2. les exclus des actions viaires

Ce type de gestion fait apparaître en filigrane les différences d'appréciation pour les élus entre la voirie de l'espace non bâti et celle de l'ancien bourg, densément bâti. Deux conceptions de la politique viaire de la commune sont mises en place de manière concurrentielle sur l'ensemble de la période : d'une part, une gestion traditionnelle de la partie rurale du territoire de la commune, que j'ai appelé un "espace reprisé", où les opérations de voirie sont ponctuelles et le plus souvent de sauvegarde, et d'autre part une gestion plus moderne qui s'attache en priorité au centre ville. Or, cette opposition exclut une large partie de l'espace banlieusard. Marges agricoles et non bâties de l'espace communal ne sont pas les seules sacrifiées à l'amélioration de la vitrine communale (et aux obligations imposées par l'autorité supérieure) que sont les centres-villes autour de la mairie, de l'église et des écoles. En effet, les espaces exclus de ces aménagements de voirie peuvent aussi bien être éloignés du centre tout en étant densément bâtis et peuplés, comme le sont les lotissements organisés autour d'une voirie privée. Il y a donc plusieurs périphéries sur le territoire de la banlieue, et ces périphéries peuvent dans certains cas abriter une très large partie de la population communale. Là encore, la gestion municipale qui se dessine à travers cette analyse est une gestion ancienne et archaïsante, conduite en faveur non seulement des centres-villes et des espaces de pouvoir, mais aussi en faveur de leurs habitants, délaissant une large partie du territoire et des habitants des marges urbaines qui se créent de manière spontanée et bricolée depuis le milieu des années 1850.