Le rôle de l’aridité édaphique dans les modes d’exploitation du sol : l’apport du SIG

Une étude au plan local a donc été nécessaire pour analyser plus avant le rôle des facteurs édaphiques dans l’organisation de l’occupation et dans la variation des modes de mise en valeur agricole. Dans cette optique, l’étude s’est concentrée sur trois secteurs représentatifs de la région et s’est fondée sur la mise en place d’un Système d’Information Géographique (SIG). Outre le fait que l’utilisation de cette technique, dans le cadre d’une étude de géoarchéologie, constitue une relative nouveauté en Syrie, son application a permis de vérifier l’efficacité d’une méthode et de sa reproductibilité. L’intérêt de l’approche hyperlocalisée pour l’étude des géosystèmes dans la région du lac Jabbûl et, plus généralement, dans les secteurs de marges arides, dans le cadre d’une étude géoarchéologique a, nous l’espérons, été démontrée. Seule une telle approche nous a permis de mettre en évidence l’importance des contrastes locaux au point de vue de la ressource agricole.

La méthode utilisée a déjà été testée ailleurs et nous l’avions nous-même expérimentée précédemment dans le cadre d’une étude de géographie physique. Rappelons qu’elle se fonde sur l’utilisation d’un SIG orienté image (IDRISI) et sur une série de fonctions proposées par ce logiciel : l’analyse de surface, la classification et le croisement d’informations spatialisées. Il s’agit, à terme, de croiser différentes couches de données, de pondérer les résultats des superpositions en fonction de la nature des données et de produire une nouvelle couche d’information. Cette méthode s’est révélée efficace dans le cadre de l’étude géoarchéologique en permettant la superpositions de données naturelles et humaines.

L’analyse du potentiel agricole des sols a montré que le rôle joué par les micro-milieux naturels, dans un contexte de mise en valeur agricole, était déterminé par l’intensité de l’aridité édaphique. Ainsi ont été dégagés différents ensembles homogènes au sein des secteurs étudiés. Il s’agit principalement des vallées, des glacis à couverture limoneuse, des glacis à couverture caillouteuse, des glacis à substrat subaffleurant ou affleurant, des versants des plateaux, du sommet des plateaux et des dépôts alluviaux gypseux. Chacun de ces ensembles est plus ou moins adapté à la mise en valeur agricole en fonction de l’aridité édaphique qui le caractérise. Il en résulte, et c’est là le fait essentiel, que sous réserve de bien connaître le milieu naturel on peut partiellement s’abstraire des déterminants liés à la composante statique du climat (l’aridité), dans le cadre d’une mise en valeur agricole. En d’autres termes, dans des secteurs où la faible pluviométrie interdit a priori la culture pluviale, celle-ci reste cependant possible dans des micro-milieux naturels dont les sols garantissent une humidité suffisante pour le développement des cultures. Le rôle joué par l’exposition dans l’aménagement agricole des versants à l’époque romano-byzantine témoigne de l’importance des conditions locales : les analyses de surface opérées par le SIG ont permis de montrer que les terrasses de culture étaient situées en majorité sur des versants exposés vers l’ouest et le nord et surtout évitaient presque systématiquement les versants est. La raison en est le risque que font courir les vents d’est très secs sur les plantations.