Coulisses de la Traduction Poétique : Une Écriture ?

Nous allons voir que Cortázar traduit de la poésie, sans pour autant publier son travail, semble-t-il, puisque nous n’avons retrouvé que des manuscrits. Or, nous savons que dès 1938, notre auteur édite, sous le pseudonyme de Julio Denis, un recueil de poèmes intitulé Presencia. Et, bien que se considérant lui-même comme un poète de second ordre, il ne cessera d’écrire de la poésie dans les années qui suivront.

De même, le Cortázar traducteur de poésie ne trouve pas son travail réussi, puisqu’il dit à ce propos :

‘Un séptimo día miré lo que había hecho y lo encontré malo. 296

Mais, tout comme la qualité de son œuvre poétique a été et lui a été redécouverte tardivement 297 , ne vaudrait-il pas la peine de se pencher plus avant sur la qualité de son travail de traducteur de poèmes ?

D’autre part, on remarque les termes qu’il emploie pour parler de ses traductions poétiques : il se réfère au canon absolu de la création, la divine création de la Genèse (« Un septième jour, j’ai regardé ce que j’avais fait et je l’ai trouvé mauvais »). Quel est donc le rapport entre cette expérience de poète et la traduction de poésie ? Quelle part d’écriture, de création faut-il pour arriver à traduire un poème ?

Notes
296.

in « Tombeau de Mallarmé », La Vuelta al día en ochenta mundos. (« Un septième jour, j’ai regardé ce que j’avais fait et je l’ai trouvé mauvais » Trad. S.P.)

297.

Cartas, p. 1127 (6 avril 1967) : « ¿Te conté (…) que Gianni Toti (…) se encontró conmigo en La Habana, y me anunció que amaba a mi poesía (sic) y que estaba firmemente dispuesto a vencer mis resistencias y publicar un volumen en italiano ? Cuando salí del colapso, descubrí que Gianni hablaba en serio, y aquí me tenés mirando estupefacto mis cuadernos de fuga (que así los llamo) antes de mandar una especie de antología de poemas. Pasada la primera sorpresa, se vio reemplazada por un regocijo indescriptible, porque vos reconocerás que eso de aparecer como poeta en italiano es algo que se las trae. » (« Je t’ai raconté que j’ai rencontré Gianni Toti à La Havane et qu’il m’a annoncé qu’il aimait profondément ma poésie (sic) et qu’il était fermement disposé à vaincre mes résistances et à publier un volume en italien ? Une fois remis de l’évanouissement, j’ai découvert que Gianni parlait sérieusement, et me voilà en train de regarder stupéfait mes cahiers de fugue (que j’appelle ainsi) avant de lui envoyer une espèce d’anthologie de poèmes. Après la première surprise, je me sens indescriptiblement content, parce que tu reconnaîtras qu’en tant que poète, être publié en italien, ça a de la classe. » Trad. S.P.). Il faut aussi bien sûr signaler l’importance du travail critique de Daniel Mesa Gancedo sur la poésie de Cortázar.