B - L’Homme et l’eau

1 - L’eau, une ressource fondamentale

Les ressources hydriques utilisables par les hommes ont pour origine les précipitations et l’hydrologie souterraine. Rappelons ici les caractéristiques principales de la réserve hydrique dans la région du lac Jabbûl. Cette région est centrée sur une dépression salée. Cette configuration est à la fois un handicap et un avantage pour l’Homme. Handicap parce que la nappe d’eau salée localisée sous le lac peut être préjudiciable, si elle prend trop d’ampleur, aux nappes d’eau douce contiguës ; avantage parce que cette situation fait converger en un même point tous les écoulements locaux. Il se forme donc des réserves d’eau qui ne sont pas étrangères à la densité de l’occupation humaine dans la région au cours de l’histoire.

On a vu 132 quelles étaient les caractéristiques climatiques de la région du lac Jabbûl : l’aridité et la « méditerranéité ». Les précipitations se situent entre 200 mm et 300 mm en moyenne par an. Elles connaissent une grande irrégularité interannuelle et inter-mensuelle. Elles se caractérisent spatialement par leur diminution d’ouest en est et du nord au sud. Les précipitations sont donc faibles et ne participent que partiellement à l’alimentation de la réserve hydrique.

Il a été montré par ailleurs, dans la première partie de ce travail 133 , que les principales réserves hydriques souterraines (même après l’abaissement des nappes des 50 dernières années) se localisent au nord, à l’ouest et au sud (principalement dans le couloir de Monbatah) du lac Jabbûl. Cette répartition est conditionnée par des apports d’eau souterrains plus importants au nord (en provenance de régions plus arrosées situées sur le piémont du Taurus) et sur les piémonts des plateaux (en provenance de la nappe des plateaux). Vers l’est et le sud-est, en revanche, les réserves sont de moindre importance, en raison de l’absence de relief de commandement pouvant fournir un apport hydrique plus régulier que les seules précipitations. Par ailleurs, la qualité de l’eau est faible, en raison de la présence de sels dans le substrat (sulfates de calcium et chlorure de sodium), ce que traduit la rareté des puits.

Mais c’est surtout sur le pourtour du lac et au sud que la salinisation des nappes progresse plus qu’ailleurs. C’est la nappe salée du lac Jabbûl qui fournit l’essentiel de l’apport en chlorure de sodium. Une étude de l’ICARDA (1998) portant sur le couloir de Monbatah a montré très clairement cette salinisation progressive. La nocivité du chlorure de sodium pour les sols et la culture s’illustre aussi bien de manière immédiate, par chute rapide des rendements dans un sol salé, qu’à long terme pour la production agricole, puisque au-delà d’un certain seuil de salinité les sols sont improductifs.

Dans le sud-est de la région, les bassins versants du Wadi Abû al-Ghor et de l’oued situé à l’est de la Sebkha Rasm ar-Ruam rappellent que cet espace a connu, autrefois, une activité hydrographique non négligeable. Elle s’est traduite par des écoulements de surface qui ont pu être importants dans le passé, ce dont témoigne la hiérarchisation du réseau. Aujourd’hui, l’écoulement de surface est très sporadique, mais il existe encore, comme en témoigne, par exemple, la réutilisation des citernes anciennes localisées dans le fond des oueds (citernes qui furent prises pour des puits par les cartographes syriens). Il existe également un écoulement d’inféroflux qui concerne aujourd’hui le Wadi Abû al-Ghor et ses différents affluents. L’humidité produite par cet écoulement semble relativement important dans certains de ces affluents, notamment ceux de la rive gauche de l’oued, dont l’image satellitaire nous révèle la densité de la végétation naturelle au printemps (figure 13).

Notes
132.

Se reporter à la première partie, chapitre I, C.

133.

Se reporter à la première partie, chapitre I, D.