2. À l'échelle du couple

Nous allons maintenant étudier la composition des couples. Ce type d'analyse présuppose que le choix du partenaire est un choix raisonné et conscient qui obéit essentiellement à des critères sociologiques. Nous n'ignorons pas que de multiples facteurs peuvent influencer ce choix et que ces facteurs ne sont pas tous d'ordre sociologique. Le critère de l'origine géographique du partenaire, qui nous intéresse ici plus particulièrement, peut même sembler marginal dans ce processus. Mais, sans minimiser la dimension intime ou la place du hasard dans la formation des liens affectifs dans un couple, nous considérons que le choix du partenaire n'est pas illimité. Il s'effectue à l'intérieur de réseaux de relations qui font, au bout du compte, l'objet de notre recherche. Le conditionnement du choix du partenaire par rapport aux origines géographiques peut donc être considéré comme un indice valable de la cohésion des réseaux interindividuels autour des liens de type communautaire : communautés actives dans le quotidien de la ville et communautés constituées autour d'origines régionales partagées.

Indirectement, ce sont aussi les stratégies matrimoniales qui vont être prises pour objet de recherche dans cette phase. Ces stratégies ne doivent pas être confondues avec des règles absolues dont la non-observance serait sanctionnée par la communauté. À travers les choix des partenaires, les habitants de la Rua da Cruz et de la Rua Feliciano de Sousa agissent, consciemment ou inconsciemment, en fonction de ce qui est supposé être leur intérêt, selon des principes profondément intériorisés 469 .

Notes
469.

Voir Pierre Bourdieu, «Les stratégie matrimoniales dans le système des stratégies de reproduction", dans Le Bal des célibataires : crise de la société paysanne en Béarn, Paris, Seuil, 2002, pp. 169-173. Ce texte a d'abord paru dans les Annales, nº4-5, juillet-octobre 1972, pp. 1105-1127.