comme pouvant mettre en péril leur intégration au groupe 339 , il peut être aussi lié aux fait que ces personnes n’ont pas d’opinion, qu’il ne s’agit pas là d’une question sur laquelle elles ont déjà eu l’occasion de réfléchir et que les quelques éléments qu’elles ont pu entendre au cours du tour de table ne leur permettent pas de produire un avis. Les autres nouveaux adhérents disposant d’une expérience syndicale livrent quant à eux un avis. C’est par exemple le cas de cet adhérent, qui a milité pendant de longues années à la CGT avant d’entrer à Sud-PTT, et qui explique qu’à la CGT le secrétaire est toujours « forcément permanent » et qu’il n’est pas souhaitable que Sud-PTT s’aligne sur ce type de schéma de fonctionnement.

Notes
338.

Nous ne disposons pas du matériau empirique autorisant à aller au-delà de la formulation d’une simple hypothèse sur ce point.

339.

Voir dans le chapitre 2 de cette seconde partie le point consacré au procédé du tour de table.