Conclusion de la troisième partie

Pour les nouveaux éducateurs, au rang desquels Célestin Freinet et Maria Montessori ont marqué leur époque de manière significative, la paix ne saurait advenir si le système éducatif ne se refond pas et s'il ne se saisit pas du problème de son éducation. Il va donc s'agir pour ces pédagogues de développer un esprit de fraternité. Ce rêve est engendré par le fait que la bonne nature originelle est porteuse d'espoir. L'homme est sorti de son état de nature et il a gagné sa liberté. En conséquence il faut avant tout préserver la nature de l'enfant si l'on veut espérer pouvoir créer un monde nouveau. Cependant, il ne semble pas qu'une éducation basée sur le pacifisme assure à terme un état de paix.

Célestin Freinet, Maria Montessori et plus généralement les nouveaux éducateurs pensent la paix comme un état stable qu'il convient de faire advenir et qui, une fois établi va perdurer. Cette stabilité s'inscrit dans le pacifisme, le "plus jamais ça", et ce à tout prix. Ainsi, dans une telle démarche la valeur du conflit n'est pas prise en compte. Dès lors, il apparaît ici une déconnexion d'avec la réalité objective des relations humaines qui implique la possibilité du mal, de la violence et de la guerre.

Cependant, d'une part, les sciences psychosociales nous apprennent que le conflit à la condition qu'il ne dégénère pas en violence, peut s'il est convenablement pris en compte, être formateur pour l'homme et également pour la société ; la philosophie, d'autre part, nous montre que la raison est un choix, qui laisse ouvert celui de la violence. C'est une expression de la liberté de l'homme. Ainsi, pour se libérer de l'impasse de l'idéologie pacifiste il appert que le conflit, comme violence contenue, reste un moteur de la nature humaine et de son développement.

Le statut que l'on accorde au conflit dans une option éducative nous paraît de ce fait déterminant. L'approche éducative que fait la pédagogie institutionnelle, par la reconnaissance de l'existence du conflit et de son acceptation, correspondrait à la prise en compte de la réalité des rapports humains. L'intégration du conflit dans une pédagogique prendrait sens en regard d'une démarche d'éducation à la paix, cependant qu'il faut garder à l'esprit que la violence est toujours un possible irréductible lié au choix de l'homme, expression de sa liberté tout aussi irréductible.