D - Une hydrologie avant tout souterraine

Une situation naturelle marquée par l’absence de cours d’eau pérennes

En dehors des cours d’eau allogènes (Euphrate, Nil), les régions arides sont très rarement pourvues d’écoulements permanents du fait de l’insuffisance des précipitations. Les seuls cours d’eau pérennes sont généralement alimentés par des sources localisées dans des zones de piémont. Ces cours d’eau aboutissent le plus souvent dans des zones marécageuses ou des dépressions salées. C’est le cas du Qoueik, rivière d’Alep, qui se perd dans les anciens marais du Mateh (aujourd’hui assainis), ou du Nahr ad-Dahab qui, lorsqu’il coulait encore, terminait sa course dans le Jabbûl. Dans cette région, les conditions pédologiques (perméabilité des sols), l’aridité du climat (évaporation) et la présence d’une dépression endoréique expliquent également, d’une part la difficulté qu’ont les cours d’eau de petit débit à s’extraire de la région, et d’autre part l’inorganisation actuelle du réseau hydrographique. Celui-ci se limite souvent à des cours d’eau peu hiérarchisés, alimentés saisonnièrement par les précipitations. Aujourd’hui le seul cours d’eau pérenne naturel attesté dans la région n’existe plus (le Nahr ad-Dahab) et seuls plusieurs anciens cours d’eau, transformés en canaux d’irrigation et d’évacuation du trop plein de l’eau d’irrigation de la région de Meskéné, fonctionnent toute l’année (en particulier le Wadi Abû al-Ghor, au sud-est de la région).

Mais la ressource hydrique existe aussi sous forme de réserve souterraine. Dans la région, les nappes phréatiques du nord et de l’ouest du lac Jabbûl, alimentées respectivement par les écoulements sur le piémont du Taurus au nord du lac, plus arrosé que le reste de la région, et par le château d’eau que constitue le plateau du al-Has, étaient, dans un passé proche (avant les années 1950), encore bien pourvues. L’accroissement des ponctions dans les nappes, lié à l’extension de l’irrigation dans les années 1940-1950 et à la sécheresse prononcée de la fin des années 1950, ont transformé la région telle que nous la connaissons aujourd’hui. Le Nahr ad-Dahab s’est progressivement asséché 74 et, surtout, les réserves souterraines du pourtour du lac Jabbûl ont été polluées par la nappe salée du lac Jabbûl (la berge nord du lac a été moins touchée par ce phénomène en raison de l’absence de mise en culture à proximité immédiate du lac et de l’apport d’eau d’irrigation en provenance de l’Euphrate).

Notes
74.

En ce qui concerne le Nahr ad-Dahab, dont les sources se trouvent aux alentours de la ville d’Al-Bâb, au nord du lac, c’est également les ponctions de cette ville pour l’irrigation de ses jardins, qui expliquent l’assèchement de la rivière plus en aval, à la hauteur du lac Jabbûl.