16.6.4. Analyse synthétique des différentes données

Aurélie est une petite qui montre une énergie débordante et qui sourit facilement. Son impulsivité se vérifie dans son comportement et dans la réalisation de tâches cognitives. Dans un premier temps, nous n’avions pas l’impression que cette enfant possédait une estime de soi (23) proche du seuil pathologique (18). Au regard des résultats obtenus au questionnaire de S. Coopersmith, nous estimons qu’ Aurélie est fragile narcissiquement et que les remontrances d’un adulte à son égard l’affectent au plus haut point (réf. Episode de la maîtresse qui la menaçait de baisser sa culotte). Elle est très dépendante du regard d’autrui. D’ailleurs, son sourire est charmeur comme si elle souhaitait séduire l’autre pour être acceptée. Nous rencontrons cette dépendance dans le champ de la cognition. En effet, elle éprouve des difficultés à abstraire un ensemble cohérent à partir de petits ensembles qu’ils soient perceptifs ou conceptuels. En revanche, elle est performante dans l’encodage séquentiel des items. Ceci peut traduire un ancrage dans une suite ordonnée d’éléments, d’événements ou encore de filiation. En effet, nous savons que cette enfant s’intéresse beaucoup aux discussions des adultes. Elle ne fait pas de confusions entre son statut et celui des autres membres de la famille. Elle sait très bien s’organiser, cependant elle agit comme elle l’entend (réf. Moi-plaisir). En effet, sa mère lui concède volontiers le rôle de sœur et par conséquent de petite mère envers ses autres enfants. Il semble donc que cette famille ait trouvé un équilibre en laissant à Aurélie une place qui n’est pas forcément la plus constructive intellectuellement et affectivement. Ainsi, cette enfant n’a pu correctement s’investir dans les apprentissages scolaires, objet valorisé socialement (réf. Sublimation). Elle vit aux côtés de sa mère comme une sœur qui veille sur elle. L’objet investi est alors la mère et sa capacité à donner la vie. Le mari de sa mère n’incarne plus le mauvais objet puisque celui-ci est endossé par son père (elle prétend pendant la réalisation du génogramme qu’elle ne s’entend pas du tout avec son père biologique). Nous pouvons émettre l’idée que cette enfant a réussi à se construire en se plaçant dans une nouvelle lignée intergénérationnelle. Son investissement dans une nouvelle famille lui a permis de travailler un manque (absence physique du père). Nous pouvons considérer ce travail comme un processus de construction du lien, long et progressif que B. Cyrulnik à l’instar d’autres auteurs nomme résilient. En effet, cette enfant a entrepris et entreprend une transformation de l’objet qui la perturbe tout en s’ancrant dans une nouvelle lignée. Etant donné notre position, nous ne pouvons nous exprimer sur l’avenir du développement psychique de cette petite fille. Nous pouvons simplement dire qu’Aurélie a redoublé sa sixième et que les études ne l’intéressent guère. Son sourire est resté le même et elle est toujours une enfant pleine d’énergie qui éprouve toujours des difficultés à rester en place et à écouter ce qu’on lui dit.