E - Des sols très influencés par la lithologie

1 - Un espace naturel mis en valeur par l’homme

C’est à la suite des travaux de Dokoutchaiev (1846-1903) en Russie qu’on a commencé à envisager le sol d’un point de vue global, systémique, comme un milieu à part entière. Les définitions qu’on a pu en donner ensuite ont toujours pris en compte les multiples éléments qui le constituent (en oubliant souvent, par contre, le rôle de l’Homme). G. Gaucher (1968, p. 48) propose une définition simple qui tient compte, implicitement, de l’Homme en tant qu’exploitant agricole. D’après l’auteur, ‘«’ ‘ le sol est la couche supérieure de la croûte terrestre (lithosphère) qui évolue sous l’effet des phénomènes de décomposition superficielle des roches et dont le degré d’ameublissement ou de fragmentation permet l’implantation des végétaux ’ ‘»’. Ce sont les derniers mots de cette définition qui, rappelant les conditions nécessaires à l’apparition des végétaux, donnent indirectement sa place à l’Homme.

Sur cette base, il est nécessaire d’évoquer les conditions d’élaboration du sol. Celui-ci forme un milieu constituant une interface entre l’atmosphère, la lithosphère, la biosphère, l’hydrosphère et l’Homme. Les quatre premiers éléments sont les composants nécessaires à la fabrication du sol, processus subordonné aux activités biologiques animales et végétales. Ainsi, le sol n’existe pas là où il n’y a pas ou très peu de vie, c’est-à-dire dans les régions très arides ou très froides. Cependant la proposition affirmant que ‘«’ ‘ plus une région est aride et moins on y trouvera de sol ’ ‘»’ est à nuancer, en gardant à l’esprit, comme l’étude du climat l’a montré, que les héritages morphopédologiques influencent également fortement la qualité locale des sols, en étant à l’origine d’une grande variation de l’aridité édaphique. Ainsi les fonds de cuvettes bien drainées ou les larges secteurs de convergence d’écoulements (faydas 85 ) également bien drainés, dans les zones très sèches, constituent des enclaves dont l’exploitation agricole et en particulier la mise en culture est possible. Il s’agit bien d’enclaves dans un ensemble régional souvent constitué de glacis recouverts d’une fine couverture colluviale caillouteuse, qui ne se prêtent pas à la culture.

Le quatrième élément, l’Homme, est capable d’accélérer ou de ralentir, voire de modifier complètement les modalités de l’évolution morphodynamique du sol. Il participe notamment à son érosion sur certaines surfaces en raison de pratiques agricoles mal adaptées (labours perpendiculaires au versant, arrachage de la végétation pérenne qui maintient le sol structuré, là où l’aridité est forte…). Ce type de pratiques peut engendrer, à l’inverse, une accumulation de sédiments fins dans les fonds de vallées, ce qui contribue à la constitution du sol. Les dégâts sur les sols sont parfois causés par des pratiques agricoles mal maîtrisées, sensées pourtant améliorer les conditions de production agricole. C’est le cas notamment du risque de salinisation des sols en cas d’irrigation avec mauvais drainage (planche 1, photo C). Le rôle de l’Homme sur le sol est donc fondamental dans les espaces fragiles du fait de l’aridité : c’est le cas dans la région étudiée.

Notes
85.

Terme local désignant des évasements de fonds de vallées profitant de sols d’apports, profonds, humidifiés par les eaux de ruissellement et d’inféroflux, localisés soit à la confluence des oueds soit sur des replats structuraux (Geyer 1999).