La bibliographie de Sara de Mundo Lo 206 mentionne deux titres de littérature pour enfants traduits par Cortázar pour les éditions Codex de Buenos Aires. Il s’agit de Mujercitas de Luisa May Alcott 207 et de Tom Brown en la escuela de Thomas Hughes, tous deux parus en 1951. Nous avons pu recouper cette piste grâce à Biblos 208 , la revue de la Cámara argentina del Libro, qui propose les informations suivantes :
–Alcott, Luisa May : Mujercitas, Codex, colección Biblioteca Universal Juvenil, ilustrador Carlos Freixas, traductor Julio F. Cortázar, cartoné, 8 x 13 cm, 403 páginas, 8 pesos.
–Hughes, Thomas : Tom Brown en la escuela, Codex, colección Biblioteca Universal Juvenil, ilustrador Carlos Freixas, traductor Julio F. Cortázar, cartoné, 8 x 13 cm, 388 páginas, 8 pesos.
Il s’agit donc de livres de très petit format, qui tiennent dans la main d’un enfant. Nous avons retrouvé, avec peine, plusieurs autres titres de cette même collection : ils sont tous de couleur bleu marine et les illustrations n’apparaissent pas dans le texte (elles se trouvent en première et en dernière page). L’illustrateur semble être relativement connu : Carlos Freixas est un catalan émigré en Argentine, sans doute suite à la guerre civile espagnole. Il est décédé il y a peu.
Lors de nos recherches à Buenos Aires, nous avons été fort surprise de ne trouver presque aucun livre des éditions Codex dans les trois bibliothèques nationales que compte la ville : La Biblioteca Nacional de la República Argentina, la Biblioteca Nacional del Maestro et la Biblioteca del Congreso de la Nación. Tout livre édité en Argentine doit pourtant légalement être déposé dans au moins une de ces bibliothèques. Pour ce qui est des bibliothèques municipales, nous n’avons pas eu plus de chance et nous n’avons pas non plus trouvé ces livres dans les nombreuses librairies d’occasion et bouquinistes que nous avons fréquentés. Nous avons pensé dans un premier temps que la raison était sans doute liée au genre de ces ouvrages : en effet, les livres de littérature pour enfants étaient-ils considérés comme dignes d’être gardés durant plus de cinquante ans dans les bibliothèques publiques ? Ayant été manipulés par plusieurs générations d’enfants, leur état l’aurait-il permis ?
Nous avons fini par rencontrer M. Pablo Medina, propriétaire d’une immense bibliothèque consacrée à la littérature jeunesse, qu’il a convertie en un Centre de Documentation pour enfants appelé « La Nube ». Cet éminent spécialiste du domaine jeunesse n’avait pas entendu parler de ces traductions de Cortázar, mais nous a expliqué que les éditions Codex étaient devenues les éditions officielles du péronisme et publiaient donc des livres scolaires très idéologiques, des textes de lois... Il semble qu’au moment de la dictature, le pouvoir ait organisé des purges dans les bibliothèques publiques ; les livres édités par Codex étaient retirés des rayons et brûlés. Les archives de Codex ont également été détruites dans des circonstances similaires. Ceci semble expliquer la très grande difficulté à retrouver ces deux inoffensives traductions de Cortázar.
S. DE MUNDO LO : Julio Cortázar : his Works and his Critics. A Bibliography (inédit ; publication en offset par Albatross, Urbana, Illinois, 1985).
Le titre français est Les quatre filles du Docteur March.
Biblos n° 48 (1er novembre / 31 décembre 1951).