Chapitre I - Les modes d’occupation : des marges arides au lac Jabbûl

Introduction : l’occupation de la steppe

La steppe syrienne, cet espace de transition entre le désert et les zones semi-arides, appartient au Croissant fertile. C'est dans cet espace qu’est apparu, pour partie, l'agriculture au Proche-Orient et où se concentrait sinon ‘«’ ‘ presque toute la population humaine ’ ‘»’ (Cauvin 1993), du moins une forte proportion des hommes présents dans la région. À cette époque (IXe-VIIIe millénaire av. J.-C.) point de différenciation ni d'opposition entre agriculteurs sédentaire et pasteurs nomades car, dans cette région, le pasteur n'existe pas encore. C'est un peu plus tard (VIIe millénaire av. J.-C.) que des groupes de pasteurs nomades commencent à occuper la steppe aride puis le désert. En effet, d’après J. Dresch (1982), c'est le nomadisme pastoral qui a permis l'occupation des déserts tropicaux de l'hémisphère nord. Dès lors, la zone de marge désertique va être le lieu du contact, du croisement, de la cohabitation des agriculteurs sédentaires et des pasteurs nomades ou semi-nomades. Petit à petit un espace particulier s’individualise dont la dynamique historique ne réside peut-être pas dans l'opposition, mais plutôt dans la complémentarité des deux cultures.

La distinction entre les nomades et les sédentaires réside partiellement dans le mode d’occupation et de mise en valeur des sols. Les nomades sont des éleveurs migrant périodiquement et pratiquant souvent une culture d’appoint, tandis que les sédentaires sont des cultivateurs mais qui pratiquent fréquemment l’élevage en plus de la culture. La région étudiée, dans la steppe syrienne, est concernée par ces deux modes de vie. Cet espace a connu, plus que d’autres, les allées et venues de ces populations, dans un contexte de cohabitation ou parfois dans un contexte d’opposition et d’affrontement. Le contact permanent entre ces deux populations a pu être à l’origine de l’évolution des formes d’occupation du sol et de pratiques agricoles se traduisant notamment par l’association entre la sédentarisation et le nomadisme (d’où l’importance des semi-nomades dans la région). Il s’avère nécessaire de caractériser ces modes de vie qui se traduisent par une exploitation du sol spécifique. Leur description et leur mise en perspective constitueront l’objet des chapitres suivants.