2.3.2. Catégories du Code-Switching

Le code-switching fait essentiellement appel à trois mécanismes (Jamoussi, 1986) :

  • L'emprunt d'éléments linguistiques isolés (borrowing) prélevés d’un code-source et utilisé dans leurs formes originelles dans un code-base.

Exemples de phrases extraites de données d’étudiants tunisiens de 1er cycle universitaire lors de résolution d’exercices de chimie organique :

  • « bahi chnia la différence bin lula wel thania (?) » (d’accord quelle est la différence entre la première et la deuxième (?)) (Ex. 1, série 1, tour de parole 9)
  • «  ma c neha famma effet inductif linna  » (ça veut dire qu’il y a un effet inductif ici) (Ex. 1, série 1, tour de parole 10)
  • « ya c ni hna c anna carbocation hadhaya ach bach ya c mel (?) » (ça veut dire ici ce carbocation là qu’est-ce qu’il va faire) (?) (Ex. 1, série 1, tour de parole 11)

Dans ces exemples, le code-base est l’arabe tunisien, le code-source est le français. Les éléments empruntés peuvent avoir un équivalent dans le langage naturel de la langue d’origine (la différence), ou pas (effet inductif et carbocation).

  • L'emprunt d'éléments qui ne sont pas nécessairement isolés, insérés dans la structure du code-base. Ce type de mécanisme est connu sous le nom de « code-mixing » ou « mélange de code ». La différence avec le premier mécanisme réside dans le fait que la relation syntagmatique des éléments linguistiques se trouve changée.

Exemples de phrases extraites de données d’étudiants tunisiens du 1er cycle universitaire lors de résolution d’exercices de chimie organique :

  • « ynajjmu ykunu diastérioisomères deux isomères » (deux isomères peuvent être des diastérioisomères) (Ex. 1, série 2, 43)
  • «  ki el -carbone l’azote » (l’azote est comme le carbone) (Ex.2, série 1, 12)

Dans ces exemples, la structure de la phrase change lorsque sont traduits les éléments empruntés. En effet ces emprunts ne suivent pas l’ordre requis par une structure française qui aurait déplacé les équivalents « peuvent être » et « comme » et les aurait mis entre « deux isomères » et « diastérioisomères » pour le 1er exemple et entre « l’azote » et « le carbone » dans le 2ème exemple. Cela implique que les éléments empruntés suivent une autre loi.

  • Emprunt d'éléments syntaxiques majeurs tels que phrases, propositions ou grands textes de discours. Ce type de mécanisme est connu sous le nom de « code-changing » ou changement de code.

Exemple de phrase extraite de données d’étudiants tunisiens de 1er cycle universitaire lors de résolution d’exercices de chimie organique :

  • « ya c ni il manque un électron lil -carbone hadhaya bach twalli hna double liaison … » (ça veut dire il manque un électron à ce carbone là pour avoir une double liaison ici) (Ex. 1, série 1, 21)

Cette permutation porte une longue séquence où la rupture se produit à des niveaux divers.