Conclusion de la premiere partie

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Au cours de l'histoire de l'humanité, les termes de guerre et de paix ont suscité maintes interprétations. Ils ont le plus souvent été envisagé dans leur relation comme des éléments contradictoires c'est-à-dire s'excluant l'un l'autre. Or, Héraclite nous montre que ces deux termes sont plus constitutifs d'un couple dans lequel la paix n'est pas la négation de la guerre. Par contre le corollaire nous indique que la paix s'oppose à la guerre comme son contraire, il ne s'agit pas d'une alternative contradictoire entre paix et guerre. Les choses ne sont pas statiques nous explique Héraclite, s'il existe un équilibre à trouver aux contraires, qui se pensent ensemble, celui-ci doit être pensé comme dynamique. Le conflit c'est Polemos et la violence s'instaure quand la rupture du couple des contraires a lieu.

Cependant, la violence et la guerre ont, pour Machiavel, comme origine les désirs des hommes. La guerre n'est pour le florentin qu'une forme de la politique qui repose sur des préceptes différents de ceux imposés par la morale. Les Etats ne sont-ils pas nés de la violence et de la ruse. La paix dans ce contexte est instrumentalisée pour renforcer le pouvoir du prince.

L'éthique politique de Machiavel peut être réfutée, c'est ce que fera Erasme qui développera dans une Europe, chrétienne et ensanglantée, le rêve d'irénisme. L'identification de l'humanité à la chrétienté implique dans la logique du moine batave que la religion ne peut être que consubstantielle de la paix.

L'arbitrage et la médiation par le droit sont initiés par Grotius et prolongés par l'Abbé de Saint-Pierre. Ces dispositions prévoyaient par un solide étayage juridique qu'une paix durable, entre les Etats d'Europe qui ne cessaient de se faire la guerre, pourrait s'établir.

Les réflexions sur la nature de l'homme et sur ses relations aux autres nous conduisent avec Jean-Jacques Rousseau à considérer que c'est la société qui a corrompu l'homme, par ce fait il a perdu son état de nature. L'entrée en société génère la violence et la l'apparition du contrat "d'inégalité légalisée", qui est un contrat de violence ; un contrat idéal, un pacte social, est donc nécessaire. Or, ce contrat établit une paix de principe, cependant que l'état de guerre demeure au sein de la société.

L'être-pour-soi, traduisant l'individualité de l'Etat, induit pour Hegel, la liberté et la dignité du peuple. L'Etat est souverain comme individu réel et immédiat et la "norme" des relations inter-étatiques est la guerre. Alors que la guerre serait nécessaire à la vie, une paix trop longue provoque l'endormissement d'un peuple, c'est en ce sens qu'elle serait mortifère.

C'est sans doute Kant qui a le plus complètement théorisé les rapports qu'entretiennent la guerre et la paix. La paix perpétuelle correspond à la Raison parvenue à l'âge critique. La paix authentique suppose de surmonter les cultures guerrières tout de même que les illusions d'une paix qui serait éternelle. C'est le criticisme qui ouvre la perspective d'une Idée de paix perpétuelle par le fait que la paix n'est pas un état de nature mais qu'elle se doit d'être instituée. C'est un devoir que de tendre vers la paix perpétuelle, elle doit voir son développement progressif vers son but de manière asymptotique.

A partir de la Révolution française, on peut constater une oscillation entre les options pacifistes et guerrières. La constituante qui d'abord en 1790 entend proscrire les guerres de conquêtes, s'oriente un an plus tard vers une politique guerrière qui enflamme l'Europe jusqu'en 1815.

Les enjeux économiques qui se développent jusqu'en 1848 nécessitent un état de paix, en effet le pacifisme rassure le commerce, c'est l'époque où apparaissent les sociétés de paix. Le XIXe siècle croit également que les progrès et la science doivent conduire à la paix, mais la politique en décidera autrement avec l'éclatement de la guerre de 1870. Jusqu'en 1914, il s'en suivra une paix armée entre la France et l'Allemagne, qui conduira à la catastrophe de la Première Guerre mondiale.