6.3.5. Théorie de la charge cognitive

Ce développement nous conduit à appréhender la notiton de charge cognitive corrélée à une capacité limitée du traitement des données en Mémoire à Court terme pour les uns ou en Mémoire à Long terme pour les autres.

La charge cognitive est une théorie instructive qui a été générée par son champ de recherche (Sweller et Chandler, 1991) ; (Sweller, 1988 ; 1994). Elle décrit les structures d’apprentissages en termes de systèmes de processus d’informations impliquant la mémoire à long terme. La MLT stocke l’ensemble de nos connaissances et de nos habiletés dans une base plus ou moins permanente et la mémoire de travail intervient dans les tâches intellectuelles associées à la conscience. L’information stockée en mémoire à long terme peut être sollicitée et activée par la mémoire de travail. Celle-ci est cependant extrêmement limitée aussi bien en capacité qu’en durée. La capacité à gérer se limite à plus ou moins sept éléments d’informations simultanément d’après G. Miller (1956) ou à quatre d’après G. Halford (Halford et al. 1998) et N. Cowan (2000) dans un temps assez court de 2 à 30 secondes d’après A. Baddeley (1986) et N. Cowan (1995). N. Cowan explique notamment que lorsque l’information en MLT est activée par la présentation de l’information-Stimulus, elle reste activée automatiquement et brièvement, déclinant progressivement si rien n’est fait pour la réactiver.

Ces limites (temps et capacité) peuvent, sous certaines conditions, empêcher l’apprentissage. Dans les années 70-80, les expériences effectuées sur le problème du puzzle ont donné des résultats surprenants. En effet, les sujets arrivaient à résoudre le problème, mais n’étaient pas conscients du fait que la solution pouvait être déduite d’une règle simple. La résultante était qu’il existait une incompatibilité entre l’apprentissage et la résolution de problème dans certaines circonstances. Dans les années 80, la théorie du schéma est avancée pour expliquer les différences entre experts et novices. Les premiers utilisent des schémas antérieurement acquis, alors que les seconds emploient une analyse fins-moyens pour résoudre le même problème. Il est difficile d’acquérir de nouvelles connaissances puisque la charge cognitive est utilisée pour d’autres activités que l’acquisition de schémas. Pour J. Sweller et P. Chandler (1991) l’acquisition de schémas et l’automatisation de règles sont les principes centraux dans l’acquisition de compétences. De plus, toute activité cognitive dirigée ailleurs que sur ces buts va interférer avec l’apprentissage. Ils ajoutent, à propos de l’effet de redondance, que des résumés d’un texte ont une efficience supérieure au texte complet. Ces auteurs ont conclu qu’un surplus de détails empêche la rétention des points principaux. J. Sweller et P. Chandler (1991) précisent que du point de vue de la théorie de la charge cognitive, ces résultats étaient parfaitement prévisibles. En effet, traiter du matériel redondant impose une charge mentale externe supplémentaire. Elle démontre également que répartir l’attention sur plusieurs sources d’informations ne facilite pas le processus d’apprentissage. En revanche, cet apprentissage est amélioré en étudiant des exemples déjà résolus. Cette conception s’apparente à celle de W. Hirst et al (1980) cités plus avant, dans le sens où c’est l’utilisation de nouveaux moyens plus efficients qui atténue la charge cognitive. Ces auteurs sont en accord avec le courant constructiviste qui met en évidence le fait que l’apprenant n’absorbe pas tel quel le matériel d’apprentissage qui lui est proposé, mais l’assimile, le transforme pour l’insérer dans ses structures cognitives préexistantes qui se transformeront également. La théorie de la charge cognitive suggère que la réduction de cette charge associée à la construction d’une représentation, au sens piagétien, facilite l’apprentissage.

Nous nous rendons compte que ces assertions convergent avec celles de N. Cowan et de G. Miller notamment, en ce qui concerne les « chunks ». En effet, les « chunks » sont plus que des ensembles de stimuli. Lorsque les « chunks » sont formés en sorte de champs de stimuli en MLT, il n’existe pas de limite dans le nombre d’éléments (stimulus) pour compléter un « chunk ». Ainsi, la qualité du « chunk » prédomine la quantité. F. Gobet et H. Simon (1996 ; 1998) ont vérifié cette hypothèse chez les experts en jeux d’échecs. Ces joueurs diffèrent des joueurs novices dans la taille des « chunks » et non pas dans leur nombre. Ils ont par conséquent invoqué le terme de « patron » qui se rapporte aux grandes configurations d’informations qu’un expert peut retenir en un unique et complexe « chunk ». Néanmoins, B. Baars (1988) et N. Cowan (1995) ajoutent que lorsque les catégories (chunks) sont formées rapidement à travers de nouvelles associations qui ne préexistaient donc pas, alors il est attendu que la taille du « chunk » soit limitée à environ 4 items parce que tous les items qui ont été assemblés pour former un ensemble nouveau et plus important, doivent être maintenus dans le focus atentionnel en même temps que la nouvelle formation des associations intra chunks.