B - L’intégration du facteur temps : analyse et simulation

Dans un SIG fondé sur l’analyse des conditions de l’occupation sur une longue période, l’intégration du facteur temps est nécessaire. Reste à savoir de quelle manière cette intégration doit être faite. Une série d’articles récents a détaillé les différentes formalisations du temps et les conditions de la prise en compte du temps dans les SIG 220 .

Le temps peut être perçu comme un flux mesurable et quantifiable sur une échelle d’intervalle. Il s’agit d’une vision chronologique fondée sur la mesure du temps avec une granularité (jours, mois, années) adaptée aux analyses. Dans ces conditions, les informations doivent être précises. Le temps peut également être appréhendé par la succession des événements, ce qui permet de déterminer des séquences sur une échelle ordinale. C’est cet ordre qui définit la temporalité (Thériault et Claramunt 1999).

Ces deux perceptions du temps sont intégrées dans le SIG. La première est adaptée aux phases archéologique et historique de l’occupation humaine voire aux éventuelles datations 14C intégrées dans l’analyse ; la seconde à des événements particuliers ayant affecté un intervalle de temps sans que des limites précises puissent être déterminées, mais qui peut être situé de manière relative (il en va ainsi par exemple de l’optimum climatique de l’époque classique).

Le temps est intégré dans le SIG dans le but de prendre en compte les changements, l’évolution ou encore les transformations qui affectent les entités géographiques. Il y a donc unification de l’espace et du temps. S. Lardon et al. (1999) proposent une formalisation relativement simple des changements spatio-temporels. Pour ces auteurs, l’entité spatiale est une abstraction de trois composantes, l’identification (associée à la création de l’entité), l’extension spatiale et les caractéristiques thématiques (c’est-à-dire les caractéristiques non spatialisées de l’entité). Ainsi, on peut représenter une entité spatiale comme une extension spatiale qui possède une identification possédant elle-même des caractéristiques thématiques.

Les trois composantes de l’entité spatiale sont affectées par le temps et peuvent être modifiées. Les changements affectant les caractéristiques thématiques correspondent à la notion de vie de l’entité (évolution d’une entité entre sa naissance et sa mort). Les changements affectant l’extension spatiale d’une entité traduisent le mouvement de l’entité sans modifier son existence et ses caractéristiques thématiques. Enfin, les changements concernant l’identification de l’entité constitue sa généalogie : division, regroupement, naissance, mort…

L’intégration du temps dans le SIG s’est faite selon les deux méthodes évoquées plus haut. La première est fondée sur l’utilisation du temps absolu, c’est-à-dire mesuré sur une échelle d’intervalles. Le temps affecte les entités géographiques et il est possible de situer les changements de manière relativement précise à la fois dans le temps et dans l’espace. Cette analyse temporelle est réalisée essentiellement sur les sites d’occupation humaine en en évaluant la vie (exemple : un site d’une période est occupé lors de la période suivante), le mouvement (exemple : extension de la surface d’un site) ou la généalogie (exemple : disparition ou apparition d’un site).

La seconde méthode consiste à modéliser l’impact d’un événement précis, à savoir l’optimum climatique de l’âge classique sur les entités géographiques naturelles (précisément les sols et l’intensité de l’aridité édaphique). Dans ce cas, le temps est envisagé comme une succession d’événements. Le changement des entités géographiques est, là aussi, de trois types : il affecte la vie (exemple : un type de sol devient un autre type de sol), le mouvement (exemple : l’extension de la surface d’un type de sol) et la généalogie (exemple : un type de sol disparaît).

Les sites d’occupation de l’époque romano-byzantine ont été superposés aux cartes produites afin d’évaluer l’impact de ces changements sur l’organisation de l’occupation humaine. Le temps continu est donc intégré à cette analyse reposant sur le temps événementiel sans que l’analyse soit faussée puisque l’on sait que l’événement ‘«’ ‘ optimum climatique de l’âge classique ’ ‘»’ a affecté l’époque romano-byzantine.

Notes
220.

Voir Cassini 1999 ; voir aussi les réflexions récentes menées dans le cadre de rencontres scientifiques sur l’intégration du temps et de l’espace, leur quantification, dans la géographie, (modélisation, gestion des systèmes spatiaux). Citons entre autres M. Le Berre dir. (2001), M. Barrué-Pastor et G. Bertrand éds. (2000).