16.10.4. Analyse synthétique des différentes données

Nous constatons que cet enfant vit avec une mère qui n’échange pas, qui ne possède pas d’avis et qui par conséquent n’offre pas de stimulation intellectuelle. Jacques considère d’ailleurs sa mère comme une amie. Ces deux êtres s’aiment mais partagent peu. Cette observation nous renvoie encore une fois à la qualité des échanges précoces mère-nourrisson. Si la mère n’offre à son enfant que des réponses émotionnelles, motrices et verbales restreintes, ce dernier ne pourra qu’imparfaitement se les approprier à moins qu’une autre figure, paternelle notamment, ne vienne suppléer certains manques. Cette hypothèse nous renvoie à l’intérêt que nous devrions porter au rôle paternel dans le cas où la mère présente une déficience intellectuelle légère.

Concernant cette fonction paternelle, nous ne savons que très peu de choses. Le père a mentionné très rapidement un suivi psychiatrique le concernant mais nous n’en connaissons pas la cause.

Nous constatons que les parents se rendent compte du comportement inadapté de leur fils mais semblent démunis. Lors de l’entretien, ils rapportent des faits observés concernant leur enfant mais ne cherchent pas à les expliciter. Ils sont quelquefois dans le déni lorsqu’ils omettent de préciser que Jacques souffre d’encoprésie.

Il nous apparaît que ce couple parental rencontre des difficultés à endosser un rôle éducatif. A ce propos, Jacques doit se débrouiller seul pour se vêtir et manger. Son enseignante a dû recourir aux services de l’assistance sociale afin qu’elle intervienne auprès de la famille pour lui acheter une nouvelle tenue vestimentaire et des chaussures.

Sans aucun doute, Jacques est un garçon intelligent qui, ne supportant pas la frustration, explose souvent de colère à la maison ou à l’école. Il est capable d’être créatif dans ses jeux et sollicite quelquefois la présence de sa mère. Lorsqu’il nous explique à quoi il joue avec elle, nous nous rendons compte qu’il lui dicte tout ce qu’elle doit faire. Cette sujétion maternelle associée à une fragilité psychique du père (vocifère souvent) nous incitent à penser que cet enfant est plus ou moins conscient de son ascendant sur ses parents et son frère. Jacques n’a peut-être pas suffisamment intériorisé ses affects, ses images (réf. Langage intérieur) qu’il véhicule depuis sa naissance pour leur donner du sens, mais il commence à le faire. Nous nous rendons compte de ce cheminement grâce à l’intérêt que lui porte son enseignante et aux progrès constatés dans ses résultats scolaires. Néanmoins, le fait de ne pas sembler être préoccupé par son pantalon mouillé et malodorant ainsi que par ses fréquentes altercations avec ses pairs nous donnent à penser que Jacques s’empêche de se représenter son état face à lui-même et à autrui. Il semblerait que le mode de pensée de cet enfant fonctionne sur un mode binaire, tout ou rien.