6.3. L’ambivalence des rapports de travail en économie étatique de rente.

Parler du statut du travail dans un système d’économie comme celui de l’Algérie des années 1970 est extrêmement ardu. Deux séries de faits contradictoires sont à l’œuvre :

La situation ainsi créée n’a pas cessé d’évoluer dans l’ambiguïté, conduisant finalement à la dilution des responsabilités et à l’érosion de l’autorité si caractéristique des régimes populistes. C’est semble-t-il le résultat de la recherche à tout prix d’un consensus social dont on a dit précédemment qu’elle était inscrite dans la logique même du système d’économie étatisé fondé sur la rente.

Ce qu’il y a de plus caractéristique dans cette situation, c’est que le travailleur algérien n’était préparé à être ni un simple rouage de la « machine sociale » 557 auquel le réduit le salariat en pays capitaliste industriel, ni l’associé de l’Etat dans la gestion de l’économie à dominante industrielle qu’allait devenir l’économie algérienne en moins d’une décennie. Cette double inexpérience limite singulièrement la perspective de voir se réaliser les objectifs de la stratégie algérienne de développement, a fortiori ceux inscrits dans la plate-forme de la Soummam 558 et dans les autres textes doctrinaux de la République algérienne.

Notes
557.

L’expression est de C. Palloix. Voir Un essai sur la formation de la classe ouvrière algérienne (1963-1978), Revue Tiers-monde n°83, 1980.

558.

La plate-forme de la Soummam est un texte doctrinal adopté par le congrès du FLN qui s’est tenu en août 1956 dans un village de la vallée de la Soummam (Kabylie).