La ‘naissance’ de la FMN : le recours aux méthodes de l’Économie industrielle

Si, au niveau thématique, l’émergence de l’étude de l’acteur de l’IDE, c’est-à-dire la firme multinationale, supposait l’émergence d’une Économie industrielle internationale, au niveau méthodologique, l’analyse des stratégies des FMN relève davantage de l’Économie industrielle, comme le reconnaissait P. Krugman il y a exactement vingt ans :

‘At the root of conventional models in international trade is the assumption of perfect competition; but any theory of the multinational firm must come to grips with imperfect competition. As Hymer and Kindleberger pointed out long ago, direct foreign investment must be a response to market failure. (Krugman [1983], p. 57)’

C’est un diagnostic que partage également M. Rainelli :

‘En fait, il est sans doute plus pertinent de concevoir, dans la lignée de la conception de l’économie industrielle internationale présentée par Krugman, les théories des FM comme des applications des analyses développées par l’économie industrielle. (Rainelli [1996], p. 7)’

Ainsi, la véritable ‘naissance’ de la théorie des FMN remonte aux années 1960 (Rainelli [1996], p. 7) avec, en particulier, la thèse de S. Hymer –dont la publication (posthume) n’interviendra qu’en 1976 (Hymer [1960])‑ à laquelle fait référence P. Krugman dans la citation précédente. Cette contribution originale présentait deux axes de recherche essentiels : l’analyse des ‘avantages monopolistiques’ qui, par nature, ne peuvent être exploités sur des marchés étrangers que par le biais d’une présence directe de la firme, c’est-à-dire par le biais de l’IDE ; et l’analyse de l’implantation à l’étranger comme le moyen, pour une firme, de s’affranchir de la concurrence oligopolistique prévalant sur son marché domestique.

À la suite de S. Hymer, la méthodologie relevant de l’Économie industrielle supplantera ainsi celle de l’Économie internationale, comme l’illustre le passage suivant de Rugman [1975], dont l’auteur constituera un des chefs de file de la théorie transactionnelle de la FMN, théorie dominante de la firme multinationale :

‘[D]irect investment can be better explained by the theory of industrial organization rather than by trade theory. According to this approach direct investment is motivated by market imperfections which permit the multinational firm to exploit in foreign markets a monopoly advantage which it has acquired in its domestic environment. (p. 568 )’