Territet-Montreux

C'est sans doute en 1923 que s'opère chez le pédagogue une prise de conscience majeure à Territet-Montreux en Suisse372 lors du congrès de la Ligue Internationale pour l'Education nouvelle.

Célestin Freinet est, selon Elise Freinet, ‘"’ ‘passionnément intéressé par tout ce qu'il voit et entend. Il pénètre mieux ce principe d'éducation nouvelle soucieux de donner à l'enfant un rôle actif dans sa propre éducation’ ‘"’, mais il est découragé par ce que proposent les pédagogues tels que Ferrière, Claparède ou Bovet. ‘"’ ‘Il se rend compte, poursuit Elise Freinet, qu'il y a une éducation nouvelle relativement facile, applicable pour les écoles possédant le matériel éducatif, l'installation scolaire permettant l'activité de l'enfant et l'individualisation de l'enseignement. Mais pour l'école de ’ ‘Bar‑sur‑Loup le problème est tout autre. L'image de sa petite classe dénudée et poussiéreuse s'impose à lui et lui serre le cœur’ ‘"’ ‘.’

Néanmoins, Célestin Freinet ne se laisse pas abattre aussi facilement, il saura tirer de ce qu'il voit et entend en Suisse les éléments adaptables pour sa classe. Le pédagogue illustre lui-même cela : ‘"’ ‘la ligue sera incapable d'obtenir la mise en pratique de principes dont elle aura prôné la valeur. L'œuvre de réalisation, c'est à nous de l'entreprendre... Mais nous aurons souvent à demander conseil à cette Ligue pour l'Education nouvelle et nous trouverons, dans les livres et revues qui publient les travaux de ses membres, quelques-uns des matériaux pour l'Ecole du Prolétariat’ ‘"’ ‘ 373 ’ ‘.’

Freinet a la même attitude, quand, lors de ce congrès, il rencontre Cousinet qui présente un compte rendu de ses premières tentatives de travail par équipe. Si, l'initiative de Cousinet, paraît à Freinet trop systématisée, selon Elise, il n'en rejette pas pour autant le principe ; d'autant qu'il semblerait qu'il avait déjà tenté de faire travailler ses élèves de manière collective. Les techniques de travail collectif ne peuvent de toute manière que retenir l'attention du pédagogue, en effet, il est convaincu que le travail de groupe permet de créer chez les élèves la solidarité par l'approche de la socialisation, de la coopération. C'est un des moyens pour former un futur homme de paix, tel que le conçoit Freinet. Quand un enfant, un être humain en général, ne se sent pas agressé, il n'y a pas de raison a priori pour qu'il recherche les querelles ou la guerre avec l'autre.

Notes
372.

- cf. Elise Freinet : Naissance d'une pédagogie populaire, p. 30. Elise indique que Célestin Freinet se rend en Suisse en fin d'année scolaire 1924, Michel Barré dans Célestin Freinet, un éducateur pour notre temps, fixe quant à lui cet événement ayant lieu pendant l'été 1923.

373.

- FREINET (C.), Vers l'école du prolétariat, Clarté, N° 47 du 15 novembre 1923. Cité par M. Barré in Célestin Freinet, un éducateur pour notre temps. p. 18.