1 – 1.4. Des descendants de cadets

Examinons le rang dans la fratrie des pères de nos auteurs (Tableau 4).

Tableau 4 : Rangs des pères des auteurs dans leur fratrie
Pères/
Rangs dans leur fratrie
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
à la naissance 2/3 3/3 4/4 2/5 2/5 5/8 5/6 10/10 ?/14 266 2/2 3/4
à l'âge adulte de la fratrie 2/2 267 2/2 4/4 2/5 2/4 5/7 4/4 7/7 4/9 2/2 3/3
à l'âge adulte des frères 2/2 2/2 2/2 1/3 2/3 2/4 2/2 2/2 4/4 268 1/1 3/3

Nous remarquons que là non plus il n'y a pas d'aînés de fratrie, ni même d'aînés des garçons, ni même de fils uniques. Tous les pères sont des cadets ou benjamins à leur rang de naissance. Deux deviennent des aînés des fils ou fils uniques à cause du décès d'aînés avant l'âge de 20 ans. 7 sont des benjamins quand tous les frères ont atteint l'âge adulte. Dans notre corpus de référence, les pères sont respectivement second de trois, dernier de trois, dernier de quatre, second de cinq, second de cinq et cinquième de huit. 1 devient l'aîné des fils. Ainsi, tous nos auteurs sont des fils de cadets ou benjamins.

Maintenant, si l'on regarde le rang des grands-pères paternels, trouverons-nous que les auteurs de récits généalogiques sont des cadets d'une lignée de cadets ? Analysons le rang dans la fratrie des grands-pères paternels des auteurs (Tableau 5).

Tableau 5 : Rangs dans la fratrie des grands-pères paternels des auteurs
Rangs dans la fratrie/Grands-pères paternels 1 2 3 269 4 270 5 271 6 7 272 8 273 9 10 11
Rang à la naissance 3/3 2/2 3/5 4/6 1/3 3/5 16/17 8/17 2/3 1/1 2/5
Rang à l'âge adulte 3/3 2/2 1/2 2/4 1/2 3/5 6/7 5/13 2/3 1/1 2/5
Rang entre les frères 3/3 1/1 1/2 1/2 Inconnu 3/3 Inconnu 1/5 2/3 1/1 2/4

Hormis un aîné et un fils unique, les grands-pères des auteurs ne sont pas des aînés de fratrie non plus. Et si l'on observe leurs rangs parmi leurs frères ayant atteint l'âge de 20 ans, on constate tout de même que 5 sur 11 sont des aînés des fils ou garçons uniques. Dans notre corpus de référence, les grands-pères paternels sont respectivement dernier de trois, dernier de deux, troisième de cinq, quatrième de six, aîné de trois et troisième de cinq. Nos auteurs sont bien, très majoritairement, des cadets (ou benjamins) d'une lignée de cadets (ou benjamins). Mais, si l'on considère seulement la fratrie de sexe masculin des ascendants, on peut seulement les définir comme des cadets fils (ou filles) de cadets.

Ainsi, les auteurs ne se trouvent pas des aînés ni n'appartiennent à des branches aînées. En quoi, une telle disposition peut-elle mobiliser vers l'écriture généalogique ? Quels enjeux découlent de cette position des auteurs dans leurs lignées patrilinéaires ? Pour faire avancer ces questions, nous avons voulu nous demander si être cadet ou encore plus le benjamin d'une fratrie ne réduisait pas le temps de fréquentation que l'on pouvait avoir entre générations de vivants ? En effet, nous nous demandions si, lorsqu'on appartenait à une lignée de cadets (ou benjamins), l'on n'avait pas moins de chance que les autres d'être imprégné de la tradition orale de la famille. Combien d'années chacun de nos auteurs ont-ils pu fréquenter leurs pères ? Et combien d'années aussi, leurs pères l'ont-ils pu avec leurs grands-pères paternels ? Et qu'en est-il de même pour la génération suivante ? Ces cadets de trois générations n'étaient-ils pas particulièrement jeunes au décès de leurs pères respectifs ? Car si tel était le cas, on pourrait supposer que l'accès à la tradition orale de la lignée paternelle ou sa simple fréquentation a plus manqué à nos auteurs qu'à leurs aînés. On pourrait faire l'hypothèse après, que leur place dans leur lignée patrilinéaire les oblige, pour connaître l'histoire de leurs ascendants, à construire celle-ci entièrement sur pièces et à partir de données rétroactivement recueillies, c'est-à-dire à partir d'écrits.

Examinons les âges qu'avaient les auteurs, leurs pères et grands-pères paternels aux décès de leurs pères respectifs. Nous comparerons l'écart de ces âges avec ceux qu'avait leur fratrie aînée alors (Tableau 6).

Tableau 6 : Ages des auteurs, de leur père et de leur grand-père paternel aux décès de leurs pères respectifs
Ages au décès des pères 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 274 moy.
des auteurs 39 30 67 37 51 33 29 19 53 41 28 36
de leur père 36 25 36 9 13 22 12 31 15 51 17 24
de leur grand- père paternel 12 39 23 20 16 54 11 20 Avant mariage 275 52 49 29,5

Tout d'abord, constatons les âges des auteurs au décès de leur père. Ils sont différents, mais 8 sur les 11 ont pu fréquenter leur père vivant jusqu'à l'âge de 30 ans. Ceci infirme déjà une partie de notre hypothèse. L'âge moyen au décès est de 36 ans, soit un âge du milieu de vie 276 . Dans notre corpus de référence, nos auteurs ont respectivement 39, 30, 67, 37, 51 et 33 ans au décès de leur père. Ainsi, la très grande majorité de nos auteurs, même s'ils sont très majoritairement des cadets (ou benjamins), ont fréquenté, jusqu'à un âge relativement avancé, leur père 277 .

Observons maintenant le temps de fréquentation entre les pères et grands-pères de nos auteurs, c'est-à-dire examinons l'âge des pères quand ils perdent leurs propres pères : seulement 4 sur 11 ont plus de 30 ans. Ils ont en moyenne 24 ans, soit une moyenne d'âge plus basse de 12 points en comparaison de la moyenne précédente. Ils ont majoritairement eu, relativement à leur fils, moins de temps pour connaître leur propre père et été moins emprunts de la mémoire orale de leur père. Mais, la variable reste-t-elle pertinente pour autant ? Car on voit, comme dans notre corpus de référence, que les âges diffèrent : ils ont 36, 25, 36, 9, 13 et 22 ans au décès de leur père. Examinons la génération encore avant.

Comme leur fils, le temps passé des grands-pères paternels avec leur propre père est restreint. 4 grands-pères seulement sur 11 aussi ont fréquenté leur père plus de 30 ans, soit une moyenne de 29,5 ans au décès de leur père. Mais, là, de même, on constate une distribution inégale. Dans notre corpus de référence, ils ont respectivement 11, 39, 23, 20, 16, 54 ans. Cependant, si l'on observe les deux générations précédant les auteurs, on remarque que dans 10 cas sur 11, au moins un des deux ascendants n'a fréquenté son père que sous les signes de l'enfance ou de la jeunesse (jusqu'à leur 25 ans). On peut bien supposer que leur chance d'être baignés par la mémoire orale de leur lignée patrilinéaire devait être réduite !

Examinons maintenant l'écart d'âge entre nos auteurs et leurs aînés respectifs, puis celui de leurs ascendants avec leurs aînés. Ont-ils un grand écart qui nous permette de penser que les seconds ont été plus avantagés que les premiers sur le plan de la transmission orale de leur mémoire patrilinéaire ? Nous avons comparé les âges des trois mêmes générations au décès de leur père avec ceux de leurs aînés de fratries et avons observé leurs écarts (Tableau 7).

Tableau 7 : Ecarts d'âges des auteurs, de leur père et de leur grand-père paternel aux décès de leurs pères respectifs avec l'aîné de leurs fratries
Ecarts d'âges au décès des pères 1 2 3 4 5 6 7 278 8 9 10 11 279
- De l'auteur avec l'aîné
- Avec le frère aîné
10
4
13
13
/
/
5
5
20
20
10
9
3
/
/ /
8
6
- Du père avec son aîné
- Avec le frère aîné
2
2
5
5
Inconnu
Inconnu
8
/
2
2
3
2
10
5
11
7
15
15
Inconnu
/
14
14
- Du grand-père de l'auteur avec son aîné
- Avec le frère aîné
12

14
8

/
/
10

/
3

3
3

3
Inconnu 10

/
Inconnu
/
3

3

Les écarts d'âge de nos auteurs et de leurs ascendants avec leurs aînés respectifs se distribuent inégalement entre 2 et 20 années. Si l'on considère notre corpus de référence, on trouve pour les auteurs, des écarts de 10, 13, 5 et 20 années avec leur aîné (les auteurs des récits 3 et 4 étant respectivement aîné et fille unique), pour leurs pères, des écarts de 2, 5, 8, 2, 3, et pour leurs grands-pères, 12, 8, 10, 3, 3. De tels résultats ne permettent donc pas de confirmer notre hypothèse. Les auteurs n'ont pas écrit parce qu'eux et leurs ascendants patrilinéaires ont accusé un plus faible écart de temps de fréquentation avec leurs pères respectifs par rapports à leurs aînés de fratries.

Pour finir, observons les temps de fréquentation entre les auteurs et leur grand-père paternel (Tableau 8). Ont-ils pu recevoir une mémoire orale directement des seconds ? Leurs aînés ont-ils eu un sort différent ? On peut observer que seulement 2 auteurs sur 11 ont connu leur grand-père paternel (ils avaient moins de 13 ans à la mort de ces derniers). Nous avons relevé depuis combien d'années ces aïeuls étaient décédés au moment où nos auteurs sont nés : entre 9 et 28 ans pour notre échantillon. 5 aïeuls sur les 9 décédés sont morts au moins 20 ans avant la naissance de nos auteurs : le temps d'une génération ! Pour notre corpus de référence, on peut constater que le grand-père paternel du premier auteur était décédé depuis 10 ans à sa naissance, celui de notre deuxième auteur, depuis 21 ans, celui de notre quatrième auteur (le troisième a connu son grand-père jusqu'à l'âge de 9 ans) depuis 9 ans, celui de notre cinquième auteur, depuis 22 ans et celui de notre sixième, depuis 25 ans. Ainsi, si l'on cherche à savoir si les aînés se trouvaient en position meilleure concernant la transmission de la mémoire paternelle, on peut déduire que non. Les décès des grands-pères paternels étaient beaucoup trop anciens pour que les écarts d'âges entre les rangs des aînés et ceux des cadets ou benjamins soient modifiés significativement. Ceux-ci n'ont donc rien eu à envier aux premiers.

Tableau 8 : Ecarts de temps (en années) entre la naissance des auteurs et le décès de leurs grands-pères paternels et maternels
Auteurs/Ecarts de temps 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Grands-pères pat. -10 -21 9 -9 -22 -25 -33 -9 -18 12 -28
Grands-pères mat. -2 14 17 21 12 16 Inconnu 12 23 5 Inconnu

Par contre, si nous comparons les âges des auteurs aux décès de leur grand-père maternel, on constate qu'au moins 8 sur 9 auteurs 280 ont pu fréquenter ce grand-père même si c'était sous les signes de l'enfance et de l'adolescence. Dans notre corpus de référence, ils l'ont côtoyé respectivement jusqu'à l'âge de 14, 17, 21, 12 et 16 ans. 1 ne l'a jamais connu, celui-ci étant décédé 2 ans avant sa naissance. Ainsi, 5 de nos auteurs ont pu fréquenter  leur grand-père maternel pendant que seulement 1 a pu côtoyer son grand-père paternel. Nos auteurs ont été très majoritairement inscrits dans une configuration telle que la transmission orale de la mémoire de leur grand-père paternel a été inexistante, et le souvenir de celui-ci nettement moins présent parce que décédé depuis longtemps, alors que la transmission de la mémoire de leur grand-père maternel a été, pour eux, une source vivante. Nous en verrons les conséquences ultérieurement. Nos auteurs sont ainsi des individus dont la mémoire des maternels a été une source vivante au contraire de celle des paternels. Mais, ils partagent cette spécificité avec leur fratrie.

Conclusion

L'analyse du rang des ascendants patrilinéaires des auteurs dans leur fratrie a révélé que nos récits n'étaient pas l'œuvre de lignées aînées en charge d'un héritage culturel et symbolique à transmettre, mais au contraire l'œuvre de lignées de cadets (ou benjamins) sans que l'on puisse montrer encore en quoi être un cadet descendant de cadets ouvre prioritairement l'accès à l'écriture généalogique. Elle a aussi fait constater que les auteurs ont trop peu coexisté avec leurs grands-pères paternels respectifs pour produire une chaîne de traditions orales vivantes, mais que, en revanche, ils étaient dans une position très différente vis-à-vis de leur grands-pères maternels qu'ils ont, en très grande majorité, côtoyés durant leur adolescence. On voit là que nos auteurs sont dans une disposition telle qu'ils cumulent les facteurs les conduisant à se souvenir prioritairement de leurs maternels et, nous l'observerons plus avant, à s'en souvenir baignés de l'aura de l'enfance, ce qui fait bien sentir le choix du concept de mémoire affective proposé par Béatrix Le Wita.

Ainsi, on peut retenir que nos auteurs ont accumulé les chances de voir s'oublier leur mémoire paternelle. En ont-ils souffert et est-ce pour cette raison, comme l'avancent les observateurs des nouvelles populations de généalogistes, qu'ils ont écrit ? Mais, leurs aînés se trouvaient dans la même situation. Alors pourquoi des cadets descendants de cadets ? Dans tous les cas, ils ont été contraints, au moment où ils ont voulu connaître et rendre compte de l'histoire de leur famille paternelle de s'appuyer sur des traces écrites, manquant de souvenirs vivants. La lutte contre le mouvement d'effacement de la mémoire patrilinéaire semble un objectif de l'écriture généalogique qui se confirme, mais la disposition du cadet appartenant à une branche de cadets pour la mener reste une question. La réponse se trouve-t-elle alors dans les caractères sociologiques des trajectoires des cadets ? En effet, on peut être amené à penser que les branches cadettes étant les plus assignées à la mobilité géographique et sociale, on y trouve la grande majorité des individus les plus engagés à écrire l'histoire généalogique de leur famille : émigration rurale, problématique d'intégration locale et ascension sociale touchent moins les branches aînées qui sont vouées à la stabilité. On peut aussi concevoir, à titre d'hypothèse, que les généalogistes réagissent au poids de représentations sociales de leur contexte, tendant à affilier leur branche cadette à leurs maternels, comme dans la mentalité de la famille souche des Pyrénées au XXe siècle. La lignée cadette y était considérée comme une lignée bâtarde, dit Antoinette Fauve-Chamoux. Ses racines étaient féminines : le plus souvent, sa maison était désignée par le prénom de l'épouse du cadet fondateur de celle-ci 281 . Ce point de vue rejoindra nos conclusions sur l'importance du poids des maternels dans l'histoire des généalogistes.

Notes
266.

. L'auteur du recueil signale que son grand-père a eu 14 enfants et qu'il en a “conservé neuf”.

267.

. Le troisième garçon décède à l'âge de 13 ans.

268.

. Le père de l'auteur est bien un 4e garçon, mais son frère immédiatement avant lui est parti aux USA et n'a plus donné de nouvelles. L'auteur ne l'a jamais connu. Les 2 frères précédant le père ont eu une postérité.

269.

. Les 3 aînés de la fratrie décèdent en bas âge, laissant le grand-père paternel de l'auteur, aîné de 2 garçons, tous deux ayant eu une postérité.

270.

. 1 sœur aînée meurt à la naissance et 1 frère aîné à 6 ans.

271.

. Cet aïeul semble bien être un aîné de trois. On ne connaît pas le cycle de vie de son frère cadet. Sa sœur vit jusqu'à plus de 60 ans. Le rang à l'âge adulte est donc au moins 1/2, peut-être 1/3.

272.

. 7 enfants meurent avant l'âge adulte, le grand-père paternel de l'auteur restant l'avant-dernier enfant.

273.

. 4 enfants meurent dans cette fratrie ; 2 plus grands que l'aïeul de l'auteur et 2 plus petits. Mais le décès de 2 n'a pu être daté.

274.

. Nous ne connaissons pas exactement la date de naissance de cet(te) auteur. Après recoupements, nous pouvons la penser née en 1754.

275.

. On ne connaît pas l'histoire de la jeunesse du grand-père paternel de cette famille ni celle du père de ce grand-père.

276.

. Au vu de la variabilité des âges et de la taille limitée de notre échantillon, prendre en compte une moyenne n'a pas grande signification. Mais, nous en avons quand même fait usage pour évaluer la relativité des faits, c'est-à-dire pour témoigner d'un écart entre les âges des auteurs au décès de leurs pères, et ceux de leurs pères et grands-pères paternels au décès de leurs pères respectifs. C'est l'amplitude de cet écart qui nous importera et non les moyennes en tant que telles. L'époque à laquelle les auteurs ont vécu ne paraît pas avoir influé sur ce temps de fréquentation : que les auteurs soient nés à un siècle ou à un autre ne paraît pas créer de différences.

277.

. Nous avons examiné les rangs des mères de nos auteurs dans leur fratrie. Nous cherchions à savoir si elles étaient, elles, plutôt des aînées. Dans un tel cas, nous pouvions faire l'hypothèse que les auteurs se trouvaient dans une configuration généalogique spécifique entraînant une fréquentation plus élevée de leurs maternels et de la mémoire de ceux-ci. Nous avons relevé les âges des auteurs et de leurs ascendants patrilinéaires aux décès de leurs mères respectives, pour nous assurer des temps de fréquentation pour chaque génération et chaque lignée de nos auteurs. Cette hypothèse n'est pas confirmée. Ce n'est pas le rang des mères dans leur fratrie qui leur donne plus de poids dans la balance des mémoires affectives de leurs enfants. La lignée patrilinéaire n'a pas souffert non plus d'une perte de mémoire plus grande sous l'effet d'un temps de fréquentation plus élevé des grands-mères paternelles.

278.

. Les âges de la fratrie du père de cet auteur sont le résultat de recoupements et pas totalement assurés.

279.

. Nous ne connaissons pas exactement la date de naissance de cet(te) auteur. Après recoupements, nous pouvons la penser née en 1754.

280.

. Les informations manquent pour 2 de ces grands-pères.

281.

. FAUVE-CHAMOUX Antoinette (1994), “Mariages sauvages contre mariages-souches : la guerre des cadets” in Les cadets, sous la dir. de Martine Segalen et Georges Ravis-Giordani, p. 188.