2 - Depuis 1900 BC : une difficile perception des modifications du milieu naturel

Si le climat actuel s’est probablement stabilisé dès 5000 BP, avec peut-être un bref retour de l’aridité vers 3800 BP, certains indices montrent que le milieu a continué malgré tout à évoluer.

À partir de la fin du Bronze moyen il semble que les cours d’eau connaissent une modification de leur dynamique. Celle-ci a été relevée notamment dans la vallée de l’Euphrate (Geyer et Sanlaville 1991, Geyer et Besançon 1997) où, après une tendance à l’incision à partir de la période Halaf, une terrasse alluviale se met en place, datée par la céramique de la fin du Bronze moyen ou du Bronze récent. Une formation équivalente a été également relevée dans le Wadi Membij (Besançon et Sanlaville 1985). Parallèlement, dans de nombreuses régions, le nombre de sites diminue au Bronze récent. Le tableau suivant montre cette importante diminution (d’après B. Geyer 1999 a et G. M. Schwartz et al. 2000).

Tableau 3 - Nombre de sites par période en Syrie du Nord et sur l’Euphrate
  Uruk Bronze Ancien Bronze moyen Bronze Récent 1er âge
du Fer
Bas Euphrate syrien
(Monchambert, à paraître)
6 11
(2)
21
(6)
10
(3)
20
(5)
Sajour
(Sanlaville éd. 1985)
?
( ?)
10 27 1
( ?)
1
Haut Euphrate syrien
(Sanlaville éd. 1985)
?
( ?)
10 10 3 4
Moyen Khabur
(Monchambert 1984)
4
(1)
17
(5)
8
(9)
4
(2)
19
(9)
Qoueiq
(Matthers éd. 1981)
?
( ?)
43 35 17 30
Marges arides
(Geyer comm. pers.)
0
(2)
193 96 5 71 (ensemble
du Fer)
Nord Jabbûl
Schwartz et al. 2000.
0 47 33 11 34 (ensemble du Fer)
Ouest, est et sud Jabbûl
Données personnelles.
0 7
(7)
0
(1)
0 0
Entre parenthèses, identifications incertaines.

Le changement de dynamique des cours d’eau traduit-il uniquement un événement climatique ou a-t-il également pour origine les effets de l’activité humaine ? Il est fort possible qu’on soit, là encore, face à un phénomène double faisant intervenir le facteur humain (migration des populations, laissant les sols sans protection) et naturel (péjoration climatique). Mais une éventuelle péjoration climatique n’est pas prouvée et encore moins datée pour cette période dans la région.

Par ailleurs, dans le cas de l’Euphrate, la terrasse, composée de sédiments fins en majorité (sable, limons) (Geyer et Sanlaville 1991), ne s’explique pas nécessairement par une sécheresse plus prononcée. Ce type de terrasse se met également en place dans des conditions d’humidité suffisamment importantes pour qu’un écoulement continu soit possible, rythmé par des crues. Plus qu’abondantes, il est nécessaire que les pluies soient bien réparties au cours de l’année. La formation de la terrasse peut s’expliquer, pour partie, par l’abandon des zones de cultures. Celles-ci, n’étant pas immédiatement reconquises par la végétation, seraient alors fortement érodées par le ruissellement. Mais cet abandon ne s’explique pas nécessairement, là aussi, par le possible accroissement de l’aridité. En effet, le cours d’eau le long duquel ces populations sont localisées est pérenne. Un retour de l’aridité n’aurait donc pas forcément provoqué de migrations. Si migration il y a eu, elle a pour origine plus probablement des faits humains et, en particulier, l’instabilité politique et les guerres.

L’évolution du milieu à partir du premier millénaire avant J.-C. est encore plus difficile à évaluer en raison de l’influence grandissante du facteur humain. Il existe cependant quelques données qui témoignent de changements climatiques.

En Mésopotamie, J. Neumann et S. Parpola (1987) relèvent, dans les textes de l’époque, la mention de fréquentes sécheresses, de famines et de troubles sociaux. Selon ces auteurs, ces événements sont à associer à une période d’hivers secs et doux entre 1200 BC et 900 BC. J. Neuman (1991) considère même que la première moitié du premier millénaire avant J.-C. est marquée par un refroidissement et peut-être une baisse des précipitations dans le nord du Proche-Orient. Or il semble bien qu’un refroidissement s’observe ailleurs en Méditerranée ainsi qu’en Europe occidentale jusque vers 350 BC. Par contre cette phase paraît avoir été légèrement plus humide. Cet épisode froid a notamment été relevé dans l’arrière pays de Montélimar entre 700 BC - 600 BC et 300 avant J.-C. (Berger 1995). Certains auteurs (Ortalami et Pagliuca 1998) perçoivent même un « petit âge glaciaire archaïque » dans l’aire méditerranéenne entre 520 BC et 350 BC. Enfin, le refroidissement noté en Mésopotamie septentrionale pourrait être en partie à l’origine de l’abaissement progressif du niveau marin dans le golfe persique qui atteint son point le plus bas à l’époque hellénistique (- 1 m) (Sanlaville 1989, Geyer et Sanlaville 1996).

En Italie, R. Neboit (1984, 1991) note également une dynamique de dépôt se traduisant par l’établissement d’une puissante terrasse au cours du premier millénaire avant J.-C. Celle-ci est comparable à celle établie durant l’Holocène moyen, mais, d’après l’auteur, elle s’est constituée dix fois plus vite. Elle serait donc le résultat d’une morphogenèse très vive et très active provoquée par l’intense mise en valeur agricole (en particulier le défrichement) au début de la colonisation grecque, accompagnée peut-être par une légère évolution climatique. Cette dernière ne se traduirait pas nécessairement par une augmentation des précipitations. D’après R. Neboit (1991) il est fort probable qu’une simple modification de la répartition saisonnière des pluies ait participé à l’érosion qui a conduit à l’édification de la terrasse. D’après lui, les écosystèmes méditerranéens dégradés auraient perdu leur capacité à amortir les effets d’un tel changement. Or suivant les saisons durant lesquelles elles tombent, les pluies méditerranéennes induisent des comportements morphologiques du ruissellement différents. Ainsi, les pluies de fin d’été et d’automne tombant sur un sol asséché favorisent l’érosion et le transport de particules. Ce n’est pas le cas à la fin de l’hiver où les pluies plus fines et durables se chargent moins. R. Neboit (ibid.) suppose donc qu’une simple variation de l’intensité des pluies selon les saisons expliquerait les différentes dynamiques morphogénétiques, dépôt pour les pluies d’été et d’automne, creusement pour les pluies d’hiver et de printemps. Cette hypothèse participe de la difficulté de perception et de prise en compte des éventuelles modifications climatiques au cours du premier millénaire avant J.-C. et ensuite 110 .

Les périodes suivantes, hellénistique, romaine et le début de l’époque byzantine, connaissent, au Proche-Orient et dans toutes les régions méditerranéennes, un « optimum climatique » qui se serait traduit avant tout par un accroissement des précipitations. Dans la région levantine, des indices suggèrent une augmentation de la pluviosité. Ainsi, des limons organiques témoignant d’une phase plus humide, datés de 1860 ± 70 BP et de 1930 ± 30 BP, sont observés dans la région de Palmyre (Besançon et al. 1997). Par ailleurs, U. Rösner et F. Schäbitz (1991) notent également cet événement, qui se traduit en haute Jézireh par le développement de sols et l’augmentation du pollen d’arbres. Dans le Levant sud la remontée du niveau de la Mer Morte (- 400 m vers 190 BC et - 330 m vers 30 BC) traduit également cette tendance à l’accroissement des précipitations. D’après H.J. Bruins (1994) qui reprend la courbe des niveaux de la Mer Morte établie par A. Frumkin (Frumkin et al. 1991, 1994), cette période humide atteint son maximum vers 90 AD. Ajoutons qu’en Turquie, à proximité de la côte sud, à 100 km à l’est de Rhodes, C. Le Roy (1984) décrit un sanctuaire (celui de Xanthos) qui subit, à partir du 3e siècle AD, une montée de la nappe phréatique locale et un alluvionnement corrélatif.

Dans la région méditerranéenne, l’accroissement de la pluviométrie se serait traduit, à partir du premier siècle après J.-C., par une augmentation du nombre de sites et une intensification de la mise en valeur (voir par exemple Berger 1995). Dans la région du lac Jabbûl et au sud de celle-ci, l’occupation sédentaire progresse dans des zones aujourd’hui trop sèches pour être mises en culture. Le nombre de sites atteint un maximum à l’époque byzantine où l’occupation sédentaire est attestée très loin vers l’est. Si le lien de causalité avec l’augmentation supposée des précipitations est fort probable, il ne faut pas négliger non plus le rôle des conditions édaphiques qui, comme l’ont bien montré les recherches sur les « Marges arides » de la Syrie du Nord, ont été capitales pour la conquête des terres dans la steppe aride (voir Geyer et Rousset 2001, Geyer 1999 a, Jaubert et al. 1999, Geyer 1998 et Geyer et al. 1998).

Les époques hellénistique, romaine et byzantine s’accompagnent, dans tout le bassin méditerranéen, de l’établissement de terrasses alluviales. Quelques exemples montrent la récurrence de ces formations dont l’origine est diverse. J.-L. Ballais (1984) décrit une terrasse dans les Aurès, en Algérie, qui fait suite à la colonisation romaine. R. Neboit (1991), en Italie et en Sicile, décrit une terrasse dont la présence est généralisée et dont l’établissement débuterait au cours de la colonisation grecque et s’achèverait au début de l’aire chrétienne (sans plus de précision pour la date, mais il signale que l’incision postérieure débuterait au haut Moyen Âge). Toujours en Italie, H. Brückner (1990) a relevé une terrasse datée de l’époque classique, entre le IVe siècle BC et le Ve siècle AD. Selon lui cette terrasse est d’origine humaine et doit être associée aux grandes campagnes de déforestation et à la surexploitation des sols. En Espagne une terrasse se serait établie entre le VIIe siècle BC et l’époque romaine (van Zuidam 1975). J.-J. Dufaure (1976) a également décrit une terrasse à Olympie, datée entre le VIIIe et le XVe siècle AD. En Syrie une terrasse « romano-byzantine » est avérée, par exemple dans la vallée du Sajour (Besançon et Sanlaville 1985). Les origines de la constitution de ces terrasses sont à rechercher, pour certains, dans la forte pression humaine entraînant des défrichements, une colonisation d’espaces fragiles et provoquant une rupture d’équilibre conduisant un alluvionnement en fond de vallée (Ballais ibid., Brückner ibid.), phénomène qui a pu être associé à des dérèglement climatiques (Neboit ibid.). Pour d’autres c’est plutôt le départ des populations (phénomène de déprise) qui aurait été à l’origine de ces dépôts (Dufaure ibid.). Mises en place dans des milieux parfois différents, toutes ces terrasses n’ont pas forcément le même sens partout et à toutes les époques, sachant par ailleurs que l’évolution socio-économique varie selon les lieux où ces terrasses ont été relevées. Mais elles témoignent cependant d’une réelle morphogenèse, très complexe, durant ces périodes, à laquelle les hommes semblent clairement participer 111 .

Il semble que la fin de la période byzantine, au Proche-Orient, et plus précisément le VIe siècle, connaisse une situation de crise 112 dont la cause est probablement climatique et qui s’exprime de plusieurs manières. B. Geyer (1999 b, 2002) suppose qu’elle aurait pour origine un refroidissement du climat jusqu’au IXe siècle (Ortolani et Pagliucia 1998 parlent, pour l’aire méditerranéenne, d’un ‘«’ ‘ petit âge glaciaire du haut Moyen Âge ’ ‘»’ pour la période allant de 500 AD à 750 AD). Cette péjoration climatique se serait traduite, en Syrie aride, par une instabilité accrue du climat dont le résultat aurait été une baisse de la productivité agricole. Cet événement climatique a été inscrit dans des chroniques de cette période en Syrie du Nord, qui mentionnent notamment des disettes dues à de mauvaises récoltes (Tate 1992). Dans ce contexte difficile, marqué également par une surpopulation, se serait propagée la peste du VIe siècle, provoquant un fort accroissement de la mortalité. Il semble qu’alors, en Bythinie mais peut-être ailleurs, une phase d’érosion ait suivit, en particulier dans les espaces marginaux instables abandonnés par les agriculteurs et qu’une terrasse se soit ensuite édifiée en raison de la persistance de l’humidité dans une ambiance froide (Geyer ibid.).

Cette période de morphogenèse est suivie par un « petit optimum » médiéval qui serait ‘«’ ‘ parfaitement signalé par les textes comme par les glaciers du Groenland et des Alpes ’ ‘»’ (Le Roy Ladurie 1983, t. II p 124). Cet optimum serait caractérisé, en Europe occidentale, par un climat comparable à celui de la première moitié du XXe siècle et se serait maintenu entre 800 AD et 1200 AD. Il semble que cette courte période de stabilité favorable à la mise en valeur agricole soit également observée en Grèce et placée entre 1000 et 1300 (Ortolani et Pagliuca 1998).

Le changement climatique majeur qui intervient par la suite est ce que l’on appelle le « Petit âge glaciaire ». Il se traduit par un retour du froid vers le XVIe siècle et persiste, avec des phases de réchauffement, jusqu’au XIXe siècle (de 1560 à 1850 d’après E. Le Roy Ladurie 1983). Ce refroidissement est mis en évidence dans les Alpes par une forte avancée des glaciers. Cette phase froide a sans doute participé à la formation de terrasses très récentes, dans la mesure où le refroidissement se serait traduit par une plus grande fréquence des étés pourris et des hivers froids ; des pluies d’été trop fréquentes, tombant sous forme d’averses, auraient engendré une érosion des sols. Par ailleurs, ce refroidissement a eu pour conséquence, d’un point de vue humain, l’appauvrissement des populations et l’apparition de famines.

En Italie (dans la vallée de Feccia, en Toscane), G. O. Hunt et D. D. Gilbertson (1994) notent la présence d’une terrasse postérieure au XVIe siècle. Mais, selon ces auteurs, sa mise en place est plutôt d’origine humaine que naturelle. Une des causes principales serait à rechercher dans les défrichements qui suivirent l’intense exploitation des terres et son expansion au XVIe siècle. Cependant, le rôle des hommes est sans doute à associer, dans cette région et à cette époque, avec celui de la nature, dans la mesure où le « petit âge glaciaire » affecte également la région. La dynamique morphogénétique pourrait donc s’expliquer, à cette époque, par la conjonction de deux phénomènes, les défrichements et le dérèglement du climat. C’est l’avis de B. Geyer (1999 b, 2002) qui a observé deux terrasses en Bithynie, l’une datée entre le XIVe-XVe siècle, et l’autre datée du XVIIe siècle au plus tard. Ces terrasses seraient dues avant tout à des facteurs humains et secondairement au facteur climatique. La première se serait mise en place au cours d’une nouvelle phase de crise, au XIVe-XVe siècle, crise qui aurait pour origine plusieurs facteurs, dont la peste récurrente du XIVe siècle. La peste toucha une population nombreuse qui exploitait une vaste étendue de terrains fragilisés par une longue exploitation combinée à un refroidissement climatique postérieur au petit optimum évoqué précédemment. La régression démographique et l’abandon des terres marginales provoqua une crise morphogénique marquée par une déprise des sols et le dépôt de la terrasse. Pour E. Le Roy Ladurie (1983) cette crise, qui est également une réalité en Europe occidentale, serait aussi avant tout d’origine humaine, les catastrophes de la fin du Moyen Âge (la peste et la guerre de Cent ans) l’expliquant par elles-mêmes. D’après lui, si refroidissement il y a eu, celui-ci n’a ajouté qu’une « causalité bien secondaire » (ibid. p. 124). Cette analyse est celle d’un historien, mais les données naturelles très partielles ne semblent pas le contredire. Notons que H. Brückner (1991) décrit également une terrasse datée du XIVe-XVe siècle, en Italie du Sud, qui résulterait, selon lui, de facteurs humains, en particulier de l’intense réexploitation des terres au Moyen Âge après une longue pause.

La seconde terrasse observée par B. Geyer se serait mise en place au XVIe-XVIIe siècle, au moment où les effets du « Petit âge glaciaire » se faisaient sentir plus fortement. Dans ce cas, l’influence de la composante naturelle, en particulier les dérèglements climatiques évoqués plus haut, a probablement été très forte dans l’établissement de la terrasse. Cependant, les conséquences de la réduction des espaces cultivés a également contribué à cette morphogenèse, en raison d’une régénération trop partielle de la végétation.

Lors du passage à l’Holocène récent, le climat n’est pas complètement identique à l’actuel, mais les conditions d’évolution du milieu sont fondamentalement les mêmes qu’aujourd’hui ; elles se caractérisent par le poids des composantes statiques du climat, à l’origine de la fragilité intrinsèque du milieu naturel et par le rôle de plus en plus déterminant des hommes. La synthèse qui précède a mis l’accent sur la difficulté de faire la part entre les facteurs humains et naturels dans l’évolution du milieu naturel pour la période récente. Elle a également mis en lumière la complexité et l’imbrication de ces facteurs. Les sociétés humaines sont passées d’une certaine passivité dans leur rapport au milieu naturel (avant la sédentarisation l’Homme consomme mais ne transforme pas), à une capacité de transformation (raisonnée ou non) de cet environnement naturel. Dans ce cadre, la notion d’évolution « climato-anthropique » proposée par P. Sanlaville (1996) nous semble pertinente (même si elle ne peut probablement pas s’appliquer partout au même moment en raison des conditions socio-économiques et naturelles différentes).

Cette description des principaux épisodes morphoclimatiques témoigne de l’évolution permanente du contexte environnemental à l’Holocène. Les phases morphoclimatiques n’ont probablement pas été marquées avec autant d’intensité dans tout le bassin méditerranée. Dans la région du lac Jabbûl, nous verrons que certains épisodes sont difficiles à mettre en évidence. La raison première est à rechercher dans certaines composantes du milieu naturel et notamment le caractère statique du climat, qui ne favorise pas la morphogenèse ou la pédogenèse. Dans ce cas, les changements temporaires du climat ont probablement été ressentis dans la région, mais ne se sont pas forcément traduits par des transformations durables du paysage. En revanche, les principales phases morphoclimatiques et, en particulier, celle de l’Optimum climatique holocène et celle de l’optimum climatique de l’âge classique ont été relevées dans la région. Les témoignages morphologiques et sédimentaires qu’elles ont laissés constituent, aujourd’hui, le contexte naturel de la mise en valeur agricole.

Notes
110.

D’autant plus que pour cet auteur (1991) « les derniers millénaires, a fortiori les derniers siècles, n’ont [...] pas subi de détériorations graves du climat, génératrices de crises majeures ; ils n’ont enregistré que des fluctuations modestes, inaptes à entraîner des modifications appréciables de la dynamique des versants ». Le rôle fondamental de la répartition des pluies dans l’année et de l’impact d’une simple altération du régime des pluies est donc fondamentale. Elle est également mise en avant dans l’analyse de la phase majeure d’alluvionnement qui touche le bassin méditerranéen au premier millénaire avant et après notre ère (voir plus bas) (voir notamment J.-J. Duffaure (éd.) 1984, p. 331-351 et B. Geyer 2002, p. 43-44)

111.

Notons cependant que, selon L. Wengler (1994), l’Homme n’est pas en cause dans l’édification de certaines terrasses holocènes du Maroc (en particulier la dernière datée entre 3500 et 2000 BP). Dans les secteurs qu’il a étudiés, la présence humaine était très faible et le fait de nomades. Il en déduit donc une origine avant tout climatique pour ces formations. Il existerait donc des terrasses d’origine climatique dans le millénaire précédent notre ère, ce qui signifie que, dans les secteurs de forte pression humaine, c’est bien la conjonction de l’activité humaine et du dérèglement climatique qui ont provoqué la formation de ces terrasses. Pour une analyse de ces différentes terrasses en Méditerranée et leur relation avec les sociétés, voir le très intéressant, même si déjà ancien, hommage à P. Birot : La mobilité des paysages méditerranéens (Duffaure éd. 1984).

112.

Au sens de P. George et F. Verger (1996) : « rupture de rythme ou renversement de tendance dans une évolution (…). D’une manière générale, on admet que toute évolution comporte une alternance de période de stabilité ou d’évolution lente et des phases d’accélération ou de rupture d’équilibre qui constituent les crises ».