3 – 1. Les supports

Les récits que nous avons consultés et étudiés peuvent se trouver dans des recueils reliés de plusieurs centaines de pages, mais aussi bien être faits de quatre ou cinq feuilles volantes photocopiées ; ils peuvent être des manuscrits ou encore des textes dactylographiés ou imprimés. Ils peuvent avoir la finition d'un ouvrage très informé avec des cartes, des plans, des tableaux, une iconographie en couleur, mais aussi la configuration d'une simple transcription de récit oral, sans fioritures, photocopié rapidement à l'attention de membres de la famille intéressés par sa teneur. Et entre les deux, on peut trouver des copies anciennes de récits écrits enserrées dans une reliure de cuir épais ou encore des photocopies volantes glissées dans une chemise, celles-ci pouvant avoir été exécutées dans de mauvaises conditions au vu de certains tracés peu lisibles, ou alors des cahiers d'école. Enfin, on peut observer plusieurs variantes de supports pour un seul récit. Examinons les supports des récits de notre corpus de référence.

  •  Récit 1 : Nous avons trouvé ce récit sur deux supports imprimés : une première impression en 1924 et une seconde en 1979. Le premier recueil se présente avec une couverture de cuir épais et sombre ; les 94 pages qu'il a, sont de fort grammage et jaunies. Nous en avons vu un exemplaire chez un petit-fils de l'auteur, dans l'Ain, et un autre chez un petit-neveu, dans le Rhône. Le second recueil est sur un support de demi-format et contient le même nombre de pages. Il a été imprimé chez le même imprimeur, 55 ans après. Sa couverture est de carton claire et souple. Nous avons consulté cette version chez les mêmes informateurs ; ils possèdent donc les récits sous les deux formes.
  •  Récit 2 : Ce récit nous a été présenté, glissé dans une chemise. Nous l'avons consulté chez l'un de nos informateurs à Lyon 2e. Ce sont 117 photocopies dactylographiées et paginées à la main. Il n'y a pas de couverture. La seule date indicatrice de l'époque de sa production, est celle de l'adresse : 1941. Ces photocopies ont été faites en 1992, à partir d'un exemplaire appartenant à une cousine maternelle de notre informateur. Cette cousine avait fait elle-même son exemplaire en photocopiant une copie ancienne appartenant à une cousine de sa mère. En effet, il existe deux autres supports pour ce même texte : l'un désigné par les membres de la famille comme “l'original” et l'autre comme “les copies”. Nous avons examiné trois exemplaires des “copies” (58 pages), l'un chez deux petites-nièces de l'auteur, à Lyon 6e, et les deux autres chez un petit-fils, à Lyon 6e aussi. Ils ont la forme d'un ouvrage. Mais, il s'agit de feuillets découpés à la taille d'un livre et tenus serrés ensemble par une reliure de cuir épais noir. L'impression est extrêmement pâle, pour l'une des copies. Nous avons consulté “l'original” chez le petit-fils qui avait déjà deux“copies”. Il est manuscrit sur un cahier d'école de 90 pages, à couverture souple recouverte de papier brun. Des généalogies sont ajoutées, pliées et collées sur les dernières pages. Ayant pendant longtemps pu consulter seulement un exemplaire composé de photocopies volantes, nous l'avons choisi pour composer notre corpus.
  • Récit 3 : La première fois que nous avons fait connaissance avec ce récit, c'était chez son auteur, à Lyon 2e. Il s'agissait de photocopies dactylographiées parce qu'il était en cours de correction. Les fautes de frappe et de français étaient soulignées. Le travail s'était arrêté là depuis plusieurs mois. On était en 1992. Il y avait 142 pages sans couverture et sans date et paginées à la main. Deux années plus tard, une nouvelle version a été imprimée (1994). Elle compte 131 pages. Sa couverture est de couleur vert clair et souple. Certains énoncés ont été modifiés, mais l'ensemble du contenu est identique. Nous avons retenu cette dernière version pour faire partie de notre corpus.
  • Récit 4 : Ce récit nous a été présenté aussi sous forme de photocopies dactylographiées, rangées dans une chemise. Il a 11 pages et est daté de 1988. Son auteur – contemporain – en délivre copies à qui le désire et notre informateur en a obtenues cette même année. Il n'y a pas à proprement parlé d'original puisque le récit a été écrit sur ordinateur. Nous en avons consulté un exemplaire chez l'auteur, dans sa propriété de famille, dans le Rhône, et un autre, au domicile de notre informateur, dans la banlieue ouest lyonnaise. L'auteur est un allié de la famille dont il a raconté l'histoire. Son épouse et notre informateur descendent tous deux d'un même ancêtre par des branches différentes. La première est une arrière-petite-fille en lignée patronymique de celui-ci et le second, un arrière arrière-petit-fils, en lignée matrilinéaire.
  • Récit 5 : Ce récit est de même sous forme de copies. Il est une transcription écrite de deux communications orales effectuées lors de la fête du centenaire de la “Maison mère” de la famille, en 1945. Il a 9 pages : 4 pages pour la première communication et 5 pour la seconde. Les copies sont mauvaises. Chaque communication a son auteur. C'est la première qui renseigne sur les origines familiales. Ces photocopies se trouvaient dans les papiers de famille de la mère de notre informateur qui ne sait pas comment celle-ci les a acquises. Sans doute, pense ce dernier, les a-t-elle demandées à son frère et à son cousin, leurs auteurs, juste après qu'ils aient prononcé leurs discours !
  • Récit 6 : Ce récit a comme support un recueil relié sur format 21 x 29,7. Le texte est dactylographié, mais les tableaux généalogiques manuscrits. Sa couverture est en carton souple de couleur claire et les caractères imprimés couleur vieil or. Sa date de publication est 1971 et son nombre de pages, 187. Nous l'avons consulté chez l'auteur de notre récit 3, à Lyon 2e. Il l'avait parce qu'un descendant de l'un de ses lointains aïeuls – remontant à la septième génération – le lui avait offert. Il avait, en effet, dans sa généalogie un arrière-petit-fils de cet aïeul – un collatéral pour sa ligne directe – qui avait fait une alliance avec cette famille ; il n'y avait donc pas de lien direct avec celle-ci.

Conclusion

Nous pouvons constater que les supports de nos récits adoptent des formes fort variées. L'examen des cinq autres supports ne fait que le confirmer. En effet, nous trouvons :

  • Un recueil relié et édité en 1983, sur demi format, de 211 pages, avec une couverture beige reproduisant en fond un symbole lié au patronyme. Notre informateur l'a reçu de son père, l'auteur
  • Un recueil dactylographié relié de 149 pages réalisé en 1977 par une arrière-petite-fille de l'auteur, une fille de l'un de nos informateurs. Il a été composé à partir d'un manuscrit dactylographié par l'une des filles de l'auteur en 1938, 19 ans après le décès de celui-ci, en 1919. Il réunit cinq longues lettres dont la première est terminée en 1878 et la dernière en 1918. La couverture est cartonnée et bleue.
  • Un recueil relié et édité en 1892 de 39 pages ajoutées de généalogies, que nous avions depuis très longtemps, sans nous souvenir qui nous l'avait remis. Nous avons trouvé un informateur descendant de l'une des familles dont l'histoire était contée a posteriori. La couverture est cartonnée et souple, de couleur claire.
  • Un manuscrit de 19 pages écrit en 1986 sur des feuilles volantes consulté chez son auteur.
  • Un cahier manuscrit de 93 pages relatant les mémoires de l'auteur. Pour l'informateur chez qui nous l'avons consulté, celui-ci était une sœur de son aïeule au 7e degré. Il est daté de 1814, mais on trouve ajoutées des lettres postérieures à cette date. La couverture est toilée noire et les feuilles rayées blanches.

Ainsi, les récits généalogiques du corpus de référence que nous avons consultés dans les familles bourgeoises lyonnaises de notre échantillon peuvent se trouver dans des recueils imprimés ou édités, mais aussi sur de simples photocopies ou bien encore sur des petits cahiers. Ils sont manuscrits, dactylographiés, imprimés ou mis en page par ordinateur. On a des originaux et des copies, parfois peu lisibles, rangées ou non dans des chemises. Les supports des autres récits de notre corpus présentent la même diversité. Si nous ne retenons que ceux sur lesquels nous avons expressément travaillé, nous avons 1 petit cahier manuscrit, 1 ensemble de feuillets manuscrits, 2 recueils édités, 3 imprimés, 1 dactylographié et relié, et 3 photocopiés. Le nombre de pages va de 9 à 211. Enfin, pour un récit, on peut trouver des supports différents, selon les branches des familles, les générations et les individus, selon qu'on ait l'original ou des copies dactylographiés pour un récit ancien ou encore des photocopies faites à partir de ces derniers ou même à partir d'autres photocopies.

A la vue de ces supports, on ne peut imaginer que ces histoires des origines fassent l'objet de grande précaution dans leur conservation. Il y a là un paradoxe, lorsqu'on sait qu'elles portent en elles les signes de la légitimation de l'appartenance des familles à leur élite ! Doivent-elles ne pas avoir l'air précieux ou bien, selon les branches et les générations à travers lesquelles elles circulent, en prend-on soin très diversement ? On sait que beaucoup disparaissent.