George Meredith : « Endecha en los bosques »

Dans le fonds de l’Université de Princeton 319 , nous trouvons un manuscrit proposant la traduction d’un poème de George Meredith, « Dirge in woods », sous le titre « Endecha en los bosques ». Le manuscrit donne d’abord le texte anglais, accompagné de la mention « George Meredith » corrigée en « Jorge Meredith », puis le texte espagnol, suivi de « Versión de Julio F. Cortázar. » Il ne s’agit pas de l’écriture de Cortázar, et nous ignorons la provenance de ce texte. Il nous est donc impossible de dater la production de cette traduction, même si le « F. » de « Julio F. Cortázar » nous rappelle les années 40. A cette période, il ne signe plus « Julio Denis », mais utilise l’initiale de son deuxième prénom, afin, sans doute, de se démarquer du nom de son père. D’autre part, l’habitude d’hispaniser les prénoms des auteurs étrangers, comme c’était le cas dans Leoplán, nous fait également penser aux années 40. Toutefois, il ne s’agit en aucun cas d’une datation certaine, car le transcripteur peut parfaitement avoir utilisé ces marques à des fins comiques, par exemple comme un clin d’œil à Cortázar.

Contentons-nous de reproduire ces textes ci-dessous :

‘Dirge in woods.
A wind sways the pines
And below
Not a breath of wild air ;
Still as the mosses that glow
On the flooring and over the lines
Of the roots here and there.
The pine-tree drops its dead ;
They are quiet, as under the sea.
Overhead, overhead
Rushes life in a race,
As the clouds the clouds chase ;
And we go,
And we drop like the fruits of the tree,
Ever we,
Even so.
Voici la traduction de Cortázar :

Endecha en los bosques
Un viento avasalla los pinos,
y debajo
ni un aliento de desatado aire ;
calmo como los musgos que lucen
sobre el suelo y sobre los nervios
de las raíces dispersas.
El pino deja caer sus muertos ;
quietos como bajo el mar.
Y por encima, encima,
se precipita la vida en una carrera
mientras las nubes persiguen las nubes.
Y marchamos
Y caemos como los frutos del árbol.
También nosotros
También así.’

Nous avons choisi de ne pas analyser en profondeur les traductions de l’anglais dans ce travail, d’autant plus que nous ignorons tout de la métrique anglaise. Contentons-nous donc de noter que la version proposée par Cortázar fait montre d’un évident travail rythmique et qu’elle semble se tenir très près de la lettre de l’original, sauf pour un cas : « el pino deja caer sus muertos ; / quietos como bajo el mar. » Cette forme ressemble bien, là encore, à une trouvaille de Cortázar, à une des pépites que l’écrivain place dans sa traduction. L’image nous paraît très belle, plus forte aussi que dans l’original (« They are quiet, as under the sea ») par sa concision.

Notes
319.

sous la cote Julio Cortázar papers (C0888), Box 2, folder 41. Recherches menées à distance, via Internet.