2.3.1.8. Un rapport marchand et/ou rapport d'autorité scientifique

Il existe d’autres caractéristiques, un peu moins lourdes, mais réelles tout de même, comme la nécessité de plaire, l’attractivité du discours. La visite guidée s’inscrit dans un système commercial. Le métier de guide n’existe qu’autant qu’il y a des gens qui viennent visiter le pays, et plus le guide plaît aux gens plus il aura de chances d’avoir du travail. Cet aspect commercial n’est pas du tout présent dans le cours magistral, l’enseignant, fonctionnaire, n’a pas besoin de plaire pour amener au cours des étudiants qui sont des publics captifs et qui ne paient pas l’enseignement. Dans la conférence, ce rapport marchand n’est pas totalement absent puisque les gens paient pour y assister, et la séduction n’est pas absente de ce type de discours ; il suffit d’écouter les phrases introductives de toute conférence pour s’en rendre compte. Mais le scientifique ne vit pas de ses conférences ; c’est plutôt un expert, détenteur d’une autorité scientifique, qui accepte de transmettre à un grand public le résultat de ses recherches. Cela réduit beaucoup la portée du rapport marchand avec le public. Il a cependant une dimension "publique" et donc il faut que sa réputation soit bonne, surtout chez ses pairs. Cette réputation implique une évaluation du conférencier de la part de l’auditoire, contrairement au rapport liant l’enseignant à ses étudiants. Le conférencier a besoin d’un jugement et d’une évaluation positive du public car il vit de son image extérieure qui conditionne une partie de son existence professionnelle. C’est un aspect que le conférencier partage avec la situation du guide mais certes à un degré bien moindre. Le guide, lui, vit de la présence du public et dès qu’il y a moins de public son emploi est mis en péril.

Les gens sont plus sensibles à l’idée de l’autorité scientifique dans le cas de la conférence que par rapport au guide. Cela correspond à la réalité de l’"expertise" du guide dont la formation n’est pas très poussée et qui est plus reconnu par le public comme "transmetteur" que comme détenteur d’un savoir, et certainement pas comme « producteur » de ce savoir. Cette caractéristique, ajoutée à ce qui a été dit du rapport marchand entre guide et visiteurs, rend le public comme nous l'avons déjà dit plus libre, dans ses interventions, ses commentaires, son attitude en général, dans le cas de la visite guidée. En effet, le rapport marchand dans le discours du guide implique plusieurs attitudes ; d’abord, le guide doit supporter et accepter les interventions, voire les interruptions et les plaisanteries hors sujet faites par les touristes, tout comme les manifestations de désintérêt par rapport à son discours.

Cette attitude est moins libre dans le cas de la conférence et du cours magistral où prime l’autorité scientifique. Pour le cours magistral, l’autorité scientifique se double d’un pouvoir institutionnel, au point d’ailleurs qu’il n’est pas très facile de mesurer la réalité de la première, compte tenu du poids du second.

Tableau récapitulatif

Le tableau que nous avons élaboré a pour objectif de résumer toutes les caractéristiques des trois discours évoquées plus haut à la fois dans leurs ressemblances et leurs différences.