Université Lumière Lyon 2
Ecole doctorale : Sciences Humaines et Sociales
Faculté d'Anthropologie et de Sociologie
Le récit généalogique. Conditions et enjeux d'une production
Le cas du récit bourgeois lyonnais aux XIXè et XXè siècles
Thèse de doctorat de Sociologie et anthropologie
Dirigée par Yves GRAFMEYER
Présentée et soutenue publiquement le 24 octobre 2003
Devant un jury composé de :
Isabelle BERTAUX-WIAME, Chargée de recherche au CNRS
Anne GOTMAN, Directrice de recherche au CNRS
Yves GRAFMEYER, Professeur à l'Université Lyon 2
Yves LEQUIN, Professeur émérite à l'Université Lyon 2
Martine SEGALEN, Professeur à l'Université Paris 10-Nanterre

à Gaëlle
à Lauriane
à Pierre

“L'âge d'or fut le premier âge de la création. En l'absence de tout justicier, spontanément, sans loi, la bonne foi et l'honnêteté y étaient pratiquées. Le châtiment et la crainte étaient ignorés (…) ; c'était l'âge où coulaient des fleuves de lait, des fleuves de nectar, où le miel blond, goutte à goutte, tombait de la verte yeuse.”
Ovide

Remerciements

Je n'aurais pas pu mener au bout cette thèse sans l'aide précieuse de personnes que je tiens ici à remercier.

Mes remerciements vont tout d'abord à Yves Grafmeyer qui m'a accompagnée tout au long de ma recherche, m'accueillant toujours spontanément et promptement lorsque je souhaitais le rencontrer pour lui faire part de l'état de mes travaux, pour lui demander son avis et pour l'interroger suite à mes questionnements, gardant patience et confiance durant tout ce temps et me conseillant avec compétence et délicatesse, ce qui m'a permis de me sentir rassurée autant que faire se peut et guidée, mais non sans autonomie, jusqu'à aboutir.

Je remercie également Bernard Bensoussan qui m'a amenée à découvrir toute la pertinence de la sociologie dans la compréhension des phénomènes humains, avec passion, éthique et profondeur, qui m'a montré toute l'importance et l'intérêt d'une méthodologie très étudiée et qui m'a apporté ses conseils avisés à la suite de sa lecture de l'ensemble du travail.

Je remercie Denise Le Loup, vice-recteur de l'Université catholique de Lyon, Pierre Gire, directeur du département de la Recherche, et Christian Harzo et Bernard Husson doyens successifs de la faculté de droit, de sciences économiques et sociales, pour la confiance qu'ils m'ont faite dans mon cheminement vers l'issue de cette thèse.

Je remercie tout particulièrement mes filles, Gaëlle et Lauriane qui m'ont soutenue tout au long de ces années, autant par leur aide domestique intelligente et continue des débuts que par leurs relectures pertinentes des chapitres de la fin. Sans leur disponibilité et leur compréhension, cette thèse n'aurait pas pu se faire.

Je remercie de même Pierre Nonne qui m'a porté la confiance nécessaire m'ayant permis de mettre un point final à cette thèse, qui m'a écoutée attentivement dans mes questions théoriques et techniques et a compris mes besoins de disponibilité pour écrire, et qui m'a encouragée et a trouvé du temps masqué pour relire, soulever des incompréhensions, proposer des solutions.

Je dois beaucoup à Anne-Marie Duparc qui a relu l'ensemble de cette thèse avec détermination et grande générosité jusqu'au bout, m'indiquant avec méthode et prévenance les corrections nécessaires. A Evelyne Honoré qui a relu de nombreux chapitres, avec toute l'exigence tranquillisante de sa compétence d'éditrice. A Gabriella Comte qui a consulté attentivement mes premiers écrits. A Yane Golay qui a effectué toute la mise en page et traité les modifications techniques, apportant une cohérence à l'ensemble du travail d'écriture. La connaissance de sa compétence et de son efficacité m'a été un réconfort tout au long de mon travail. Sa présence fut une assurance précieuse pour croire dans l'aboutissement.

Je remercie Wihelmina Konig-Scappaticci, Simone et Emmanuel Dozon, et Edith Noguier qui m'ont poussée à avancer toujours. Je remercie mes amis qui ont bien voulu supporter mon indisponibilité durant de longues périodes. Ils ont rendu possible la continuité et la réalisation de mon travail.

Sans la confiance spontanée, la disponibilité sur le long terme, la compréhension et l'accueil chaleureux des membres des familles qui m'ont ouvert leurs archives, et m'ont guidée dans le recueil de mes données, jamais ce travail n'aurait vu le jour. Je les remercie chacun. Je souhaite que les analyses qui ont été mises au jour grâce à eux ne leur procureront pas de sentiments d'incompréhension et que même, ils pourront y trouver des points de vue qui les intéresseront. Je dois plus particulièrement à Daniel Phélip qui m'a transmis largement et aimablement, tout au long de ces années, ses connaissances et ses analyses concernant l'histoire du milieu de la bourgeoisie lyonnaise.

Enfin, je réserve une pensée particulière à mon entourage familial qui m'a encouragée du début jusqu'à la fin, chacun avec sa particularité et sa compétence, ne perdant pas espoir qu'une fin advienne à l'ouvrage. Je remercie particulièrement mes parents qui m'ont offert à de maintes reprises un cadre sans pareil pour écrire, hors des dérangements et des contraintes, et qui ont échangé avec moi et relu. Je remercie aussi Michèle Rodet qui a pris part à l'étude sémiotique de deux récits généalogiques et Eliane Brac de la Perrière qui m'a incitée à avancer à toutes les étapes de mon itinéraire.

Résumé

Cette thèse montre les conditions et les enjeux qui ont amené à écrire des récits généalogiques, dans des familles appartenant à une bourgeoisie ancienne urbaine (Lyon), aux XIXe et XXe siècles, en France. Elle vise à mieux cerner les déterminants de l'émergence d'une conscience généalogique de soi chez un individu, dans une famille et dans un milieu social. Elle souhaite contribuer à une meilleure connaissance des fonctions de la mémoire familiale dans les processus de structuration et de stabilisation identitaires. Une analyse microsociologique de onze familles de généalogistes amateurs, considérées sur plusieurs générations, et une analyse des contenus de plus de mille pages de leurs récits généalogiques ont permis de déterminer que tout individu n'était pas appelé à écrire un récit généalogique.

Nos résultats mettent en lumière que l'écriture généalogique, dans un tel milieu social, concerne prioritairement les paternels. En effet, les généalogistes sont des acteurs ayant subi un effacement de la mémoire de cette branche, à cause de l'alliance hétérogame de leur parents, leur mère étant de condition supérieure à leur père. Ils appartiennent à une branche cadette de ces paternels, une branche particulièrement appelée à tenir compte de la mobilité. Enfin, ils ont hérité d'une bonne position sociale acquise dans leur élite locale, mais se sont trouvés exposés au risque de la perdre, à cause d'un discrédit porté sur cette branche et de leur déclassement relatif. Avec leur récit généalogique, ils veulent redonner de la continuité à la mémoire de ces paternels, leur rendre un devoir de mémoire, restaurer leur légitimité et transmettre des moyens d'anticiper sur ces risques à leurs descendants. Ils désirent transmettre une tradition de cette branche à l'adresse de ces derniers, pour qu'ils changent de perspective sur leur passé familial, à savoir ne plus voir en lui un modèle mythique à reproduire pour s'identifier, mais un héritage de leurs ancêtres constituant un précédent, à partir duquel ils pourront résister aux tensions sociologiques touchant leur famille, se situer individuellement pour décider de leurs choix identitaires et socialiser leurs enfants au plus près de leurs codes, étant donné leurs contextes. La généalogie répond aux besoins de familles appartenant à une élite. Sa démocratisation s'effectue par le transfert de ses cadres, des maternels aux paternels des généalogistes.

Mots-clés

Généalogie, famille, mémoire familiale, héritage familial, récit, bourgeoisie, élite, sociologie, anthropologie, ascension sociale, stabilité, mobilité, trajectoire, socialisation anticipatrice, devoir de mémoire, dette, légitimation, mythe, tradition.