Faire un bilan de la situation économique des communes de banlieue relève de la gageure. En effet, les statistiques disponibles et publiées sont centrées sur la Ville de Paris. Seuls les recensement à partir de 1891 permettent une exploitation socio-économique fine à l'échelle communale, dans laquelle on peut dresser un portrait sociologique des populations habitant les communes du département de la Seine dans son entier, mais non de ceux y travaillant 1222 . Certaines communes peuvent être l'occasion d'une analyse économique pertinente, d'autant plus si elles accueillent de grandes entreprises : c'est le cas à Saint-Denis, mais aussi dans l'étude novatrice effectuée par Pierre George dans les années 1950 1223 . Toutefois, pour la banlieue sud-ouest, très peu de sources permettent une analyse complète en terme d'emplois ; de la même manière, tenter de confronter l'impression de déséquilibre entre emploi et résidence, maintes fois rappelée par les élus, n'est pas une chose aisée. L'absence de sources économiques homogènes oblige au recours au Bottin du Commerce. Il existe très peu de recensements de l'activité économique pour la Seine-banlieue, et lorsqu'il existent, ils restent au niveau de l'arrondissement, non pas au niveau de la commune. Enfin, les listes nominatives de recensement utilisées pour la chapitre 1 ne donnent une image que des métiers des habitants, et ne révèle que de manière partielle les trajets entre domicile et travail.
Il faut donc tenter de croiser les sources pour confronter le ressentiment local aux réalités économiques de la banlieue 1224 . Ce constat de la difficulté à dresser un portrait économique fiable à l'échelle communale, effectué par Jean Paul Brunet dans sa thèse, est confirmé par Catherine Rhein dans l'ouvrage collectif de méthode sur l'histoire de la banlieue 1225 . De plus, l'étude locale est inégale, dans la mesure où les communes très industrialisées et accueillant de grandes unités économiques, comme Saint-Denis, apparaissent dans les enquêtes statistiques sur les entreprises de plus de 50 ouvriers menées sous la direction de Maurice Daumas. A l'inverse, la petite industrie et l'artisanat, diffus dans la majeure partie de la banlieue sud et ouest, sont quasiment absents de ces statistiques. Sur la banlieue ouest on ne dispose quasiment que de la seule thèse d'Isobe Keizo 1226 sur Puteaux et Suresnes, qu'il est possible de confronter à la thèse fondatrice de Jean Bastié sur la banlieue sud-est. 1227
Sur l'utilisation méthodologique des recensements, voir annexe du chapitre 1; sur le recensement de 1891, voir Farcy, Jean-Claude. "banlieues 1891 : les enseignements d'un recensement exemplaire", in Faure, Alain, dir. Les premiers banlieusards. Aux origines de la banlieue de Paris, 1860-1940, Créaphis, 1991, avec la nuance que les cotes d'archives utilisées par Jean-Claude Farcy ne sont plus disponibles.
George, Pierre, Etudes sur la banlieue parisienne, Fnsp, 1950.
Catherine Rhein, "croissance urbaine et peuplement des banlieues, emploi et structures d'emploi", in Fourcaut, Annie, dir. Un siècle de banlieue parisienne, 1859-1964 Guide de recherche. Paris, l'Harmattan, 1998.tout particulièrement p. 37 et suiv. Phlipponeau M., La vie rurale de la banlieue parisienne, étude de géographie humaine, Imprimerie Nationale, 1956.
Brunet, J.-P., Une banlieue ouvrière, op. cit. ; Voir aussi Claudine Fontanon, "l'industrialisation de la banlieue parisienne, 1860-1960", in Fourcaut, A., dir. Un siècle de banlieue parisienne, 1859-1964. Guide de recherche, Paris, l'Harmattan, 1998, pp. 49-73.
Keizo Isobe, Problèmes d'évolution économique et d'urbanisation dans la banlieue Ouest. Puteaux et Suresnes durant la guerre de 1914-1918 et pendant l'entre-deux-guerres.. thèse de doctorat de 3ème cycle de géographie, (Claval), Paris IV, 1981. 260 p.
Bastié, Jean. la croissance de la banlieue parisienne, Paris, Puf, 1964, 624 p.