2.4.2 - Formulation des hypothèses

La deuxième étape est la formulation des hypothèses ontologiques sur les entités et les relations spatiales et temporelles. Pour ce faire, nous avons eu recours à l’abondante littérature en philosophie et linguistique sur le temps ainsi qu’à la littérature en psychologie sur la perception de l’espace (Marr, 1982, Hoffman, 1998). Notons que dans les travaux de Vendler (1957), que nous allons présenter au chapitre 3, on trouve une ontologie temporelle, qui est en fait l’ontologie sur laquelle s’appuient la plupart des travaux actuels sur le temps, qu’ils relèvent de la linguistique ou de la philosophie. Quant à l’espace, il a fait l’objet d’un certain nombre de travaux théoriques en linguistique (en français, on citera principalement le travail de Vandeloise1986). En anglais, on citera les travaux de Jackendoff (1996), d’Herskovits (1986), de Talmy (2000) et de Levinson (2003)ainsi que certains travaux en psychologie (surtout dans le domaine de la physique naïve ; cf. chapitre 4). Les développements philosophiques sur l’ontologie spatiale apparaissent en revanche récemment (cf. Casati & Varzi, 1995, 1999). Le temps a, en revanche, donné lieu à très peu d’investigations en psychologie.

En parallèle, les hypothèses que nous avons tirées de l’examen des exemples du corpus SILFIDE ont été confrontées aux données que nous avons obtenu des informateurs de langues maternelles diverses présentées dans le premier chapitre (le serbe, l’anglais, le swahili, le kikuyu, le louo, l’arabe et le japonais). Dans ce but, nous avons fait des questionnaires pour voir si les emplois temporels des prépositions spatiales (ou vice versa, les emplois spatiaux des prépositions temporelles) qu’on a observés en français existent aussi dans ces langues et si ces langues ont des emplois ‘«’ ‘ spécifiques ’» de prépositions spatiales ou temporelles 32 . Les emplois non-standard et idiosyncrasiques des prépositions seront présentés et analysés dans les chapitres 7 et 8 de notre thèse dans le cadre de la Théorie de l’Optimalité, de la Théorie du Lexique Génératif et de la Théorie de la Pertinence.

Disons enfin quelques mots de nos informateurs pour les langues non indoeuropéennes. Pour le japonais et l’arabe, nos informants étaient des étudiants de la Faculté des lettres à Genève. Pour le swahili, le kikuyu et le louo, nous avons effectué des études sur le terrain (au Kenya) où nous avons eu la possibilité de parler avec les spécialistes de ces langues mais aussi avec des locuteurs natifs. Ajoutons aussi que, parfois, nous avons comparé les données du serbe (qui est notre langue maternelle) avec les données d’autres langues slaves. Pour ces dernières, nous sommes reconnaissante aux participants des différentes conférences internationales en linguistique slave.

Notes
32.

Les questionnaires sont donnés en annexe.