E - Depuis 5000 BP : des données fragmentaires

Les variations climatiques ayant eu un impact sur le milieu à l’Holocène récent sont plus difficiles à percevoir. On sait que ces variations peuvent se manifester par des modifications locales du milieu naturel, par exemple le creusement ou l’alluvionnement d’une vallée. Mais à partir de 5000 BP, l’action de l’Homme, en particulier dans des régions fragiles de marges arides, semble également avoir un impact plus franc sur le milieu naturel 109 . La date de 5000 BP correspond au début d’un accroissement démographique important et d’une organisation centralisée (grands empires, centres urbains) de l’occupation humaine. L’accroissement démographique entraîne des besoins plus importants et une exploitation agricole plus intense. Dans ce contexte, on doit garder à l’esprit que l’action de l’Homme sur l’environnement naturel se fait sentir de plus en plus fortement, en particulier dans les secteurs de marges arides. Cette action peut se traduire notamment, en cas de mise en valeur agricole mal maîtrisée, par une érosion des sols, suivie d’un alluvionnement en fond de vallée. P. Sanlaville (1996) va jusqu’à parler de crise « climato-anthropique » pour qualifier la dégradation du milieu engendrée par la pression humaine sur un environnement naturel fragilisé par l’aridité. Ainsi, un grand nombre de terrasses plus récentes (des époques hellénistiques et romaines) observées sur tout le pourtour méditerranéen, semblent avoir pour origine, en grande partie, l’action humaine. Il est donc difficile, plus on s’avance vers la période actuelle, de faire la part du rôle des facteurs naturels et des facteurs humains dans les transformations du milieu. L’impact des activités humaines sur le milieu s’accentue, tandis que les changements climatiques sont beaucoup moins prononcés (donc leur impact sur le milieu moins fort) que lors de la transition Pléistocène/Holocène (Sanlaville 1996). L’évolution morphologique doit donc être envisagée non plus simplement au point de vue du seul milieu naturel, mais davantage dans une perspective globale, celle du géosystème.

On verra, dans les paragraphes suivants, que les données paléogéographiques témoignent d’une évolution du milieu et de l’existence de phases morphologiques distinctes. On essaiera donc, dans la mesure du possible, de mettre en évidence les rôles partagés des facteurs humains et naturels dans leur constitution.

Notes
109.

Cette limite temporelle du début de l’impact humain sur l’environnement naturel n’est qu’indicative. Elle traduit une tendance générale de l’évolution du milieu. Certains auteurs font remonter l’impact des activités humaines sur le milieu naturel bien avant (dès le Néolithique), notamment au Levant sud (voir par exemple I. Köhler-Rollefson et G.O. Rollefson 1990).