2.3.3. Origines du Code-Switching

L’alternance des éléments linguistiques est amorcée par des facteurs déclenchants. Ces facteurs sont linguistiques, sociologiques et psychologiques (Jamoussi, 1986).

Exemple de production d’étudiant : « flèche bach yokhroj min cycle » (la flèche part du cycle) (Ex. 1, Série 1, 17).

Les mots « flèche » et « cycle » dans cet exemple n’ont pas d’équivalents dans le code-base utilisé : l’arabe tunisien, ils ont alors été empruntés à un code-source : le français.

  • Les facteurs linguistiques sont également syntaxiques. Par exemple dans la phrase : « je suis hungry  », le recours à l’anglais permet d’éviter une malformation structurelle telle que « je suis faim » que la grammaire du français n’accepterait pas.

Les facteurs linguistiques sont également liés à la fréquence d’un élément de code que, par économie, le locuteur choisit d’utiliser plutôt que l’équivalent existant dans son code :

Exemple de production d’étudiant : «  ‘alqarara:t to’khadh bil -consensus » (les décisions sont prises par consensus) où « consensus » aurait pu être remplacé par son équivalent arabe : «  ‘ijma: c  » dont la fréquence d’emploi dans le milieu concerné est peut-être moindre, et qui risquerait d’être incompris dans la situation où le locuteur se trouvait.

  • Les facteurs sociologiques sont étroitement liés aux diverses situations et aux variables qui les définissent. Ces variables sont le local, le sujet traité, le locuteur, l'allocutaire, leurs rôles respectifs, aussi bien que leurs statuts et les codes dont ils disposent ainsi que le degré de formalisme des situations (formelle, informelle et semi-formelle).

Les facteurs sociologiques sont largement décrit dans la littérature internationale : (Fishman, 1965 et 1971 ; Gumperz, 1971 ; Hymes, 1967).

  • Les facteurs psychologiques, inhérents au locuteur, sont les plus difficiles à cerner, car il n’est pas toujours aisé de comprendre pour quelle raison un même locuteur, dans une même situation utilise un code et que, dans la même situation et dans le même discours, il permute ses codes.

L’état psychologique, sinon physique parfois, joue un rôle assez important dans le code-switching. Le degré de fatigue, la colère, le degré d’engagement dans une discussion, les sentiments éprouvés dévoilent d’une part le code-base d’un locuteur qui, pour des raisons idéologiques, personnelles ou culturelles, s’acharne, dans une situation donnée, à ne pas l’utiliser ou permettent inversement au locuteur d’acquérir un code pour affirmer une identité qu’il s’est choisie.

Le code-switching peut être utilisé à des fins stratégiques. Un locuteur permute ses codes pour n’être compris que d’un allocutaire donné, ou pour éviter qu’un auditeur comprenne un message donné (parents-enfants). Il peut aussi vouloir faire de l’humour et jouer sur certains mots.

Le code-switcing peut servir à souligner l’importance d’un message par la répétition en deux codes du même message, comme le montre l’exemple suivant : « la double liaison entre CH 2 et CH elle est mkassra cassée » (la double liaison entre CH2 et CH est cassée cassée) (Ex.6, série 2, 6)