A - La carte du potentiel des sols

Toutes les analyses sont fondées en partie sur la classification des sols à partir de l’image satellitaire, classification qui repose elle-même sur les connaissances de terrain. Ces analyses ont été ensuite affinées par leur croisement avec les données pédologiques, géomorphologiques, topographiques et géologiques résultant d’une étude de terrain et de données existantes corrigées sur le terrain. Il en résulte que l’analyse du potentiel des sols repose en grande partie sur la réalité des conditions naturelles actuelles, étudiées sur le terrain avec la plus grande rigueur. La validité de cette analyse semble donc pouvoir être défendue par le fondement scientifique sur lequel elle repose. Une objection portant sur la temporalité mérite d’être soulevée : la cartographie du potentiel des sols a été réalisée pour la période actuelle, alors qu’elle est superposée à des sites de périodes anciennes. Comme cela a déjà été montré, cette région n’a subi ni changements climatiques fondamentaux ni phase majeure d’érosion au cours de la période étudiée. Cette apparente stabilité du milieu naturel sur le long terme est donc un des éléments qui nous permettent de construire une carte modèle des potentiels des sols, transposable à différentes époques antérieures. Rappelons néanmoins que l’évolution récente du milieu, depuis les années 1950, a considérablement accéléré la dégradation des sols. L’image actuelle doit donc être nuancée en permanence par la prise en compte des évolutions les plus récentes.

L’interprétation du potentiel peut par ailleurs être critiquée, en particulier le nombre de classes choisi (quatre). Nous avons cherché à dégager des grands ensembles spatiaux et à mettre en valeur les qualités fondamentales des sols : leur adaptation à la mise en culture et le type de culture possible. C’est pourquoi il ne nous a pas paru nécessaire de définir davantage de classes. Mais le nombre de quatre répond surtout à une réalité du terrain : les conditions naturelles locales n’engendrent pas une grande variété de sols. Les sols sont en effet directement dépendants du substrat, du contexte climatique et de l’humidité. Or le climat conserve des caractères statiques (caractère méditerranéen, grande aridité, températures élevées) peu favorables à la pédogenèse, dans l’ensemble de la région, tandis que le substrat est peu varié (essentiellement calcaire, basaltique, gypseux et alluvial) et que l’humidité édaphique est faible, en raison du climat et de la faiblesse des réserves (écoulements de surface, inféroflux ou nappes phréatiques). C’est ainsi que les quelques éléments fondamentaux intervenant dans la qualité des sols de la région sont aisément mis en lumière et confrontés à la classification des sols opérée à l’aide de l’image satellitaire. Le potentiel agricole des sols peut alors être déduit, à l’aide des critères suivants : la disponibilité en eau, les fonds de vallées, la texture limono-argileuse, la présence d’argile, le substrat basaltique accroissent le potentiel agricole d’un sol tandis qu’un substrat gypseux, la faible disponibilité en eau, l’absence d’argile, la présence de sables en forte quantité, le substrat (croûte calcaire ou roche calcaire) subaffleurant, le réduisent.

Le résultat de cette analyse est présenté par les cartes des secteurs étudiés qui forment une part importante de la superficie totale de la région du lac Jabbûl (30 %). Par ailleurs, ces secteurs témoignent des conditions naturelles variées qui caractérisent la région, ce qui renforce la validité du résultat. Il en résulte une cartographie synthétique et sensée des conditions de la mise en valeur agricole et donc de l’occupation humaine dans la région. Le nombre limité de classes nous paraît justifié au regard du but recherché : dégager les grandes unités morphopédologiques caractérisées par des potentiels de mise en valeur agricole spécifiques.