Chapitre 2
Cadre théorique

‘All science is either physics or stamp collection.
(E. Rutherford, 1907)’

2.0 - Introduction

La phrase du célèbre physicien Rutherford citée en exergue de ce chapitre n’est certainement pas là pour montrer l’inutilité de notre thèse, qui manifestement n’appartient pas au domaine de la physique. Au contraire, nous l’avons choisie dans le but de souligner à quel point une bonne approche théorique est importante pour le succès de tout travail scientifique. Car, à collectionner des données comme des timbres-poste, on risque d’obtenir une collection qui ne prouve ni n’explique rien. Le deuxième chapitre de notre thèse est donc consacré aux théories que nous allons utiliser dans nos analyses et que nous appliquerons aux données linguistiques. Etant donné que nous sommes consciente des dangers d’une approche uniquement sémantique 20 , nous avons décidé d’adopter une perspective pragmatique. Nous commençons donc ce chapitre par une présentation historique de la pragmatique. Ensuite, nous introduirons la Théorie de la Pertinence (Sperber & Wilson, 1986) et la Théorie de l’Optimalité (Prince & Smolensky, 1993). Dans la section suivante nous aborderons les problèmes de méthodologie. Ensuite, nous allons aborder le phénomène de la coercion qui joue un rôle très important dans les usages non-standard des prépositions spatiales et temporelles. Enfin, nous présenterons la linguistique cognitive qui est un courant théorique alternatif à la théorie de Jackendoff dans le cadre de laquelle nous travaillons dans cette thèse (voir les chapitres 1 et 3).

Encore un mot, avant d’entrer in medias res : il est vrai que la linguistique en tant que science humaine est assez souvent considérée (surtout par les gens des sciences ‘«’ ‘ dures ’») comme une description intéressante mais superficielle des langues et de leurs grammaires, à savoir un ensemble de (pseudo?)-théories qui n’ont pas de grand pouvoir explicatif. Cependant, si l’on considère des théories, comme celles que nous allons présenter dans ce chapitre, on se rend compte qu’une telle dévalorisation de la linguistique n’est pas justifiée. Comme on le verra, la linguistique, enrichie par la pragmatique, n’explique pas seulement comment fonctionne le langage, mais aussi, jusqu’à un certain point, comment fonctionne l’esprit. A ce titre, elle a sa place parmi les sciences cognitives.

Notes
20.

Nous en parlerons plus tard dans ce chapitre.