4.2.1. Evolution des théories sur la mémoire

D’après les premières théories behavioristes (Watson, 1924 notamment), se souvenir est une fonction de type Stimulus-Réponse qui acquiert du poids grâce au renforcement. Cependant, cette approche fondée sur ce qui est directement observable dans le comportement de l’individu ne révèle rien sur le traitement de l’information. En revanche, les théories cognitives cherchent à identifier comment l’individu transforme l’information entre le stimulus et la réponse (Broadbent, 1958). Des auteurs comme F. Craik et R. Lockhart (1972) insistent sur le fait que le sens (facteurs sémantiques) joue un rôle important dans le souvenir. G. Miller (1956), en particulier, suggère que l’information est organisée en « chunks » autrement dit en catégories ou encore en réceptacles d’items stockésen tant qu’unités.

L’idée que la mémoire est en perpétuelle reconstruction active de la connaissance existante est amenée par J. Bruner. En fait, ces thématiques sur la mémoire ont été réactualisées sous l’impulsion de la psychologie cognitive et de la neuropsychologie à partir des années 1960.

Certaines théories de la mémoire se sont intéressées à la nature du processus mnésique. A. Paivio (Denis, 1979) suggère un schème duel qui code l’information verbale et l’information visuelle. F. Craik et R. Lockhart (1972) proposent la théorie de la profondeur de traitement. Cette théorie prétend que l’information peut être traitée à différents niveaux. Le premier traitement consiste à analyser les caractéristiques physiques ; les niveaux ultérieurs sont consacrés à la reconnaissance des formes et à l’identification du sens. Une fois le stimulus reconnu, il est plus facile de l’assimiler sur la base d’expériences personnelles lors de rencontres antérieures avec ce stimulus particulier.

Ainsi cette théorie postule que l’analyse se produit à travers une série de traitements successifs, de l’étape sensorielle aux niveaux associés à la reconnaissance des formes jusqu’aux étapes d’associations sémantiques. Toujours d’après ces auteurs, la mémoire de l’information est meilleure quand du sens a été élaboré à partir du stimulus. H. Noice (1991) a étudié les techniques de rappel à la suite de l’étude d’un script de six pages par des acteurs. Ses analyses révèlent que les acteurs apprennent leur texte au moyen d’un traitement élaboré qui retient la manière dont leur personnage les affecte ou dont il est affecté par les autres personnages du script. H. Noice (1991) conclut que «‘ les acteurs sont des experts en analyse et non des experts en mémorisation, et l’un des résultats de cette étude en profondeur est qu’en faisant un effort pour découvrir le véritable sens de chaque ligne, les mots inscrits sont également retenus sans avoir à fournir un grand effort délibéré pour les insérer dans la mémoire ’».

Plusieurs théories ne font aucune assertion sur la nature de la mémoire mais spécifient comment l’information pourrait être organisée pour un apprentissage optimal. Dans le cadre de notre étude nous allons explorer l’existence de différences entre les enfants qui présentent des troubles de l’attention et les enfants qui n’en souffrent pas, en essayant de cerner le type de mémoire mis en cause : mémoire à court terme ? à long terme ? ou de travail ? En effet, nous envisageons un dysfonctionnement au niveau de la mémoire de travail chez ces enfants, du fait d’un langage intérieur insuffisamment exploité (réf. Barkley, 1997).

Progressivement, ces conceptions multiples nous amènent à constater la présence d’une différence entre la mémoire de travail que nous pouvons retrouver sous le vocable de mémoire active (Gibello, 1998) et la mémoire à court terme.