Les références médiatiques

Non seulement les références médiatiques abondent dans les quatre discours qui forment notre corpus - ce qui ne constitue pas en soi une surprise, si l’on tient compte de la qualité professionnelle de nos interlocuteurs et de la définition de notre objet d’étude qui guide l’organisation de nos entretiens - mais elles débordent largement les références politiques évoquées plus haut au point de suggérer, à la lecture des résultats avancés avec l’aide du logiciel ALCESTE, un effacement des références politiques par les références médiatiques. Le discours sur l’Europe serait, d’une certaine façon, absorbé par le discours sur les pratiques professionnelles. Cette hypothèse mérite d’être examinée et discutée. D’ores et déjà, elle appelle une première remarque : quel que soit le mode d’appréhension des discours tenus par les professionnels rencontrés, les représentations de l’Europe qui affleurent renvoient à la fois à un espace socioprofessionnel et à un espace géopolitique. Culture professionnelle et culture politique sont ici étroitement imbriquées : nos interlocuteurs parlent de l’Europe en parlant de leur métier.

Le chevauchement de ces deux “ mondes lexicaux ” 399 , au sens où l’entend Max Reinert, le concepteur d’ALCESTE, constitue la première caractéristique de notre corpus. Mais si parler de la télévision européenne revient à parler de l’Europe, parler de la télévision cubaine y conduit également. A travers la médiation qu’elle opère, la télévision réfère à l’espace social et politique dans lequel elle s’insère. A Cuba comme en Europe. Or nous avons constaté que dans le discours de nos interlocuteurs, les références à Cuba s’inscrivent « en creux » par rapport aux références à l’Europe.

Voilà pourquoi, loin d’occulter ou d’engloutir les références politiques, les références médiatiques nous y ramènent.

Notes
399.

Par “ monde lexical ”, Max Reinert entend “ la trace lexicale d’un “ référent ” ou “ point de vue ” particulier utilisé par l’énonciateur pour construire ses énoncés ”. Indépendamment de la signification particulière de la phrase, la liste des lemmes qui parsèment l’énoncé convoque chez le lecteur un certain “ espace mental ”, un certain “ lieu ” de la pensée ou “ point de vue ” à partir duquel l’énoncé prend sens. Le concepteur d’Alceste se propose de “ mettre en évidence, à travers l’analyse d’un corpus particulier, ces “ lieux usuels ” investis par les énonciateurs. Max Reinert, “ Les mondes lexicaux ”, Séminaire d’enseignement, op.cit.