2. Les marques de l'aisance

a. Fortunes

"Le rang et l'argent" : c'est ainsi qu'Adeline Daumard 584 confirme l'importance de l'évaluation des niveaux de fortune pour tenter d'appréhender ceux qu'elle appelle les "bourgeois" ; c'est aussi en fonction de ces évaluations qu'il est possible de caractériser l'aisance des élites. Or, si l'état civil et la reconstitution des familles posent déjà problème à l'historien face à des sources disparates, l'évaluation des niveaux de fortune est plus ardue encore. Autant le rang et la profession sont des éléments mis volontiers en avant par les individus, dans les annuaires, lors des actes de la vie civile, autant le patrimoine, surtout mobilier, fait partie des éléments plus secrets et réservés à l'intimité familiale. Les contrats de mariage, qui confrontent la richesse de deux familles, sont une source intéressante pour constituer cette évaluation. Toutefois, la source principale de ce travail sur les niveaux de fortune reste la déclaration de succession, normalement enregistrée au lieu du décès 585 , qu'il est fort utile de compléter avec les inventaires après décès. A côté de ces sources fiscales et patrimoniales, d'autres documents, plus épars, permettent de compléter ces évaluations, en particulier lors des enquêtes engagées par l'administration préfectorale afin de déterminer l'aisance suffisante du candidat à la mairie. Enfin, pour les fonctionnaires de l'administration centrale, il existe des dossiers de personnel qui donnent non pas une évaluation de la fortune, mais celle des revenus (traitements et primes, avancement de carrière), associée parfois à des annotations sur la fortune de la famille.

Pour les recherches sur les successions, la communicabilité à 100 ans réduit drastiquement le contingent des individus pour lesquels on peut espérer trouver la déclaration de succession : c'est donc essentiellement sur le premier groupe chronologique qu'il est possible de saisir la réalité de la richesse des familles des maires. Pour les maires plus jeunes, une évaluation peut être faite à partir du contrat de mariage, mais elle ne dit rien sur l'accumulation de richesse durant la vie active précédant souvent le mandat mayoral. C'est donc une lacune avec laquelle il faut composer. Pourtant, la propension des maires à être attachés à leur commune de mandat simplifie largement le travail de recherche, puisque plus de la moitié d'entre eux décèdent dans la commune dont ils ont été maire 586 ; malgré cela, l'absence de données (un peu plus d'un tiers des lieux de décès restent inconnus 587 ) et l'impossibilité légale de communication des archives de l'enregistrement limitent l'effectif global. D'autre part, les archives de l'enregistrement sont consultables de façon lacunaire pour la banlieue parisienne, du fait du mauvais état des registres ; par ailleurs, l'absence de trace de succession ne veut pas forcément dire que ces individus ne laissent rien à leur décès, mais parfois que cette succession est enregistrée dans un autre département, lieu d'une maison de villégiature par exemple, dont il est quasiment impossible de retrouver trace. Enfin, le travail sur les actifs successoraux n'exclut pas la possibilité de consulter les inventaires après décès, conservés soit aux Archives des Hauts-de-Seine pour les actes passés devant les notaires de Sceaux et de Montrouge, soit le plus souvent devant un notaire parisien. Dans les nombreux cas où l'enregistrement de la succession est introuvable, il est quasiment impossible de retrouver, parmi les 122 études notariales dont les minutes sont conservées aux Archives Nationales, celui auprès duquel l'inventaire a été effectué. C'est donc forcément un état fragmentaire des fortunes qui a pu être évalué pour les édiles banlieusards de cette première période, décédés entre 1873 et 1898 588 .

Les maires nommés – c'est-à-dire en poste entre 1860 et 1884 – représentent la quasi-totalité de notre étude sur les successions. Douze individus dont les dates de décès sont connues font partie de ce groupe 589 . Seules sept successions ont pu être retrouvées, essentiellement du fait de l'absence du registre nominatif de l'enregistrement aux Archives des Hauts-de-Seine. Le niveau moyen de ces successions s'élève à près de 400 000 francs 590 , ce qui confirme l'appartenance des édiles au monde de la bourgeoisie ; mais on est loin d'une édilité de notables fortunés, tels que les maires nommés apparaissent très souvent.

Cette moyenne cache d'importantes disparités : Jean-Baptiste Dupont, entrepreneur en bâtiment, laisse un peu plus d'un million à son décès, soit une fortune 18 fois plus importante que celle de Jean-François Raveret, fonctionnaire au Ministère de la Guerre, qui laisse 74 000 francs en 1898, ou Pierre Leplanquais, fabricant d'instruments de chirurgie, dont la succession s'élève à un peu plus de 73 000 francs en 1873.

Quelques uns de ces maires font indéniablement partie des fortunes aisées proches du monde de la grande bourgeoisie parisienne, bien que la plupart d'entre eux appartiennent à une petite bourgeoisie de l'épargne et de l'entreprise, certes aisée, mais dont les niveaux sont loin d'atteindre les successions de certains hauts fonctionnaires, et encore moins de notables étudiés pour d'autres villes sous le Second Empire 591 . Peut-on se représenter ces deux mondes qui se côtoient dans la gestion des communes de banlieue ? Les inventaires après décès d'une part, les mariages effectués par les maires mais aussi les dots constituées pour leurs filles sont autant d'éléments qui permettent de voir les manières de vivre bourgeoisement en banlieue parisienne dans le dernier quart du XIXe siècle.

Pour les "grands bourgeois", très peu nombreux – deux individus seulement, par leurs alliances matrimoniales et familiales comme par les réseaux de famille, peuvent appartenir à ce groupe social aux contours extrêmement flous –, de nombreuses traces de cette vie bourgeoise parisienne décrite par Adeline Daumard se retrouvent, mais avec des nuances. En cette fin de Second Empire, et plus encore ensuite, la double résidence, associant une habitation quotidienne à Paris à une maison de campagne en banlieue – plus ou moins lointaine, plus ou moins réputée – n'est plus une certitude. François Huillier, le notaire parisien, est l'exemple de ces grands notables devenus maires de la commune où ils acquièrent une maison de campagne, ici à Bagneux. Mais sa résidence principale reste à Paris, d'abord rue de Taitbout, puis rue de Provence, où il décède en 1873 : ces résidences sont à proximité de son étude de notaire 592 . Après 1892, il n'y a plus aucune trace des Huillier à Bagneux 593 , le château des Marronniers devenant ensuite la propriété de Théodore Tissier et de son beau père l'architecte Louis Boileau, certainement acquise en commun.

En 1895, l'évaluation de la succession laissée par Jean-Baptiste Dupont, qui s'élève à 1 339 180 francs, le place parmi les très riches notables de la commune de Vanves 594 . A l'inverse de François Huillier, il n'est pas parisien, puisque la commune de Vanves est le lieu d'ancrage local de sa famille. Marié une première fois en mars 1844 avec Joséphine Plet, qui apporte en dot 10 000 francs pris sur le fonds de commerce de marchand boulanger de son père, exploité à Vanves par sa mère depuis le décès de ce dernier, Jean-Baptiste Dupont s'établit rapidement comme entrepreneur de travaux publics. En 1855, il achète à Paris un terrain avenue de Breteuil, à l'angle de la rue Barthélemy, sur lequel il construit une maison qu'il habite jusqu'au décès de son épouse en août 1865. En 1860, il acquiert une autre parcelle de terrain à proximité de son domicile pour y installer son chantier d'entrepreneur en bâtiment. Veuf en 1865 avec trois enfants mineurs, il se remarie rapidement après le décès accidentel de sa femme. Il épouse en 1866 Anne Duburguet, fille d'un propriétaire parisien du faubourg Saint-Honoré 595 . Son départ de Paris coïncide, entre 1867 et 1871, avec son retrait des affaires et le retour sur la commune de Vanves où il possède depuis 1857 les biens immobiliers reçus lors du partage de la succession de ses parents et de son frère cadet. La famille s'installe alors dans la propriété héritée, rue Saint-Martin, composée de plusieurs corps de bâtiments entourant une cour, et dont, du moins au début, une partie est louée. Cette propriété revient lors de son décès en usufruit à sa seconde épouse. La fortune de la communauté entre Jean-Baptiste Dupont et sa première épouse, Joséphine Collet, se compose, lors du décès de cette dernière, en 1865 – il a alors 47 ans – d'une part, pour 40 % de la valeur des immeubles, en grande majorité la maison de la rue de Breteuil et les divers terrains servant de chantier sur le boulevard de Grenelle, d'autre part, pour près de la moitié de cette fortune, en créances diverses sur des particuliers. L'estimation de cette fortune de la communauté s'élève à 232 599,13 francs 596 , somme à laquelle il faut ajouter la valeur de la propriété échue en propre à Jean-Baptiste Dupont du fait du décès de ses parents, propriété estimée à 75 000 francs en 1895 597 . Cette composition montre à la fois l'importance des valeurs immobilières et celle des créances sur des particuliers, qu'elles soient chirographaires ou hypothécaires. Ainsi, a contrario de la constitution de l'aisance de Barthélemy Périer, marchand carrier, analysée plus haut, il semble que le rôle d'entrepreneur de Jean Baptiste Dupont soit moins important dans la gestion de ses affaires que celle de prêteur : la part dévolue à l'exercice de son métier, matériel, marchandises et achalandage du fonds d'établissement, ne s'élève qu'à 6,06 % de la fortune de la communauté, encore moins si l'on ajoute à cette dernière la valeur de la propriété de Vanves. Jean-Baptiste Dupont se fait ainsi prêteur, passant souvent par un notaire pour garantir, suivant l'usage du Second Empire, ce prêt par une hypothèque 598 : c'est finalement en tant que brasseur d'argent, à défaut de banquier, que Jean-Baptiste Dupont semble avoir consolidé sa fortune, comme le montre la somme toujours extrêmement importante de créances présentes lors de son décès en 1895 599 . L'absence, à cette date, de rente sur l'Etat dans l'actif de la succession, tout comme en 1866 de titres en actions ou obligations – même si on trouve quelques valeurs boursières, essentiellement des obligations Panama lors du décès en 1895 –, la forte proportion d'investissement immobiliers et de créances garanties par des biens immobiliers semble caractériser une élite ancienne, très éloignée des élites républicaines décrites par C. Charle 600 .

Hormis ces deux individus aux niveaux de fortune exceptionnels, comment se répartit la fortune présente au décès des maires dont l'aisance est moins prononcée ? Tout d'abord, il faut remarquer que la répartition des avoirs présents au décès ne dépend pas directement du niveau de fortune. Pierre Leplanquais, décédé en 1873 à 47 ans, laisse une succession de 73 349,35 francs 601 , composée pour plus de la moitié de biens immobiliers, dont la maison qu'il occupe à Vanves tout en louant un appartement rue de Rivoli à Paris. Le reste de la succession est composé essentiellement de liquidités, du mobilier personnel et surtout du matériel et de marchandises servant à la fabrique d'instruments de chirurgie qu'il exploitait à Vanves. Aucune trace de rentes, encore moins d'actions ni d'obligations : les revenus tirés de sa fabrique ne lui ont visiblement permis qu'un investissement dans une maison de campagne, utilisée aussi pour la proximité avec la fabrique qu'il déplace du quartier du Temple à Vanves au milieu des années 1860. L'aisance de la famille, permettant d'entretenir un appartement rue de Rivoli dans le quartier d'origine des Leplanquais et une maison à Vanves n'est somme toute que relative et ne permet guère d'épargne.

Les maires banlieusards seraient-ils des bourgeois peu enclins à suivre la modernité, notables locaux attachés à la possession foncière et brasseurs d'argent suppléant, pour une clientèle de classes moyennes, la faiblesse de l'implantation des banques ? Seul le Crédit Lyonnais dispose d'une agence à Montrouge, au centre de la ville, ouverte au tournant du siècle. Le réseau des agences reste encore très limité avant 1914, et la banlieue, en ce point comme en tant d'autres en terme d'infrastructures, souffre certainement d'un réel déficit 602 . Pourtant s'esquisse, y compris au sein de ces maires "notables locaux" de la première période, un nouveau type d'investisseur bourgeois, non seulement parce qu'ils n'appartiennent pas au même monde professionnel, mais aussi parce que les avoirs qu'ils laissent à leur décès comportent de plus en plus de valeurs mobilières au détriment, non pas de l'investissement foncier, mais des créances hypothécaires chères à Jean-Baptiste Dupont.

Louis Rolland ne dispose pas d'héritage : fils d'un régisseur de grands domaines agricoles, c'est par son mariage qu'il entre dans le monde des petits entrepreneurs de chimie, il devient d'abord gérant, puis propriétaire d'une fabrique de produits chimiques créée sous la forme de société en nom collectif en 1846 à Montrouge, entre son beau-père, Claude Roussel, et deux des beaux-frères de ce dernier, François Gontines et Charles Raverdy fils, afin d'assurer la poursuite de l'entreprise familiale Raverdy 603 . La fabrique de Montrouge s'est développée bien avant l'arrivée de Louis Rolland, qui en achète le fonds durant son mariage, essentiellement avec le montant de l'héritage reçu par sa femme lors du décès de son grand-père 604 . La composition de la succession laissée par cet entrepreneur relève de formes modernes d'investissement : 20 % d'investissements immobiliers, représentant la valeur de la maison de Montrouge dont son épouse a hérité et qui est le siège de la fabrique de produits chimiques, 47 % de valeurs boursières. Ces dernières sont en majorité des obligations, prises pour un peu plus d'1/6e au sein des emprunts émis par le Crédit Foncier de France, obligations dites "foncières" et "communales", et pour le reste, dans des sociétés de chemin de fer, français en minorité, étrangers pour la plupart. Ainsi, Louis Rolland a acheté de nombreuses obligations russes (emprunt russe sur l'Etat, banque centrale du Crédit Foncier de Russie), mais aussi des obligations des chemins de fer espagnols et portugais, ainsi qu'une part importante d'obligations de la dette convertie ottomane.

Tableau 41. Composition de la succession Rolland, 1893
Tableau 41. Composition de la succession Rolland, 1893 AD Hauts-de-Seine, 3Q SCE_MD 130, succession et 3E/MON_855, inventaire après décès.

La caractéristique de ces investissements montre une attitude à la fois peu tournée vers les placements français garantis par l'Etat (aucune trace de rente sur l'Etat, pourtant l'investissement préféré des Français à l'époque), conservant toutefois par certains côtés un aspect traditionnel, par le choix privilégié des obligations de chemin de fer dans des pays en développement économique, la Russie, l'Espagne et le Portugal. Alors qu'il travaille dans l'industrie chimique, aucune trace d'investissement dans les entreprises des secteurs industriels modernes n'est visible lors de son décès en 1893, signe d'une frilosité ou d'une gestion "en bon père de famille", prudente, d'un capital peu important investi avec des risques peu élevés.

Jean-Baptiste Jullien, proviseur du Lycée de Vanves, relève plus encore de cette catégorie d'investisseurs en valeurs mobilières à forte garantie. Sa succession en 1895 ne fait apparaître aucun investissement immobilier, alors que son dossier de fonctionnaire fait référence à des logements situés à proximité du Lycée dont il est devenu propriétaire avec son gendre, professeur au même lycée 606 . Il est possible que ces investissements immobiliers aient été vendus ou cédés en toute propriété au gendre. En 1886, 89 % des avoirs détenus sont composés de valeurs boursières, dont 70 % d'obligations, privilégiant les emprunts communaux (obligations de la Ville de Paris et de la Ville de Lille) et les obligations de grandes sociétés, tels que les compagnies de chemins de fer Paris-Lyon-Méditerrannée et de l'Ouest ou la Compagnie Générale des Eaux. Les grands travaux entrepris par des intérêts français sont aussi au premier plan, comme la Compagnie du Canal de Suez et celle du Canal de Panama, dont on sait à quel point elle avait attiré – et ruiné – de nombreux petits actionnaires 607 . Parmi les valeurs étrangères, très peu nombreuses, toujours une préférence pour les sociétés de chemin de fer, ici la Cie des Chemins de fer Russes Nicolas et la Brazilian Imperial Central Bahia Railway Cie 608 . Ces deux exemples soulignent à la fois la faiblesse des sommes investies, la prudence – parfois relative – des choix d'investissement et la confiance toujours présente dans l'immobilier. La part de l'investissement boursier semble augmenter avec le temps, peu importante jusqu'au début des années 1870, nettement plus importante par la suite, soit parce que les niveaux d'aisance atteints au moment de l'apogée spéculative de la Bourse sous le Second Empire n'ont pas permis ce type d'investissement, soit parce que ces notables récents, finalement plus proches des "couches nouvelles" que de la bourgeoisie parisienne fortunée, n'entrent dans la logique de l'investissement moderne via les courtiers en bourse qu'à la Belle Epoque, et ne sont en aucun cas des précurseurs modernes, ni dans la chronologie de leurs placements, ni dans la répartition de ceux-ci 609 .

Elites modestes, ces maires sont aussi soumis aux contingences de l'époque. Jean‑François Raveret, fonctionnaire de niveau moyen au Ministère de la Guerre, semble disposer d'une relative aisance aux débuts de la République, ou du moins de suffisamment d'entregent. Intéressé financièrement dans la constitution de la société immobilière dite Société foncière de Montrouge, il en est le principal acteur sur place, possède une maison sur l'un des terrains lotis et est le mandataire de la société pour la vente des différents lots. Sans être associé, il est récompensé de ses talents de négociateur en bons de jouissance de la société, mise en liquidation en 1877 610 . Sa promotion dans l'ordre de la légion d'honneur en 1875 611 laisse perplexe, peu justifiée par ses états de service, si ce n'est sa participation à la campagne contre l'Allemagne en 1870-1871, comme garde au Ministère de la Guerre, alors qu'il a déjà 53 ans. C'est peut-être du côté de sa famille que l'on peut voir les raisons de cette récompense de la République : fils d'un militaire de carrière, son frère André est vétérinaire militaire et décoré en 1860 de la croix de la Légion d'honneur, son fils Louis Raveret est lui aussi décoré en 1890 612 . L'aisance due en partie à son patrimoine et à celui de sa première épouse, ainsi que son traitement, qui permet une petite épargne, ne suffisent cependant pas à investir en bourse, et, "entraîné à souscrire à son canal de Panama par M. Ferdinand de Lesseps [qu'il connaît] depuis longtemps, et dont il [lui] dépeignait les plus grandes espérances 613 ", il est obligé de prendre un emprunt hypothécaire de 25000 francs auprès du notaire de Châteaudun pour pouvoir acheter 100 actions de 500 francs chacune. Ruiné par le "désastre de Panama, par ceux de la guerre de 1870 et la fâcheuse déception du Comptoir d'Escompte", il estime avoir subi une perte de 120 000 francs qu'il avait espéré léguer à ses enfants. La composition de sa succession en 1899 témoigne certainement de cette méfiance envers les valeurs mobilières, puisqu'elles ne représentent que 25 % de l'ensemble des avoirs, moitié en actions d'entreprises françaises, moitié en obligations, le plus souvent prises sur le Crédit Foncier ou lors des emprunts émis par les Ville de Paris et de Lille 614 .

Nos édiles locales sont très souvent propriétaires de leur logement, à moins qu'elles ne soient locataires à Paris et propriétaires d'une maison de campagne en banlieue, comme c'est le cas pour Pierre Leplanquais, qui décède rue de Rivoli "à son domicile", alors que sa fabrique et sa demeure semblent bien être situées à Vanves – et que sa succession est réglée dans le ressort du bureau de Sceaux dont dépend alors la commune. Deux adresses parfois, mais le plus souvent les inventaires après décès ne révèlent le mobilier et le détail que d'une seule demeure, dont il semble bien qu'elle soit la principale, et qui est située en banlieue. Il est finalement quasiment impossible de connaître une éventuelle résidence en province, sauf à ce que ces individus soient présents dans les annuaires regroupant les propriétaires de châteaux, manoirs et autres villégiatures, ce qui n'est le cas que pour l'un d'entre eux, le notaire parisien François Huillier.

Notes
584.

Daumard, Aline. Les bourgeois et la bourgeoisie en France depuis 1815, Flammarion, 1991, p. 69 et pp. 75 et suiv.

585.

C'est cette source qu'utilise Christophe Charle. Les élites de la République, op. cit.p. 356 et suivantes.

586.

Il y a 19 individus sur 33 qui décèdent dans la commune dont ils ont été maires, soit 57,58 %. Si l'on exclut ceux dont on ne connaît pas le lieu de décès, la proportion s'élève à près de 80 %. Voir le tableau en annexe.

587.

Il y a 9 individus dont il a été impossible de retrouver le lieu de décès, la plupart étant toutefois les plus jeunes.

588.

Pour le détail des recherches effectuées sur les inventaires après décès, voir en annexe.

589.

Voir le tableau en annexe.

590.

Le montant de la succession de François Huillier, qui s'élève à près de 738000 francs, ne semble pas prendre en compte l'évaluation de 3 immeubles parisiens et d'une propriété à Bagneux, réservé à la veuve. AD Paris, DQ7 12349, 22 février 1873.

591.

Tudesq, les grands notables, op. cit. ; Daumard, A. Les bourgeois et la bourgeoisie parisienne, op. cit.

592.

Yon, J.-Cl., les notaires parisiens sous le Second Empire. Maîtrise d'Histoire, sld d'A. Daumard, 1988, Université Paris-1, p. 115. et annexes. AN, BB10 1525, cession Huillier.

593.

Le mariage de son fils Paul avec une Lejeune de Bellecour, sa cousine par alliance, petite fille d'un ancien député du Loiret propriétaire du château de Bellecour à Pithiviers, explique certainement l'augmentation de fortune de la famille, puisque Paul Huillier devient propriétaire du Château de Courcelles-le-Roy, près de Châtillon dans le Loiret. Annuaire des châteaux et des villégiatures, A. Fare, 1888 (1ère édition) et éditions suivantes, confirmées dans le Bottin mondain à partir de 1908.

594.

AD Hauts-de-Seine, 3Q SCE_MD 135, succession du 25 janvier 1896. La date de l'inventaire après décès n'est pas indiquée, rendant impossible, en l'absence de répertoire pour l'étude CIII, d'en retrouver la trace parmi les minutes conservées au dépôt des Archives nationales de la période contemporaines à Fontainebleau.

595.

AN, étude CIII/973, Contrat de mariage, 3 juillet 1866, Jean-Baptiste Dupont & Anne Duburguet.

596.

Voir en annexe, composition de la fortune de Jean Baptiste Dupont en 1865, analyse d'après AN, étude CIII/945, inventaire après le décès de Mme Dupont née Plet, 21 septembre 1865 et AN, CAC, étude CIII/962, état liquidatif des communautés en succession Dupont-Plet, 9 mars 1866.

597.

AD Hauts-de-Seine, 3Q SCE_MD 135, Succession Jean-Baptiste Dupont, 25 janvier 1896. [original quasiment illisible du fait de la conservation du papier]. AN, CAC, 870285/0236, Etude CIII/2128, inventaire après décès J.-B. Dupont, 21 oct.–4 déc. 1895.

598.

Yon, J.-Cl., les notaires parisiens sous le Second Empire, maîtrise, 1988, p. 151. Plessis, A. "le notaire et le banquier au XIXe siècle", Le Gnomon, n° 59.

599.

AD Hauts-de-Seine, succession précitée : 3 pages de créances hypothécaires, dont les dates sont comprises entre 1879 et 1893. et inventaire après décès, déc. 1895.

600.

Charle, C. les élites de la République, op. cit., pp. 367-378. cf. aussi Daumard, A. (dir.), Les fortunes françaises au XIX e siècle: enquête sur la répartition et la composition des capitaux privés à Paris, Lyon, Lille, Bordeaux et Toulouse, d'après l'enregistrement des déclarations de succession. La Haye Mouton, 1973.

601.

Il n'est rien dit dans la succession des reprises et récompenses exercées par l'épouse du défunt, ce qui laisse penser d'un niveau de dot faible. La fermeture du dépôt du minutier central des Archives Nationales pour travaux ne permet pas de confirmer ce fait, faute de pouvoir consulter le contrat de mariage déposée en 1834 devant Maître Lavocat, notaire à Paris.

602.

L'histoire des banques est bien engagée, mais il ne semble pas y avoir encore de recherches approfondies sur les réseaux locaux et sur le rôle des agences de proximité qui, pourtant, se développent au lendemain de la Première Guerre Mondiale. Voir Annie Fourcaut pour le rôle joué par les banques dans l'obtention des prêts aux modestes nouveaux propriétaires des lotissements de la banlieue nord-est, dans Fourcaut A. la banlieue en morceaux. Créaphis, 2000.

603.

AD Hauts-de-Seine, 3E/SCE_553, inventaire après le décès de Claude Roussel, fabricant de produits chimiques, 19 déc. 1849.

604.

AD Hauts-de-Seine, 3E/MON_855, inventaire après le décès de Louis Rolland, analyse du contrat de mariage Rolland-Roussel et de la succession Raverdy échue à Célina Roussel, épouse Rolland, 1er déc. 1893.

605.

AD Hauts-de-Seine, 3Q SCE_MD 130, succession et 3E/MON_855, inventaire après décès.

606.

AN, F17 21019, dossier Jullien. Lettre de 1871 concernant la liquidation de sa retraite et faisant référence à ces biens immobiliers, détruits pendant le siège de Paris et les combats de la guerre de 1870.

607.

Mollier, J.-Y., Le scandale de Panama , Fayard, 1991.

608.

AD Hauts-de-Seine, 3Q/SCE_MD 113, succession Jullien, 11 oct. 1886, et AN étude XLIX/1701, inventaire après le décès de Jullien, 12 juin 1886, M° Robin.

609.

Pour une comparaison à des niveaux de fortune incomparables, voir Charle, C. les élites de la République, op. cit., p. 356 et suiv.

610.

AD Hauts-de-Seine, 24J1,Société foncière de Montrouge. Lettre de Raveret fils sur les bons de jouissance.

611.

LH 2272/27, Jean François Raveret (1817-1898).

612.

LH, 2272/025, André Raveret (1823-1904) ; LH 2274/008, Louis Georges Raveret (1847-?)

613.

AD Hauts-de-Seine, 3E/SCE_1121, étude de Maître Renaudin, notaire à Sceaux, inventaire après décès Raveret, 8 octobre 1898, copie du testament olographe du 3 déc. 1893.

614.

AD Hauts-de-Seine, 3Q/SCE_MD 146, succession Raveret, 8 mars 1899.