9.1. Etudes comparatives sur le fonctionnement cognitif des enfants inattentifs

A. Robitaille et ses collègues (Robitaille et al. 1990) ont comparé deux groupes d’enfants indépendants (vingt et un enfants hyperactifs et vingt et un enfants témoins sans hyperactivité) au test K. ABC (Kaufman et Kaufman, 1993). Le groupe des Hyperactifs obtient des notes significativement inférieures à celles du groupe témoin au niveau de l’échelle des processus séquentiels (p < .001). Aucune différence n’a été relevée concernant l’échelle des processus simultanés. A. Robitaille ajoute dans un autre article avec J. Thomas et J. Everett (1990) qu’il était intéressant au cours des premiers entretiens de bien expliquer à l’enfant l’ensemble du projet thérapeutique car cet enfant est capable de l’appréhender. Il poursuit en avançant l’idée que ces enfants peuvent comprendre très rapidement comment plusieurs types de satisfaction s’enchaînent et peuvent découler les unes des autres : « satisfaction de mieux écouter, satisfaction d’être apprécié par le professeur, les parents, de mieux s’estimer eux-mêmes ». Cette idée que l’on retrouve chez les neuropsychologues J. Flessas et F. Lussier provient peut-être du fait que ces enfants ont besoin de connaître l’objectif de leur action pour se motiver (Flessas et Lussier, 1995). Plus en avant, A. Robitaille cite C. Cahen (1987) pour expliquer l’importance de la complémentarité d’intégration entre les processus simultané et séquentiel. Cette complémentarité illustre le lien entre les données verbales et non verbales et incite l’enfant à saisir la relation qui existe ente le sens et l’image, entre l’abstrait et le concret.

Quant à D. Petot (1999), son étude reprend celle de C. Carter, F. Zelko, P. Oas et S. Waltonen (Carter et al. 1990) mais la comparaison s’effectue entre des enfants hyperactifs et des enfants normaux alors que l’étude de C. Carter consiste à mesurer la corrélation entre le facteur 3 du WISC.R encore appelé « distractibilité » (subtests : Arithmétique, Mémoire des chiffres et Code) et l’échelle séquentielle du K.ABC sur deux groupes d’enfants qui présentent des difficultés scolaires mais qui se différencient par l’absence ou la présence d’hyperactivité. Les résultats de l’équipe de C. Carter montrent que les enfants des deux groupes ne se distinguent qu’au K.ABC et uniquement au niveau des scores obtenus à l’échelle Séquentielle (M = 91,44) contre (M = 100,87) pour les quinze enfants non hyperactifs. L’étude de D. Petot aboutit aux mêmes résultats que ceux de C. Carter, à savoir que la comparaison des résultats obtenus au WISC-R par les enfants hyperactifs et les enfants témoins ne révèle aucune différence dans l’examen des trois QI. Cependant, elle précise qu’une différence de 10 points est observable entre les QI Totaux. En revanche, la différence devient significative au facteur de distractibilité. Quant à la comparaison des résultats obtenus au K.ABC, les enfants hyperactifs âgés entre six ans, quatre mois et douze ans, un mois (moyenne : 8, 7) échouent massivement aux subtests de processus séquentiels et de connaissances. Il est à noter que l’échec est général dans ce groupe par rapport au groupe témoin. Contrairement à l’étude de C. Carter, celle de D. Petot observe une corrélation assez élevée entre les notes obtenues au facteur 3 du WISC.R et les notes obtenues à l’échelle des processus séquentiels du K. ABC qui se vérifie dans les deux groupes indépendants. D. Petot cite ensuite d’autres recherches (Grant et al. 1990 et Seiderl et Joschko, 1991) examinant la relation entre une attention soutenue et le facteur 3 qui obtiennent quant à elles, une corrélation assez faible. A la suite de ces résultats, elle s’interroge sur l’importance des processus attentionnels dans le facteur 3.

R. Pry (1998) a également inclu le facteur 3 de distractibilité dans son étude sur les composantes cognitive et comportementale de trente enfants hyperactifs âgés en moyenne de 7 ans. En analysant les scores obtenus aux 11 subtests du WISC.R, les scores des enfants hyperactifs sont associés avec des performances psychométriques inférieures à celles des enfants témoins observées dans d’autres études. Ces résultats corroborent ceux de R. McGee et al. (1987) notamment, bien que le niveau des QI verbal et performances des enfants inattentifs de cette dernière étude atteint un niveau supérieur à 90. Dans celle-ci, les enfants étaient plus âgés (moyenne de 9 ans).

L’étude de R. Pry repose sur une conception tripartite de l’intelligence, c’est-à-dire que les trois facteurs de la batterie de tests du WISC.R possèdent leurs correspondants dans celle du K.ABC, (Pry, 1996, Kaufman, 1979). En effet, le facteur de Distractibilité (subtests arithmétique, mémoire des chiffres et code) s’apparente à l’échelle des Processus Séquentiels du K.ABC ; le facteur d’Organisation Perceptive (subtests complètement d’images, arrangement d’images, cubes) s’apparente à l’échelle des processus simultanés du K.ABC et le facteur de Compréhension Verbale (subtests information, similitude, vocabulaire) s’apparente à l’échelle des Connaissances du K.ABC. Les scores obtenus par les enfants inattentifs au WISC.R montrent deux faiblesses très significatives aux subtests « Vocabulaire » et « Arithmétique », subtests à composante verbale. R. Pry précise que ces résultats sont également retrouvés dans d’autres études, notamment celle de H. Goldstein (1987). Il interprète ces difficultés au regard du niveau d’abstraction des items qui gagnent en complexité. Cette progression dans l’élaboration cognitive met en échec ces enfants qui présentent précisément des troubles dans le maintien de l’attention. Il analyse également les corrélations qui peuvent exister entre les variables cognitives (WISC.R) et les variables comportementales (questionnaire de Conners, 1969). Là, il observe des liens très forts entre le facteur Organisation Perceptive (appréciant l’intelligence fluide, sollicitant les processus simultanés) et les processus séquentiels représentés par le facteur 3 de distractibilité. Cette corrélation met en exergue l’implication conjointe des deux types de processus cognitifs dans le traitement de la majorité des tâches. Une corrélation assez forte est observée entre les troubles des conduites (échelle de Conners) et les problèmes d’apprentissage. Une autre, très forte est constatée entre ces derniers et le facteur d’Organisation Perceptive associé à un traitement simultané des données. La corrélation entre le facteur Distraction associé aux processus séquentiels est également observée mais à un degré moins important. Ainsi, un facteur cognitif et un facteur comportemental sont dégagés pour rendre compte de ces corrélations. Il s’agit du facteur représentant l’intelligence fluide (Horn et Cattel, 1967 ; Pry, 1995) qui sature l’Organisation Perceptive et la distractibilité, les deux composantes qui saturent négativement les problèmes d’apprentissage (Questionnaire de Conners). Le second facteur sature les échelles d’hyperactivité et d’anxiété (questionnaire de Conners).

Nous verrons si nos enfants qui présentent des troubles de l’attention et qui suivent une scolarité ordinaire présentent des troubles de l’apprentissage accompagnés ou non d’une prédilection pour le traitement simultané des informations.

Par ailleurs, ces enfants rencontrent des difficultés à mémoriser et nous savons que la mémorisation est un processus qui est facilité par une bonne organisation des informations associée à une motivation suffisante. C’est pour cette raison que nous abordons dans le sous- chapitre suivant la présence ou non de problèmes d’organisation des informations chez les enfants TDA.