Dans son livre Toward a Cognitive Semantics, Talmy (2000) a consacré plusieurs chapitres à notre conceptualisation de l’espace et notamment à la nature du site et de la cible, qu’il appelle figure et ground. Selon Talmy (2000, 180), notre conceptualisation de la structure spatiale a deux sous-systèmes principaux :
Quant aux propriétés spatiales statiques des entités matérielles, il y en a trois types (Ibidem, 182) :
Passons maintenant aux relations dynamiques du deuxième sous-système par rapport à la matrice : ce sont des relations de mouvement à travers une région et de transposition d’une localisation à une autre.
Il y a aussi trois types de propriétés spatiales dynamiques des entités matérielles :
Dans son étude des entités et relations spatiales, Talmy fait une analyse très détaillée des caractéristiques de la cible – l’objet focal (figure, focal object) et du site – l’objet référentiel (ground, reference object). Nous reproduisons ici le tableau où il fait le sommaire des différences entre eux (idem, 183. Nous traduisons) :
L’objet focal | L’objet référentiel |
a des propriétés spatiales ou temporelles inconnues | a des propriétés spatiales ou temporelles connues et sert de référence |
plus dynamique | localisé plutôt de façon permanente |
plus petit | plus grand |
plus simple géométriquement | plus complexe géométriquement |
apparu plus tard sur la scène ou dans la conscience | apparu plus tôt sur la scène ou dans la conscience : dans la mémoire |
plus pertinent | moins pertinent |
moins percevable immédiatement | plus percevable immédiatement |
plus saillant une fois aperçu | moins saillant – constitue l’arrière plan |
plus dépendant | moins dépendant |
En somme (idem, 184), l’objet focal est une entité mouvante (réellement ou conceptuellement) dont la position, l’orientation ou le chemin sont conçues en tant que variables dont les valeurs particulières sont la question pertinente. L’objet référentiel, lui, est une entité stationnaire relativement au cadre de référence et par rapport à laquelle l’objet focal est situé.
Dans le domaine temporel, les deux entités sont définies de façon analogique. Ainsi, la cible est un événement dont la localisation dans le temps est conçue comme une variable dont la valeur particulière est la question pertinente. Le site est un événement référentiel qui a une position stationnaire relative au cadre de référence (en général la ligne unidimensionnelle du temps) et c’est par rapport à lui que la localisation temporelle de la cible est déterminée. A titre d’exemple : He exploded after he touched the button (Il a explosé après avoir touché le bouton). La cible est toucher, le site est exploser (Talmy, 2000, 320).
Revenons aux relations spatiales. Dans les langues, les prépositions définissent la géométrie de l’objet focal beaucoup plus simplement 56 que celle de l’objet référentiel. On en trouve l’explication dans notre façon innée de concevoir et percevoir l’espace. On a donc plusieurs types géométriques d’objet référentiel (idem, 191). Il peut être traité comme :
Les prépositions présentées jusqu’ici ne décrivent pas l’objet référentiel comme ayant des parties avec une identité propre. Mais certaines prépositions jouent exactement sur ce facteur (ibid., 198). Bien évidemment, le fait que l’objet a des parties est lié au fait qu’il peut posséder sa propre orientation. Talmy distingue trois sortes de prépositions de ce type en utilisant comme critère ‘«’ ‘ la distance séparationnelle entre la cible et le site ’» :
Dans son livre, Talmy introduit une autre notion, sans laquelle il est impossible de définir les relations spatiales. Il s’agit de celle d’objet référentiel secondaire (ibid., 204). Il y en a de deux types :
Finissons cette section en énumérant les vingt paramètres qui sont (selon Talmy) pertinents pour la configuration spatiale donnée par les prépositions et les déictiques (idem, 241) :
Bien évidemment, si on voulait avoir des expressions spécialisées pour représenter toutes ces différences, on aboutirait à un très grand nombre de prépositions. Or, conclut Talmy, cela est impossible pour un système économique de symboles tel que le langage humain. La solution est donc dans la nature des prépositions : chacune d’entre elles couvre un certain nombre de critères et ne pose pas de conditions sur les autres. De plus si une préposition x est basée sur, par exemple, neuf paramètres, on ne peut pas s’attendre à en avoir une autre, y, qui serait basée sur huit de ces paramètres et sur un paramètre différent (ibid., 243).
A la différence de Talmy, Vandeloise est moins intéressé par la complexité des relations et des entités spatiales que par les différents emplois des prépositions spatiales fondamentales en français.
Parfois il est représenté comme un point.