Objet de la recherche.

La présente recherche a donc pour objet de faire ressortir, en en analysant les déterminants de toutes natures, les limites de la libéralisation en système d’économie à base de rente.

Les présupposés implicites du raisonnement qui sera développé sont nombreux. Il en est qui méritent d'être explicités d'emblée pour la bonne compréhension de la thèse développée tout au long de ces pages. Ainsi est qualifié de système productif marchand le système d'économie appelé économie de marché. Celui-ci est tout entier organisé autour du rapport salarial, type même de rapport de travail correspondant au mode de produire le plus performant que l'humanité ait jamais expérimenté : le mode de produire industriel. Rapport salarial et mode de produire industriel sont les conditions permissives de la croissance cumulative de la production (autrement dit de l’accumulation qui suppose la production d’un surplus). On ne peut donc pas s'étonner de ce qu'on ait consacré de longs développements à la formation de l'économie de marché pour en connaître les lois de fonctionnement. Celle-ci constitue pour nous tout à la fois le cadre de référence pour l'analyse et l'objet d'une critique à contenu historico-logique. Autre présupposé implicite, la libéralisation est le processus conduisant à l'instauration de l'économie de marché (cas des pays à économie anciennement planifiée ou plus généralement à économie administrée) ou au renforcement des bases de l'économie de marché (cas des pays à forte implication de l'Etat dans l'économie restée globalement une économie de marché). Quant à la libéralisation qui a cours dans les pays sous-développés en butte à des difficultés de toutes natures, elle signifierait simplement que ces pays commencent à adopter les principes de l'économie de marché et donc à transformer en rapport salarial les rapports de travail à l'oeuvre dans la formation sociale considérée pour tout à la fois accéder à la maîtrise du principe de composition et au statut d’Etat-nation.

Est-il réaliste de postuler, sur la base de ces présupposés et eu égard aux processus mondiaux en cours dont on a dit qu'ils ont tout de processus irrépressibles de libéralisation ; est-il réaliste de postuler que la transition à l'économie de marché n'a aucune chance d'aboutir en Algérie ? Certes non s'il s'agissait de nier purement et simplement les effets des réformes sur l'économie et la société ainsi d'ailleurs que sur les institutions. Mais ce n'est pas de cela qu'il s'agit. Il s'agit de dire que tant que la rente représentera l'essentiel des revenus en devises du pays et tant que le système sociopolitique qu’elle définit continuera de régenter la société, le système productif algérien sera dans l'incapacité de secréter des ressources à hauteur des besoins de l'économie (autrement dit de dégager un surplus) et restera handicapé quant à son aptitude à endogénéiser le principe de composition, compromettant par cela même son accession au statut d’Etat-nation qui compte dans le concert des autres Etats-nations. Si le système économique algérien est sommé de réaliser les transformations qu'appelle de toute nécessité son insertion dans l'économie mondiale, celles-ci resteront des transformations de type formel en ce qu'elles n'intégreront que formellement (c'est-à-dire sans changer l'ordre des déterminations entre rapports de production et rapports de distribution, ordre dont on peut dire qu'il se présente de façon inversée à celui ayant cours dans une économie de marché constituée) les changements systémiques inscrits dans la transition à l'économie de marché. Ce n'est pas pour autant qu'on doive ignorer les restructurations sociales qui se produisent dans ce pays à la faveur de la libéralisation économique en cours. Celles-ci ont même un caractère plus prononcé en Algérie que dans les pays à économie de marché constituée malgré le poids des traditions communautaires et malgré les difficultés politiques rencontrées par les tenants du régime autoritaire de gouvernement dans leur tentative de renoncer à l'idéologie populiste de l'égalitarisme social pour épouser celle d’un libéralisme débridé : la paupérisation se développe à grande échelle en Algérie.

Tels sont, brièvement formulés, les termes du problème que nous nous sommes fixé l'objectif de traiter. Reste à dire quelques mots sur les questions de méthode et sur la structure et le contenu de l'étude.