Introduction générale

‘« Religion and satire’ ‘ can be incompatible, even opposed, but they can also join to produce great art. […] Religious satire always has a grand theme: man’s encroachment on the divine – his effort to play God, in whole or in part – under the banner of religion’ ‘ or of humanity » ’(Kantra, 1984, xi). Quelle que soit la « noblesse » du sujet, la satire religieuse se révèle problématique tant pour le satirique que pour le critique : le premier encourt les foudres de la censure – ‘« Antithetical charges of "dogmatic orthodoxy" and of "blasphemy" have been both shot at religious satirists, sometimes at one and the same satirist »’ (ibid., p. 1) –, tandis que le second se trouve confronté à des difficultés théoriques – ‘« religious satire challenges the critical reader; it confronts him with problems in the domain of taxonomy (genre study), history, and theory »’ (ibid., xi) –, ayant trait au caractère hybride d’une telle satire :

Cela tient aussi à la nature controversée de son sujet : ‘« Religion as "subject matter" is controversial in both art and science, in satire’ ‘ and sociology »’ (Kantra, 1984, p. 3). Précisément, la religion en tant que « sujet » de la satire, c’est‑à‑dire le traitement réservé à la religion et aux institutions religieuses dans les satires swiftiennes est a priori l’aspect principal de la question des liens entre satire et religion dans l’œuvre de Swift. Or cette question ne sera pas traitée en ces termes dans notre travail, ce qui appelle bien entendu une justification. Les raisons qui motivent une telle décision sont d’ordre à la fois pratiques et théoriques. Il convient d’abord de souligner que la question a déjà été largement traitée, tant dans sa dimension théorique que dans ses applications pratiques aux œuvres swiftiennes. Mais notre principale réserve est d’ordre théorique, dans la mesure où, abordée en ces termes, la question finit toujours, nous semble-t-il, par se dissoudre en une aporie critique.