L'apport de la population provinciale dans les communes de la banlieue parisienne est non négligeable, tout en connaissant de nombreuses évolutions. Jean-Paul Brunet rappelle que la région parisienne est l'une des régions qui bénéficie le plus des apports de l'immigration nationale : la Seine et de la Seine-et-Oise sont les départements qui connaissent une immigration nationale la plus importante depuis le début des années 1870. Cette part de la population migrante dans le peuplement est toujours majoritaire dans le département de la Seine. Derrière ces deux départements formant la région parisienne, seules les régions lyonnaise et marseillaise, ainsi que les marges de la région parisienne (département de la Seine-et-Marne) profitent de cette migration nationale. A partir du règlement de la guerre de 1870, ces régions attractives sont rejointes par le nouveau Territoire de Belfort, signe de la forte mobilité de proximité des Alsaciens-Lorrains désireux de rester Français 157 .
L'évolution de la population provinciale dans le département de la Seine confirme les conclusions de Jean-Paul Brunet sur l'importance de la population provinciale dans le peuplement de Paris et de la banlieue parisienne 158 . Les données étant disponibles jusqu'en 1911, on peut voir que cette place prépondérante dans les régions d'attraction nationale du département de la Seine ne se démentit pas jusqu'à la veille de la guerre, tout en s'infléchissant : le pic des arrivées de migrants se situe entre les années 1870 et 1891, ce que Jean-Paul Brunet a montré pour Saint-Denis en comparant la proportion de natifs de province présents sur les listes électorales de 1891 et celles de 1869.
L'appel de la province, tout en continuant d'être à un niveau élevé, se stabilise au tournant du siècle. Par contre, la Seine-et-Oise prend le relais de cet afflux de migrants pour atteindre un taux de présence d'allogènes proche de celui du département de la Seine. Il faut toutefois nuancer largement ce qui peut apparaître comme une illustration de la force de l'exode rural : Louis Chevalier d'une part, Gérard Jacquemet pour Belleville et surtout Paul–André Rosental ont confirmé la faiblesse relative de cet exode rural, de fait de deux phénomènes : d'une part la forte proportion des populations migrantes à être déjà citadines, d'autre part la forte proportion de natifs de la Seine parmi les habitants de la Seine-et-Oise, et ce dès la veille de la Première Guerre mondiale 159
Statistique générale de la France, Recensement général de la Population, 1911, tome 1, 2ème partie, p. 66. Voir tableau en annexe.
Brunet, J.-P., Une banlieue ouvrière, Saint-Denis, thèse citée, p. 109.
Faure, A. "de l'urbain à l'urbain" : du courant parisien de peuplement en banlieue (1880-1914)", Villes en parallèle, n° 15-16, pp. 155-174 ; Lévy-Vroeland, Cl. "un espace ouvert : usages sociaux du logement en ville entre 1830 et 1880", Recherches contemporaines, n° 3, 1995-1996, pp. 63-90.
Statistique Générale de la France, 1911, données rétrospectives, tome 1, 2ème partie, p. 66. Tableau légendé de la manière suivante : "pour 100 Français, nombre de Français nés hors de France".