4 - L’analyse du milieu à l’aide du SIG : une synthèse

Le croisement d’informations humaines et naturelles sera réalisé dans un premier temps à l’échelle régionale, afin de dégager des grandes phases de l’occupation humaine en fonction de la ressource et de mettre l’accent sur l’importance des facteurs humains et historiques dans l’évolution de l’occupation. Mais l’analyse appellera à être complétée, dans un troisième temps, par une étude intégrée du milieu à l’échelle locale sur trois secteurs représentatifs de la région. Cette analyse répond à la nécessité de mettre en évidence le rôle fondamental des facteurs édaphiques 31 dans l’évolution du milieu. Elle permet non seulement de dégager les disparités des potentiels agricoles des sols, mais surtout de mettre l’accent sur certaines zones dans lesquelles le croisement des données naturelles et humaines peut être visualisé avec précision et fournir des renseignements sur les comportements humains au cours des temps.

Le choix d’une étude à l’échelle locale s’inspire à la fois de la méthode d’analyse morpho-pédologique élaborée par J. Tricart (1994), des travaux réalisés par J.-F. Berger et al. (1997) et de la notion de territoire d’exploitation du site développée par C. Vita-Finzi et E.S. Higgs (1970) (voir aussi Revel 1991). La première a pour but la définition des espaces plus ou moins favorables à la mise en valeur agricole en fonction des données géomorphologiques et pédologiques. La seconde se concentre sur une étude à très grande échelle afin de déterminer, dans le détail, des phases paléogéographiques reposant sur l’étude combinée des processus morphologiques et pédologiques. Enfin, la troisième consiste à définir une zone d’exploitation autour d’un site d’occupation, zone dans laquelle l’occupant est censé trouver les ressources dont il a besoin pour vivre. Cet espace se caractérise par une superposition de micro-milieux naturels au potentiel agricole variable. Les diverses ressources mises en évidence dans cette zone peuvent fournir des informations sur le mode de vie des occupants. L’objectif est de comprendre comment évolue et s’organise l’occupation en fonction de la ressource disponible dans l’environnement naturel immédiat.

Dans ce but, un outil adapté à la confrontation des données de nature multiple sera utilisé : le Système d’Information Géographique (SIG) 32 . Le recours à un tel outil est particulièrement approprié à une étude géoarchéologique 33 . Le SIG permet en effet la mise en relation de données spatialisées géoréférencées (localisées dans l’espace avec des coordonnées géographiques) et de données attributaires (ou thématiques) caractérisant ces données spatiales. Une base de données spatiales et thématiques sera donc créée, permettant un certain nombre d’analyses spatiales afin de répondre à des questions portant sur la compréhension du milieu dans sa globalité. Cette base de données synthétisera l’ensemble des informations (humaines et naturelles) dégagées au cours de ce travail et permettra de les mettre en relation afin de mettre en évidence les conditions de l’occupation du sol dans la région du lac Jabbûl.

La méthode d’analyse spatiale s’organise alors autour de trois fonctions principales des SIG : l’analyse de surface, la classification et le croisement d’informations spatialisées. Ces différentes fonctions sont au service d’une analyse reposant sur la mise en relation d’informations, qu’elles soient humaines (sites d’occupation, aménagements agricoles) ou naturelles (sol, géologie, topographie, géomorphologie…). L’analyse se fonde tout d’abord sur la détermination des potentiels agronomiques des sols dans chaque secteur et sur le rôle des facteurs édaphiques dans la différenciation de ces potentiels (croisement de données et classification). L’influence du modelé sur le potentiel agricole des sols sera également mis en évidence, par la réalisation d’un Modèle Numérique de Terrain 34 (MNT) (analyse de surface). Le MNT permet en effet, en interpolant le relief, de calculer les valeurs de pente et l’orientation des terrains. Une cartographie de ces potentiels agronomiques sera ensuite réalisée à l’échelle des secteurs, puis croisée avec la présence humaine, afin d’envisager leur impact sur l’organisation de l’occupation humaine en fonction des modes de mise en valeur (croisement et superposition de données).

Notes
31.

« Les facteurs édaphiques sont ceux qui dépendent des propriétés du sol et des roches mères sous-jacentes à l’égard des êtres vivants fixés » (George et Verger 1996).

32.

Un SIG peut être défini comme un ensemble de pièces d’équipement, de logiciels et de procédures pour permettre l’acquisition, le stockage, l’analyse et la visualisation de données spatiales, dans le but de répondre à des questionnements environnementaux complexes. Cette définition précise et vague à la fois peut être synthétisée en une définition plus simple répondant à notre problématique : un SIG est un ensemble d’outils informatiques utilisés pour résoudre des problèmes de type spatiaux à partir de données multiples stockées dans une base.

33.

Pour P. Gentelle (Encyclopédie de géographie, 1995), « la voie actuelle la plus prometteuse dans les relations entre archéologie et géographie est celle des Systèmes d’Information Géographique. (...) Ils sont la base sur laquelle vont s’effectuer les reconstructions logiques des sociétés du passé et de leur fonctionnement » .

34.

Représentation numérique des variations continues du relief.